Bekhiekh Mirna. Thèse D'exercice de Pharmacie (UPJV)
Bekhiekh Mirna. Thèse D'exercice de Pharmacie (UPJV)
Bekhiekh Mirna. Thèse D'exercice de Pharmacie (UPJV)
THÈSE
POUR LE DIPLÔME D’ÉTAT DE DOCTEUR EN PHARMACIE
JURY :
Thèse N°
1
Remerciements :
Je tiens tout d’abord à remercier toutes personnes ayant participer de prêt ou de loin
à la conception de cette thèse.
Je tiens également à remercier Mme BALTORA Sylvie ainsi que Mr BIBAUD pour
l’honneur qu’ils me font l’honneur d’être dans mon jury.
Un grand merci à mes deux amies Maïssa et Solène, pour vos relectures, et vos
conseils qui ont grandement facilité mon travail.
Mes parents, mes frères et ma sœur pour tout ce qu’ils m’ont apportés et m’apportent
encore au quotidien ! Je ne vous remercierais jamais assez pour vos encouragements
et votre présence.
Abdelhamid pour ton soutien lors de la rédaction de cette thèse, mais également pour
ta présence au quotidien.
2
Table des matières :
Introduction : ............................................................................................................... 7
PARTIE I : Les inhibiteurs de la pompe à proton (IPP) ............................................ 9
I. De la mise sur le marché à aujourd’hui ................................................. 9
3
PARTIE II : Particularités des « personnes âgées » .............................................. 35
I. Physiologie gériatrique et impact pharmacocinétique : ........................ 36
PARTIE III : Les effets indésirables des IPP au long terme :................................. 49
I. Complications au niveau du microbiote intestinal : .............................. 49
A) Magnésium .............................................................................................57
B) Vitamine B12 ...........................................................................................58
VI. Risque de fracture osseuse ................................................................. 59
Conclusion : .............................................................................................................. 71
4
Liste des abréviations :
− AH2 = Antihistaminiques H2
− AINS = Anti-Inflammatoire Non Stéroïdien
− AMM = Autorisation de Mise sur le Marché
− ANSM = Agence Nationale de Sécurité du Médicament
− AVC = Accident Vasculaire Cérébral
− ATC = Anatomique, thérapeutique, chimique
− COX = Enzyme Cyclo-Oxygénase
− DFG = Débit de Filtration Glomérulaire
− DMO = Densité Minérale Osseuse
− DPI = Dossier Patient Informatisé
− ECL = Entérochromaffine-like
− ECG = Electrocardiogramme
− FDA = Food and Drug Administration
− GJ = Gastrinémie à Jeun
− HAS = Haute Autorité de Santé
− HP = Helicobacter Pylori
− HTA = Hypertension Artérielle
− INSEE = Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques
− IP = intervention pharmaceutique
− IPP = Inhibiteurs de la Pompe a Proton
− IRA = Insuffisance rénale aigue
− IRC = Insuffisance rénale chronique
− MTX = Methotrexate
− NC = Non-conformité
− NIA = Néphrite Interstitielle Aigue
− OMS = Organisation Mondiale de la Santé
− PCA = Pneumonie Communautaire Aigue
− SOI = Sphincter Œsophagien Inférieur
− SZE = Syndrome de Zollinger Ellison
− RGO = Reflux Gastro-Œsophagien
− UGD = Ulcère Gastro-Duodénal
− VIH = Virus d’Immunodéficience Humaine
− Vd = Volume de Distribution
5
Tableaux et figures :
Figure 1 – Morphologie estomac 4 ............................................................................ 11
Figure 2 - Contrôle de la sécrétion d’acidité gastrique 4 ........................................... 12
Figure 3 - Activation des cellules pariétales 11 .......................................................... 14
Figure 4 - Reflux gastro-œsophagien 22 ................................................................... 20
Figure 5 – Formation de prostaglandines ................................................................. 22
Figure 6 – Schéma thérapeutique du traitement contre l’Helicobacter pylori ............ 26
Figure 7 - Classification du DFG selon HAS56 .......................................................... 38
Figure 8 - Anatomie du rein62.................................................................................... 39
Figure 9 - Vieillissement cardiaque64 ........................................................................ 40
Figure 10 - Interactions patient âgé et pharmacothérapie 82 ..................................... 48
Figure 11 – Pneumonie 90 ......................................................................................... 51
Figure 12 - Etiologie probable de l'IRC due aux IPP................................................. 54
Figure 13 - Mécanisme hypothétique des IPP conduisant à l'augmentation des
peptides AB .............................................................................................................. 56
Figure 14 - Diminution de la résistance osseuse hypothétique des IPP119 ............... 60
Figure 15 - Logigramme décisionnel concernant les prescriptions d’IPP non-conforme
(NC) .......................................................................................................................... 65
Figure 16 - répartition de la conformité des prescriptions (n=90) ............................. 66
Figure 17 - répartition des non-conformités .............................................................. 66
Figure 18 - Répartitions des modifications demandées et des IP effectuées ........... 68
Figure 19 – effets indésirables des IPP au long terme 122 Erreur ! Signet non défini.
6
Introduction :
Les inhibiteurs de la pompe à proton (IPP) font aujourd’hui parti des médicaments les
plus commercialisés en France. On retrouve cinq molécules, ainsi que leur générique,
sur le marché pharmaceutique français (l’ésoméprazole, l’oméprazole, le rabéprazole,
le pantoprazole et le lansoprazole). S’ils sont tous disponibles à la pharmacie sur
prescription médicale, certains sont également accessibles en libre accès au comptoir
(aussi dit OTC ou « over the counter ») après avis pharmaceutique.
Ces médicaments grands publics, quoi que possédant peu d’effets indésirables à court
terme et généralement bien tolérés, ne sont pas pour autant dénués de risque. En effet
depuis quelques années paraissent un grand nombre d’études dans la presse
scientifique, de méta-analyses et de revues évoquant ce sujet. Parmi les effets
indésirables potentiellement imputables aux IPP au long court on trouve les risques :
de démence, d’insuffisance rénal, d’infections (pneumonie communautaire acquise,
clostridium difficile), de malabsorption pouvant être à l’origine d’ostéoporose et de
fractures associées.
Si ces effets concernent tous les utilisateurs chroniques d’IPP, les personnes âgées
sont d’autant plus concernées. En effet il s’agit d’une part de la population déjà touchée
au niveau physiologique par l’âge et chez qui on constate une dégradation de certaines
fonctions dues au vieillissement (rénale, cardiovasculaire, ostéo-musculaire, gastro-
intestinal…). Les IPP au long terme peuvent participer au déclin de ces patients
souvent polymédicamentés.
En outre, il s’agit d’une partie de la population chez qui les traitements par IPP sont
instaurés et rarement réévalués. On constate qu’un grand nombre de prescription ne
respecte pas les indications ou les durées de traitement recommandées par la Haute
Autorité de Santé (HAS)1 (Annexe1).
Ces antiacides possèdent trois indications principalement que sont le reflux gastro-
oesophagien (RGO) et l’œsophagite par RGO ; la prévention des lésions gastro-
intestinales dues aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et le traitement de
l’ulcère gastro-duodénal (UGD).
7
La dyspepsie fonctionnelle associée à un RGO ainsi que le syndrome de Zollinger-
Ellison sont deux indications peu fréquentes mais pouvant justifier l’instauration d’un
traitement par IPP.
Les durées de traitement sont généralement inférieures à trois mois. Peu d’indication
nécessite une plus longue durée de traitement, excepté en traitement d’entretien dans
l’ulcère duodénal, ou dans le cas de rechutes fréquentes ou précoces de RGO et
d’œsophagite par RGO. Seules ces indications peuvent entrainer une mise en place
de traitement par IPP au long terme, à la dose efficace la plus faible.
Dans ce mémoire, après un chapitre sur les IPP nous aborderons les particularités
liées au vieillissement, puis les impacts que cette classe médicamenteuse peut
engendrer chez les sujets âgés, pour finir sur une présentation de l’étude menée au
CHCN.
8
PARTIE I : Les inhibiteurs de la pompe à proton (IPP)
Ces cinq spécialités pharmaceutiques ont pour but de diminuer la quantité d’acide
gastrique, et appartiennent donc à la grande famille des antiacides dont ils en sont les
représentants majoritaires. Au sein de cette même famille, on trouve également les
antiacides par voie topique ; les antihistaminiques H2 (AH2) ainsi que les
prostaglandines. Ils sont identifiés par la classification ATC (anatomique,
thérapeutique, chimique) suivante :
→ A : Voies digestives et métabolisme
→ A02 : Médicaments pour les troubles de l'acidité
→ A02B : Médicaments pour l'ulcère peptique et le reflux gastro-oesophagien
→ A02BC : Inhibiteurs de la pompe à protons
9
En 2013, la catégorie des antiacides s’est vue attribuer la quatrième position des
classes médicamenteuses les plus vendues en ville, avec une croissance de 4,7%3
entre 2012 et 2013 (soit ≈ 104 millions de boites vendues). Cette progression des
ventes s’observe également chez les IPP seuls, avec une progression des ventes de
l’ordre de 27% entre 2010 et 20152.
10
II. Pharmacologie et mécanisme d’action
12
Le tractus gastro-intestinal possède des cellules à fonction neuro-endocrine que
sont les cellules D, ECL (entérochromaffine-like) et G. Ces dernières vont agir sur la
régulation des cellules pariétales en stimulant ou inhibant leur activité.
La gastrine produite par les cellules G, se trouvant dans la muqueuse pylorique, ainsi
que l’acétylcholine, en provenance du nerf vague, vont stimuler la sécrétion
d’histamine H2 par les cellules ECL.
Il existe un rétrocontrôle négatif des ions H+ sur les sécrétions hormonales par
production de somatostatine via les cellules D. Ces dernières peuvent également être
activées par une hormone intestinale qu’est la sécrétine. La somatostatine inhibe à la
fois les cellules pariétales, les cellules ECL mais également la production de gastrine.
Les cellules pariétales nécessitent une grande quantité d’énergie lors de leur
activation, ce qui explique qu’elle contiennent une quantité importante de
mitochondries7,10.
Une fois activées, elles vont subir une modification conformationnelle de leur
cytosquelette11. Elles vont passer d’un état basal, au repos, à un état sécrétoire10. La
stimulation de la cellule entraine une dilatation des canalicules sécrétoires actifs avec
une augmentation du nombre de microvillosités apicales par translocation tubulo-
vésiculaire du cytosol vers la membrane apicale (cf Annexe 3 et page suivante).
13
Figure 3 - Activation des cellules pariétales 11
Dans les années 1970 afin de pallier les troubles liés à l’acidité gastrique, la classe
des antihistaminiques H2 (AH2) a été développée. Il s’agit de médicaments bloquant
les récepteurs membranaires H2, de telle sorte que l’histamine ne puisse plus s’y fixer
et entrainer la sécrétion d’acide. Néanmoins, cette dernière peut toujours avoir lieu
par stimulation à l’acétylcholine ou directement par la gastrine, ce qui a pour
conséquence d’entrainer une réponse variable des AH2. Afin de permettre une
inhibition plus fiable et forte, les inhibiteurs de la pompe à proton ont vu le jour dans
les années 80.
14
Figure 4 - Structure chimique générale et mécanisme d'action des IPP8
1) Absorption et distribution
15
2) Métabolisme
16
On distingue les métaboliseurs « lents » et les métaboliseurs « rapides ». Les
conséquences de ces différents métabolismes sont que par exemple chez un
métaboliseur rapide des résistances à certaines thérapeutiques pourront être
observées tandis que la même dose de médicament administrée chez un sujet
métaboliseur lent pourra entrainer des effets indésirables.
3) Elimination
La demi-vie d’élimination est comprise entre moins d’une heure pour l’oméprazole et
jusqu’à 2 heures pour le lansoprazole en fonction des doses administrées.
L’élimination des IPP se fait principalement sous forme de métabolites (environ 80 %),
une très faible quantité de molécule mère est retrouvée. La voie d’excrétion principale
est rénale par les urines, dans une moindre mesure on peut retrouver des métabolites
dans les fèces lors de la sécrétion biliaire.
17
III. Indications et recommandations actuelles :
Les IPP possèdent trois indications principales définies par la Haute Autorité de Santé
(HAS)1, que sont :
→ Le traitement du reflux gastro-œsophagien (RGO) et de l’œsophagite par RGO
→ La prévention des lésions gastroduodénales dues à l’utilisation de traitement
par anti-inflammatoires non stéroïdien (AINS) chez les patients à risque. Pour
être concerné les sujets impliqués doivent remplir un ou plusieurs critères
suivants : être âgés de plus de 65 ans, avoir eu des antécédents d’ulcère, ou
être traités par antiagrégant plaquettaire, anticoagulants oraux ou corticoïde
→ L’éradication d’Helicobacter Pylori (HP) et le traitement de l’ulcère gastro-
duodénales (UGD)
1) Physiopathologie
Le RGO peut être « physiologique », c’est-à-dire qu’il ne donne pas lieu à des
complications. Il s’agit d’un trouble non récurent, n’entraînant pas de complications et
peu douloureux. On estime qu’au moins 20% des adultes ont épisodiquement ce type
de RGO18.
18
En revanche, le RGO peut également être plus fréquent, durer dans le temps et
engendrer une altération de la qualité de vie et certaines complications telles que des
œsophagites ou des sténoses peptiques pouvant exposer à un risque de cancer ou
moins fréquemment à une hémorragie digestive20.
19
Figure 6 - Reflux gastro-œsophagien 22
2) Traitement :
Les IPP ne seront pas utilisés en première intention si les symptômes sont peu
fréquents (moins d’une fois par semaine). On utilisera pour pallier à ces troubles un
traitement d’action rapide à savoir des antiacides, des alginates ou des anti-H2
(cimétidine, ranitidine, famotidine)20
20
Dans le cas du traitement de l’œsophagite par RGO, tous les IPP vont être utilisés à
pleine dose pendant 4 à 8 semaines. Si le trouble est léger, on peut avoir recours à
une demi-dose de pantoprazole. Tandis que s’il est sévère et résistant, on peut passer
à une double dose d’oméprazole entre la 4e et la 8e semaine de traitement.
En prévention, ou dans le cas où l’œsophagite par RGO venait à récidiver, les IPP
peuvent être utilisés sur du long terme à demi ou pleine dose. Tout en sachant que,
l’ésoméprazole sera toujours prescrit à demi-dose et le pantoprazole à pleine dose.
En ce qui concerne les autres spécialités, on recherchera la dose efficace la plus
faible1.
1) Physiopathologie
21
La sécrétion de mucus et de bicarbonate est stimulée par les prostaglandines se
trouvant en concentration importante au sein de la muqueuse et du suc gastrique 25.
Effectivement ces dernières possèdent un rôle important dans la défense des
muqueuses du tractus gastro-intestinal. Leur effet vasodilatateur et pro-agrégant
simplifie la reconstitution en cas de dommages épithéliaux en formant un capuchon
mucoïde, en plus de limiter la libération de médiateurs de l’inflammation 26. De plus, il
leur est possible de diminuer la perméabilité de l’épithélium et ainsi empêcher la
diffusion d’acide. Enfin, elles peuvent bloquer l’augmentation d’histamine et donc
réguler la sécrétion d’acide gastrique25,26.
Leur biosynthèse se fait par catalyse de l’acide arachidonique (métabolisé à partir des
phospholipides membranaires) via l’enzyme cyclo-oxygénase (COX)27 retrouvée sous
2 isoformes : COX-1 et COX-2. Les prostaglandines responsables du maintien de la
muqueuse sont conçues par COX-1, elles portent le nom de prostaglandine E2. Les
prostaglandines impliquées lors du processus inflammatoire sont quant à elles
produites par COX-2. Les deux isoformes ont un rôle à jouer dans la synthèse des
prostaglandines rénales responsables du maintien de la perfusion glomérulaire28.
22
Lorsque l’on a recourt aux anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ou à l’aspirine,
l’activité des COX va être inhibée, ce qui conduit à une diminution des prostaglandines
et donc un risque d’effets ulcérogènes par diminution de la sécrétion de mucus et de
bicarbonate. Outre cet effet systémique, les AINS sont également responsables de
dommages topiques26. Effectivement, ces médicaments peuvent entrainer la mort des
cellules épithéliales (cf annexe 4).
2) Traitement :
Pour contrecarrer les effets néfastes des AINS et de l’aspirine, l’utilisation d’IPP
pendant la durée du traitement peut être recommandée en prévention1. Cependant,
ce traitement préventif ne concerne que les patients potentiellement à risque que sont :
→ Les personnes âgées de plus de 65 ans,
→ Les patients sous traitement anti-agrégant plaquettaire, anticoagulant ou
corticoïde,
→ Les patients ayant eu des antécédents d’ulcère gastro-duodénale
23
C) Ulcère gastrique et duodénal :
1) Physiopathologie :
Cette bactérie gram négative contractée pendant l’enfance est présente chez plus de
90% des malades et serait responsable de 95% des ulcères duodénaux, 70% des
ulcères gastriques30, mais aurait également un rôle dans la contraction de cancer de
l’estomac.
24
La recherche de cette bactérie peut être indiquée dans les cas de figures suivants 31 :
− avant la prise d’AINS ou d’aspirine en cas d’antécédent d’UGD ou d’ulcère
perforé33. Cette indication est difficilement mise en œuvre par les
gastroentérologues
− lors d’anémie ferriprive sans étiologie retrouvée ou en cas d’absence de réponse
à une supplémentation par fer per os
− lors de carence en vitamine B12 sans étiologie
− lors de la présence de facteur de risque de cancer gastrique
− lorsqu’une opération bariatrique est envisagée
Avant la mise en place d’un traitement visant l’éradication d’H.Pylori, sa présence doit
être recherchée. D’autant plus que ces dernières années on constate une
recrudescence de résistance aux antibiotiques, notamment à la clarithromycine 32.
L’observance du traitement jusqu’à la fin est souvent mise en cause dans cette
résistance.
L’adhésion et l’implication du patient à son traitement est donc primordiale afin d’éviter
un échec thérapeutique33.
25
Figure 6 – Schéma thérapeutique du traitement contre l’Helicobacter pylori 34
26
2) Traitements :
i) Traitement guidé :
Si aucune gastroscopie n’est pratiquée un test respiratoire à l’urée marquée peut être
utilisé avant l’initiation du traitement, ainsi que pour contrôler l’éradication de la
bactérie. Il n’est cependant remboursé que pour le contrôle en fin de traitement. La
recherche d’antigène dans les selles peut être possible, mais elle n’est pas
remboursée également. .
Chacune de ces méthodes, ne permet pas de réaliser un antibiogramme afin de
connaître la sensibilité de la bactérie aux antibiotiques. Le traitement est donc dit
« probabiliste ».
27
Il existe deux types de quadrithérapies. En cas d’antécédents allergique à l’amoxicilline
ou s’il y a une prise antérieure de macrolide, la quadrithérapie « avec
bismuth » d’une durée de 10 jours sera instaurée. Elle comprend de l’oméprazole,
des sels de bismuth, de la tétracycline et du métronidazole. La deuxième
quadrithérapie possible est dite « concomitante ». Cette dernière est plus longue,
puisqu’elle dure 14 jours. On y trouve un IPP associé à de l’amoxicilline, de la
clarithromycine et du métronidazole. En cas d’échec à ces 2 lignes de traitement, une
gastroscopie avec biopsie devra être réalisée.
Chez les patients adultes avec une fonction rénale normale les IPP seront administrés
au cours du repas le matin et le soir, en demi dose pour l’ésoméprazole, le rabéprazole
et l’oméprazole, et en pleine dose pour le lansoprazole et le pantoprazole.
b) Autres :
Dans le cas d’ulcère gastrique ou duodénal n’étant pas dû à une infection à H. Pylori
les IPP seront utilisés seuls1. L’ésoméprazole étant le seul à ne pas avoir l’indication.
L’ulcère gastrique sera traité à pleine dose pendant 4 à 8 semaines, pouvant aller
jusqu’à 4 à 6 semaines pour l’oméprazole et 6 à 12 semaines pour le rabéprazole
L’ulcère duodénal sera traité à pleine dose pendant 4 semaines. Cette durée peut être
réduite de 2 semaines dans le cas du lansoprazole si la cicatrisation est complète, et
peut aller jusqu’à 8 semaines pour le rabéprazole. Un traitement d’entretien au long
court par oméprazole à demi ou pleine dose est possible pour les patients atteints ou
non par H. Pylori (ou en cas d’impossibilité d’éradiquer la bactérie). Cette procédure
thérapeutique est mise en place après échec de traitement antihistaminique H2.
28
D) Autres :
L’utilisation des IPP peut également être indiquée dans deux autres cas dans une
moindre mesure :
− la dyspepsie fonctionnelle associée à un reflux gastro-œsophagien (RGO),
− le syndrome de Zollinger-Ellison.
Le traitement repose sur une prise en charge des symptômes et des mesures hygiéno-
diététiques. Les IPP sont indiqués uniquement dans le cas de reflux gastro-
œsophagien associé à une dyspepsie fonctionnelle.
29
2) Syndrome de Zollinger – Ellison
Le syndrome de Zollinger-Ellison (SZE) est défini par l’Orphanet comme une « maladie
peptique sévère (ulcère/maladie oesophagienne) due à une hypergastrinémie
secondaire à un gastrinome entrainant une hypersécrétion gastrique acide. »37 . Le
SZE est donc initialement dû à un gastrinome qui secrète de la gastrine responsable
d’hypergastrinémie. Cette tumeur localisée dans la majeure partie des cas au sein du
duodénum (50-85% des cas) mais pouvant également être présente au sein du
pancréas, des ganglions lymphatiques ou plus rarement au sein d’autres sites (foie,
cœur…), entraine des atteintes digestives de types douleur abdominale épigastrique,
des diarrhées, des nausées, des vomissements, des brulures d’estomac, et une perte
de poids. La maladie peut se déclarer sous la forme d’ulcère compliqué (hémorragie,
perforation)
Il s’agit d’une pathologie rare (incidence/an : 1-2 / 1 000 0000), dans la majorité des
cas sporadique et touchant préférentiellement les femmes et les seniors. Son
diagnostic est souvent posé dans la 5e décennie à partir du tableau clinique évoqué
ci-dessus. Un dosage sérique de la gastrine à jeun (GJ) sera réalisé et le SZE sera
confirmé dans le cas d’un pH inférieur à 2 ainsi que d’une GJ augmentée de 10 fois
par rapport à la normale. On recherchera par imagerie médicale la présence du
gastrinome, et par fibroscopie oeso-gastro-duodénale la présence d’ulcères
duodénaux.
30
IV. Précautions d’emploi, interactions médicamenteuses et effets
indésirables à court terme :
A) Précautions d’emploi :
31
− les inhibiteurs des tyrosines kinases (excepté l’imatinib et la vandétanib), pour
lesquels une diminution de l’absorption digestive peut amener à un risque d’échec
thérapeutique aux conséquences non négligeable chez des patients atteints de
cancer. La réévaluation du traitement par IPP est donc préconisée, et dans le cas
où ce dernier ne peut être arrêté, sa prise se fera dans les deux heures suivant la
prise d’inhibiteurs des tyrosines kinases.40
− le mycophénolate mofetil (CELLCEPT®) : les concentrations d’acide
mycophénolique seraient diminuées d’un tiers, donc il existe un risque de baisse
d’efficacité à prendre en compte lors de l’utilisation de ce médicament indiqué
dans le rejet de greffe.
− l’ulipristal (ELLAONE®) : la diminution de l’absorption entraine une diminution
de l’effet de ce contraceptif d’urgence.
Enfin, pour rappel les IPP sont métabolisés en partie par le CYP3A4. Leur efficacité
peut donc être vu à la baisse par augmentation de leur métabolisme lorsqu’ils sont
associés à des inducteurs du CYP3A4 tel que le millepertuis.
2) Association déconseillée :
Les traitements de certaines pathologies graves peuvent être impactés par la présence
d’IPP, ces derniers pouvant interagir au niveau de la pharmacocinétique de plusieurs
médicaments et donc entrainer une moindre efficacité des traitements.
On parle de « pharmacocinétique » lors de l’étude du devenir d’un médicament au sein
de l’organisme. En effet les substances médicamenteuses vont subir, après
l’administration, quatre grandes étapes souvent désignées sous l’acronyme
« ADME » :
− « A » pour l’absorption, soit le passage du principe actif dans la circulation
sanguine
− « D » pour la distribution dans la circulation générale ainsi que la diffusion
tissulaire
− « M » pour le métabolisme ou « biotransformation » que subit le médicament
afin d’en faciliter l’élimination par l’organisme sous forme de métabolites
principalement
− « E » désignant donc l’élimination
32
Les IPP peuvent mener à une diminution des concentrations plasmatiques, par défaut
d’absorption pour les molécules suivantes :
− l’Atazanavir (REYATAZ®) un anti-rétroviral contre le virus d’immunodéficience
humaine (VIH),
− le Velpatasvir (associé au Sofosbuvir dans la spécialité EPCLUSA®) un
inhibiteur du virus de l’hépatite C. Si l’association à un IPP est requise,
l’administration d’EPCLUSA se fera au cours du repas ou à distance de 4 heures
avec l’IPP et à la dose la plus faible possible.
− Le posaconazole sous la forme de suspension buvable uniquement. Ce dernier
étant un antimycosique azolé actif contre un grand nombre de micro-
organismes.
3) Contre-indication :
La seule contre-indication émise par l’ANSM se fait avec la Rilpivirine contenue dans
les médicaments EDURANT® et EVIPLERA® (en association). Ces derniers sont
indiqués dans le VIH. L’association aux IPP entraine une diminution de l’absorption et
donc peut conduire à un échec thérapeutique non envisageable dans ce type de
maladie.
33
C) Effets indésirables (EI) à court terme :
Les IPP sont généralement bien tolérés et à court terme les effets indésirables sont
peu nombreux, transitoires et souvent sans conséquences graves. Ils apparaissent
dans les jours qui suivent l’initiation du traitement. Ils sont souvent d’ordre digestif tel
que des flatulences ou des nausées et vomissements, et on trouvera dans des cas
plus rares de la diarrhée ou des douleurs abdominales. Outre ces troubles digestifs,
les IPP peuvent entrainer des sensations vertigineuses ou des céphalées.
Le traitement par IPP peut être arrêté en cas d’apparition de réactions cutanées
allergiques, quoi que d’apparition très rare. Il peut s’agir d’urticaires, de rash cutanés,
d’éruptions (bulleuse, lichénoïde ou polymorphe)
34
PARTIE II : Particularités des « personnes âgées »
Les projections de l’INSEE ainsi que de l’OMS, montrent un nombre croissant dans
les années à venir de personnes âgées. A titre d’exemple au court de cette année
2020, le nombre d’enfant de moins de 5 ans devrait être dépassé par le nombre de
personnes âgées de plus de 60 ans au niveau mondial selon l’OMS 44. Outre cette
croissance démographique, l’espérance de vie est également en constante évolution.
Elle était en 2018 de l’ordre de 84,8 ans pour les femmes et de 78,4 ans pour les
hommes en France.
D’une façon générale le vieillissement s’accompagne d’un déclin progressif des
capacités corporelle et cérébrale, associé à un risque majoré de survenue de maladie
ainsi que de décès. Néanmoins ces changements liés à l’âge ne sont pas équivalents
chez tous les individus. Ainsi plusieurs facteurs associés ont leur importance, et ce
notamment d’un point de vue social, économique, environnemental, mais également
médicamenteux.
On désignera sous le terme de « iatrogénie » l’ensemble des effets indésirables
imputables à la prise médicamenteuse. Le risque iatrogénique étant souvent évoqué
chez les patients âgés pour la plupart polypathologiques et donc polymédicamentés.
Effectivement, on estime que les personnes âgées entre 65 et 74 ans prennent chaque
mois en moyenne 3,3 médicaments. Ce chiffre évolue à 4,6 médicaments par mois
chez les patients âgées de plus de 85 ans45.
A) Modifications physiologiques :
36
2) Système respiratoire
a) Voies respiratoires inférieures (VAI)
Les poumons ont une fonction particulière, ils sont à la fois responsables d’échanges
gazeux alvéolaires, mais également d’un apport d’oxygène au sang. Ces derniers ont
une certaine plasticité, leurs permettant de réguler la ventilation, ainsi que les apports
en oxygène, en fonction des besoins de l’organisme (ex : effort type activité sportive).
C’est au sein de son parenchyme élastique, et notamment de ses alvéoles, que
s’effectue l’échange gazeux avec les érythrocytes contenant l’hémoglobine.
Cet organe se développe tout au long de la vie et parvient à son état fonctionnel
maximal vers l’âge de 30 ans, puis il va progressivement fléchir avec l’âge. Ce déclin
s’observe à plusieurs niveaux. 55
37
b) Voies aériennes supérieures (VAS) :
Les voies aériennes supérieures (VAS), constituées par le nez, la bouche, le larynx
ainsi que le pharynx, forment un conduit entouré de muscles destinés à ramener l’air
aux poumons58. Avec l’âge il existe une perte de soutien de certains de ces muscles,
dont le muscle pharyngé, pouvant mener à terme à une obstruction des VAS55. En
effet, ce mécanisme s’ajoute à la perte de tonus des VAI ainsi qu’à la diminution des
mécanismes de toux et de déglutition au cours du vieillissement.
3) Système rénal :
Les résultats obtenus du DFG permettent d’apprécier les stades de la maladie rénale
(cf tableau ci-après)
L’équation de Cockroft et Gault peut également être utilisée pour estimer la clairance
de la créatinine (mL/min)
38
En présence de marqueurs d’atteinte rénale ou de baisse du DFG inférieur à 60
mL/min/1,73m² pendant plus de 3 mois on parlera d’insuffisance rénale chronique
(IRC), autrement, si l’atteinte rénale est ponctuelle on parle d’insuffisance rénale aigue
(IRA). On estime qu’entre 40 et 80 ans le DFG s’amenuise de 0,8 ml/min/1,73m² par
année60, de telle sorte qu’en France on fait état de 2 personnes âgées sur 3 de plus
de 70 ans avec une clairance, estimée par Cockroft et Gault, comprise entre 30 et 60
ml/min61.
Plusieurs causes sont responsables du déclin rénal60,62. Tout d’abord on trouve des
origines génétiques et environnementales majorées par le risque iatrogène (ex :
AINS, inhibiteur de l’enzyme de conversion, antagonistes des récepteurs de
l’angiotensine 2, diurétiques, produits de contraste iodés) et par certaines comorbidités
telles que le diabète et/ou l’hypertension artérielle63. Ensuite on constate avec l’âge
une diminution du débit sanguin rénal pouvant être associée à des modifications
vasculaires. Effectivement, le flux rénal tend à diminuer de façon proportionnelle à
l’âge (10% par décennie à partir de 40 ans) raison d’un déséquilibre entre les éléments
vasodilatateurs tels que le monoxyde d’azote et vasoconstricteurs que sont le système
sympathique et la sécrétion d’angiotensine 2. Cette modification hémodynamique
s’associe à une dégradation glomérulaire entrainant une chute du DFG. Enfin on
observe également une altération fonctionnelle des tubules60,64 responsable d’une
diminution de concentration des urines par atteinte des mouvements électrolytiques et
de transport d’ions au niveau de l’épithélium tubulaire, ce qui aura pour conséquence
d’affecter l’homéostasie électrolytique.
39
4) Système cardio-vasculaire (CV) :
40
Changements cellulaires :
Un remodelage cellulaire va s’opérer au niveau cardiaque. On constate une perte en
nombre et une diminution de la taille des cardiomyocytes, une modification des fibres
de collagène ainsi qu’une augmentation de fibroblastes cardiaques entrainant une
fibrose pariétale. Cette dernière s’accentue lors de l’adaptation cardiaque à une
agression (infarctus du myocarde, hypertension artérielle, ischémie).
Changement moléculaire :
La fonction cardiaque nécessite une grande quantité d’énergie, possible grâce à la
présence de mitochondries au niveau du myocarde. Ces dernières sont
responsables de la production d’ATP, mais leur quantité diminue avec l’âge.
L’altération du matériel cytoplasmique des cardiomyocytes provoque une dégradation
des capacités de contraction et de relaxation des fibres myocardiques.
Changements structuraux :
Ces modifications vont affecter à la fois le cœur mais également les vaisseaux. On
observe une rigidité vasculaire associée à une augmentation de l’épaisseur de la
paroi du ventricule gauche ainsi qu’une hypertrophie de l’oreillette droite.
Changements fonctionnels :
L’ensemble des altérations qui affectent le cœur vont engendrer des modifications de
ses propriétés mécaniques pouvant donner lieu à des pathologies communes chez les
sujets âgés (ex : fibrillation auriculaire, insuffisance cardiaque…) et notamment
l’hypertension artérielle (HTA). Il s’agit d’une affection liée à l’augmentation de la
tension artérielle systolique au vu de la perte d’élasticité des parois artérielles. Elle
touche 65% des plus de 65 ans67, et constitue la première pathologie chronique de
France. Les complications communes de l’HTA sont l’accident vasculaire cérébral
(AVC), les cardiopathies ischémiques (angine de poitrine, infarctus du myocarde,
l’artériopathie des membres inférieurs) et l’insuffisance rénale chronique.
En outre, chez le sujet âgé, la capacité d’adaptation à l’effort diminue avec le temps
de manière inexorable. Cependant tous les êtres humains ne sont pas égaux quant à
cette régression. Celle-ci dépend de plusieurs facteurs de risque environnementaux
(ex : sédentarité, alimentation non-équilibrée, tabac) et pathologiques. Une activité
physique régulière permet de diminuer les manifestations dues au vieillissement
cardiovasculaire.
41
5) Système nerveux :
Enfin, l’un des moyens de protection du système nerveux central qu’est la barrière
hémato-encéphalique tend à devenir plus perméable. Cette dernière joue un rôle
dans les échanges entre le sang et le compartiment cérébral. L’augmentation de la
perméabilité se traduit par une dérégulation de l’homéostasie cérébrale et une
augmentation de la réponse inflammatoire notamment en cas d’administration de
xénobiotiques.
42
6) Système locomoteur :
Chaque année en France 9300 75 décès de personnes âgées de plus de 65 ans sont
attribuables à une chute. Il s’agit de la deuxième cause de décès accidentels ou
involontaires dans le monde76. L’âge étant un facteur de risque non négligeable de
survenue de chute et notamment de complications en découlant. En effet, le
vieillissement se caractérise non seulement par une perte osseuse77 mais également
par une sarcopénie musculaire, souvent majorée par un mode de vie sédentaire et une
alimentation mal équilibrée.
Les douleurs articulaires souvent énoncées par les patients gériatriques, peuvent être
la conséquence d’une atteinte osseuse et/ou cartilagineuse.
Une perte de volume et de masse osseuse vont être à l’origine du tassement des
disques vertébraux, de l’augmentation de risque de fracture (poignet, hanches…) mais
également d’ostéoporose. Une ostéodensitométrie permet de mettre en avant une
diminution de la densité minérale osseuse (DMO). Celle-ci étant sous l’influence des
hormones, androgènes pour les hommes et œstrogènes pour les femmes. Le risque
de survenue d’ostéoporose est plus important chez les femmes. Pour cause une chute
d’hormone plus importante fait suite à la ménopause survenant aux alentours de 50
ans. Cette perte osseuse peut être majorée par des carences vitaminiques et
principalement la vitamine D.
Le cartilage articulaire n’en n’est pas moins touché par l’âge. Ce dernier à une
organisation matricielle variable en fonction des régions articulaires. Une modification
de la composition des glycosaminoglycanes ainsi qu’une baisse des chondrocytes qui
les constituent, conduisent à une altération de ses propriétés mécaniques et donc à
une fragilité articulaire. Il n’existe aucune régénération cartilagineuse. Lorsque
l’épaisseur du cartilage synoviale est touchée, le risque d’arthrose est plus important.
43
B) Impact pharmacocinétique dû au vieillissement :
1) Absorption :
2) Distribution :
Une fois que le principe actif a gagné la circulation systémique, il va devoir être
distribué de façon libre ou en se liant aux protéines plasmatiques (tel que l’albumine)
afin de rejoindre son site d’action. Le volume de distribution (Vd) représente le
volume dans lequel se distribue le médicament. Il varie selon plusieurs facteurs,
notamment la composition des compartiments tissulaires mais également la fixation
aux protéines plasmatiques.
44
Les protéines auxquelles se lient les médicaments sont nombreuses et de différentes
natures (ex : albumine, α β gamma globulines, lipoproteines…). Toutes vont fixer
préférentiellement les substances acides ou basiques.
Une diminution des protéines plasmatique tend à augmenter la fraction libre. Cette
dernière correspond à la forme pharmacologiquement active de médicament. Une
concentration plus importante de fraction libre conduit à une augmentation du Vd, ce
qui a pour conséquence d’augmenter les effets thérapeutiques voir toxiques des
principes actifs. Les molécules lipophiles (ex : digoxine, antidépresseurs tricyclique,
amiodarone) sont principalement concernées, dues à leur facilité à traverser les
membranes biologiques. Les molécules hydrophiles ayant tendance à rester dans les
compartiments liquidiens et sanguins.
3) Métabolisation :
La majeure partie des médicaments vont être métabolisés au niveau du foie 79. Le
métabolisme hépatique comprend deux phases distinctes :
→ La phase I (fonctionnalisation) : elle conduit fréquemment à la perte d’activité
pharmacologique, mais peut aussi la maintenir ou créer une activité dans le cas
des prodrogues. Elle correspond à une phase de réactions d’hydrolyse, de
réduction ou d’oxydation (souvent dépendantes du CYP450).
→ La phase II (conjugaison) : au cours de cette phase une fonction polaire va être
greffée au métabolite afin de le rendre plus soluble et donc d’en faciliter son
excrétion rénale
45
Les répercussions pharmacocinétiques vont être une augmentation de la
biodisponibilité de certains médicaments pouvant engendrer un risque de toxicité
accru. Cette conséquence est d’autant plus importante pour les médicaments qui
subissent un premier passage hépatique. En effet ces derniers vont connaitre, avant
d’être distribués, une transformation hépatique visant à les rendre en partie inactif.
4) Elimination :
Une fois métabolisé, le métabolite rejoint la bile, la circulation systémique et enfin les
reins. Ce dernier peut avoir des propriétés pharmacologiques semblables à celles de
la molécule mère et donc entrainer des risques de toxicité s’il reste accumulé au niveau
rénal. Pour éviter ces risques, une attention toute particulière devra être portée à
l’adaptation posologique des médicaments en fonction du DFG. En effet comme
évoqué dans le point I.A.3 de cette partie, le DFG diminue avec l’âge. Ce qui a pour
conséquence d’affecter notamment la pharmacocinétique des médicaments éliminés
par voie rénale et plus particulièrement les médicaments hydrosolubles, notamment
en allongeant leur temps de demi-vie.
La fonction rénale doit d’autant plus être contrôlée qu’il existe des comorbidités
inhérentes à l’âge, telles que l’HTA, le diabète, l’insuffisance cardiaque mais
également la polymédication.
46
II. Le risque iatrogénique :
En 1998 le haut conseil de santé publique (HCSP) définit comme iatrogène : « les
conséquences indésirables ou négatives sur l'état de santé individuel ou collectif de
tout acte ou mesure pratiqués ou prescrits par un professionnel habilité et qui vise à
préserver, améliorer ou rétablir la santé »80.
On estime en France que 10 à 20% des cas d’admissions à l’hôpital sont attribuables
à la iatrogénie médicamenteuse45,81. De plus, le nombre de décès hospitaliers
iatrogéniques est compris entre 2 et 12%82. Ces cas sont d’autant plus importants
passé 65 ans et constituent aujourd’hui un véritable enjeu de santé publique.
Ces cas iatrogéniques sont dans la majeur partie des cas prévisibles et évitables et
peuvent être dûs à : une erreur thérapeutique (indication ou contre-indication non
respectée, posologie élevée ou traitement prolongé sans raison), une mauvaise
observance ou une automédication non recommandée.
La iatrogénie se reflète sous plusieurs formes : l’hypotension, les chutes, les accidents
hémorragiques, les syndromes anticholinergiques, les hypoglycémies, l’allergie, les
troubles cutanées, digestifs….
47
Figure 10 - Interactions patient âgé et pharmacothérapie 84
Compte tenu des particularités inhérentes aux personnes âgées, les professionnels
de santé doivent avoir un « reflexe iatrogénique » devant tout symptômes ou
altération de l’état de santé d’une personne âgée, mais également de faire
régulièrement un bilan du traitement afin d’évaluer le ratio bénéfice/risque de certains
médicaments.
48
PARTIE III : Les effets indésirables des IPP au long terme :
L’impact du microbiote sur la santé a au court de ces dernières années fait l’objet d’un
grand nombre d’études. Ces études ont permis de mettre en lumière l’importance du
microbiote sur le maintien de la santé mais également sur le développement de
pathologies en cas d’atteinte de sa biodiversité.
Le microbiote est comme une empreinte digitale, chaque individu possède sa propre
flore. En effet, il se développe dès les premiers moments de la vie, lors de
l’accouchement par voie basse au contact de la flore vaginale ou au contact des
microorganismes de l’environnement si l’accouchement se déroule par césarienne. La
maturation d’un point de vue quantitatif et qualitatif évolue avec l’âge avec comme
facteurs de variation la diversification alimentaire (allaitement), la génétique, l’hygiène,
les traitements médicamenteux (antibiotiques), l’environnement…
49
L’utilisation d’IPP serait à l’origine d’une altération de l’homéostasie du microbiote. En
effet, il existerait une différence de la flore à la suite de la prise d’IPP sur du long terme.
On constate une diminution des bactéroidetes et une augmentation des firmicutes
(dont le genre clostridium). Cette différence de composition bactérienne pourrait
expliquer l’émergence d’infections à Clostridium difficile chez les patients sous IPP. 86
− soit l‘action des IPP sur l’acidité gastrique, entrainerait une diminution de la
résistance envers les spores de Clostridium difficile, et donc la propagation de
la bactérie
− soit les IPP impacteraient la diversité de la flore bactérienne présente
naturellement au sein du tractus gastro-intestinal. Ce qui entrainerait une
diversité en nutriment (notamment en acides aminés) plus importante pouvant
être utilisé par la bactérie Clostridium difficile pour son développement.
On estime que 69% des personnes âgées possèdent au sein de leur microbiote des
souches de Clostridium difficile non pathogènes. Cette classe de la population est plus
vulnérable aux infections mais également aux récidives, et ce notamment en cas de
passage en milieu hospitalier fréquent et prolongé ou en cas de traitement antibiotique.
Il s’agit d’une infection potentiellement mortelle se manifestant sous forme de
diarrhées souvent persistantes et difficiles à traiter 89.
50
II. Complications pulmonaires :
L’incidence de cette pathologie, de même que le taux de mortalité associé, est d’autant
plus élevée chez les sujets âgés que chez le sujet jeune91.
Figure 11 – Pneumonie 92
Depuis la fin des années 90-2000, on constate une quantité importante de parution
d’articles scientifiques évoquant une relation entre la prise d’IPP et l’émergence de
pneumonies communautaires aigues (PCA)87. Il s’agit d’une pneumonie aigue des
voies respiratoires basses se développant en dehors du contexte hospitalier ou dans
les 48 heures suivant l’hospitalisation. Son incidence est d’autant plus importante chez
les sujets âgés résidants en institutions. Dans 60 à 80% des cas, l’origine est
bactérienne et l’agent mis en cause est S. pneumoniae ou pneumocoque93.
51
Le diagnostic clinique de la PCA repose sur des signes respiratoires (douleur
thoracique, toux, dyspnée) et généraux (fièvre, frissons, myalgies) ainsi que sur la
présence de râles et de crépitants à l’auscultation 94. Toutefois chez les personnes
âgées ce diagnostic est plus difficilement établi que chez le sujet jeune car les signes
respiratoires sont moins marqués et on constate l’absence possible de certains
symptômes (fièvre, frissons, douleur pleurale).
Une étude comparative IPP vs AH2 menée en milieu hospitalier sur une cohorte de
35 000 patients sous ventilation mécanique a montré une incidence plus importante
du risque de pneumonie chez les patients traités sous IPP que sous AH2 96. D’autres
études semblent confirmer l’influence qu’ont les IPP sur la survenue de pneumonie97.
52
III. Complications rénales :
La fonction rénale chez la population gériatrique doit faire l’objet d’une attention toute
particulière, compte tenu du vieillissement physiologique des reins, mais également
des comorbidités qui affectent cette population (HTA, diabète) et qui ont une
conséquence dommageable et irréversible sur les reins.
Certains médicaments sont potentiellement agressifs pour les reins. Ils peuvent par
leur administration entrainer des altérations rénales, et ce d’autant plus chez les sujets
à risque dont la fonction rénale est déjà atteinte. Ces agents nocifs devraient donc
faire l’objet d’une évaluation lors de leur utilisation afin de savoir s’ils apportent un
bénéfice significatif ou non. Les IPP, quoi que considérés sans risque sur la fonction
rénale, ont montré au décours de plusieurs études internationales un risque
d’altération de la fonction rénale.
Si l’implication des IPP dans la NIA et l’IRA est connue, le rôle qu’ils peuvent avoir
dans l’apparition d’IRC n’est documenté que depuis quelques années. Notamment
depuis la parution en février 2016 dans le JAMA Internal Medecine d’une grande étude
épidémiologique visant à évaluer la relation entre l’administration d’IPP et la survenue
de pathologie rénale et notamment d’IRC105.
53
Cette dernière portait sur 2 cohortes observationnelles de 6 et 14 ans qui sont
composées respectivement de 10 500 et 250 000 participants. Les résultats attestent
la majoration du risque d’IRC sous IPP de 20 à 50% pouvant être accentuée s’il y a
plusieurs prises dans la journée. En outre ce risque est caractéristique des IPP,
puisqu’il n’a pas été retrouvé lors de l’administration d’AH2.
En pratique, l’évaluation de la fonction rénale avant l’initiation d’un traitement par IPP,
ainsi qu’un avis néphrologique en cas de suspicion de NIA doit avoir lieu.
54
IV. Démences :
La démence touche 50 millions de personnes dans le monde selon l’OMS, avec près
de 10 millions de nouveaux cas par an dans le monde. Elle représente un coût
considérable pour la société (818 milliards d’euros en 2015), mais également un
impact (physique, émotionnel et financier) pour les aidants et les familles des
personnes atteintes. En effet ce syndrome correspond à une des principales causes
de dépendance et de handicap chez le sujet âgé, dont les symptômes sont
particulièrement éprouvants 109 :
− Difficultés à accomplir les tâches quotidiennes
− Désorientation dans les environnements familiers
− Difficultés à utiliser les mots et les chiffres
− Pertes de mémoire
− Sautes d’humeur, modifications du comportement
On dénombre plusieurs types de démence, dont la maladie d’Alzheimer dans 60 à
70% des cas, les démences vasculaires, les démences à corps de Lewy et les
démences mixtes. Il s’agit de pathologies évolutives et qui tendent à se dégrader avec
le temps.
Des études sur des modèles murins ont émis l’hypothèse que les IPP interfèreraient
avec l’activité enzymatique neuronale provoquant ainsi l’accumulation de peptides
Aβ110. Le mécanisme postulé serait que les IPP traverseraient la BHE, rendue plus
perméable par l’âge, inhiberaient les pompes à protons des cellules microgliales
cérébrales conduisant à l’augmentation du pH lysosomial et donc à la réduction de
l’action des protéases lysosomiales. Ces dernières fonctionnent en milieu acide et sont
responsable en temps normal de la digestion des peptides Aβ 111 (cf figure ci-après).
55
Figure 13 - Mécanisme hypothétique des IPP conduisant à l'augmentation des
peptides AB
Le risque de démence associé à la prise d’IPP au long court est moins étudié que les
autres effets indésirables. Pour le moment, deux études épidémiologistes allemandes
de cohorte rétrospectives se distinguent :
➢ La première concernait un peu plus de 3000 patients de plus de 75 ans sous
IPP de façon prolongée. Le risque de démence était 38% plus important que
chez les patients non exposés aux IPP. Ce dernier restait important même
après ajustement des facteurs de confusion (âge, sexe, éducation,
polymédicamentation et comorbidités)112
➢ La seconde fut réalisée à plus grande échelle (N= 73679), entre 2004 et 2011,
à partir d’une banque de données médicales allemandes. Elle confirme le risque
de développer une démence sous IPP de plus de 44% par rapport au groupe
témoin.113
56
V. Malabsorption et complication métabolique :
A) Magnésium
Une hypomagnésémie (< 0,75 mmol/L) peut se répercuter sous différents signes et
symptômes (cf Annexe 5) et est souvent associée à d’autres désordres électrolytiques
tels que l’hypokaliémie et l’hypocalcémie. Cependant, ce déficit en magnésium passe
souvent inaperçu car souvent sous-diagnostiqué en pratique courante. Il peut en cas
de chronicité augmenter le risque de maladies cardiovasculaires, de diabète ou
d’ostéoporose115.
Une revue de méta-analyse parue en 2019 permet la synthèse des études antérieures
concernant le risque d’hypomagnésémie associé à l’utilisation des IPP116. Elle révèle
une hétérogénéité des résultats entre les études, ne permettant pas de tirer une
conclusion. Toutefois n’est pas permis d’éliminer complétement le risque
d’hypomagnésémie dû à l’utilisation d’IPP. Ces derniers devront donc être utilisé avec
vigilance et ce d’autant plus s’ils sont utilisés en association avec d’autre médicaments
pouvant induire une perte de magnésium. (Ex : diurétique thiazidiques, diurétiques de
l’anse de Henlé, aminoglycosides…)
57
B) Vitamine B12
La vitamine B12 (vit B12) ou cobalamine, est une vitamine hydrosoluble stockée
essentiellement au niveau hépatique. Cette réserve (2 à 3 mg) est suffisante pour
quelques années mais nécessite un apport journalier faible de l’ordre de 3 µg pour un
adulte. On retrouve cette vitamine dans les aliments d’origine animale (œufs, viandes,
poissons, fromages et laitages).
Cette vitamine est naturellement liée à des protéines et s’en retrouve dissociée dans
le tractus gastro-intestinal grâce à l’acidité gastrique et à l’intervention de la pepsine.
Une fois libre, elle se fixe au facteur intrinsèque afin d’être absorbée par l’iléon distal
par le biais de récepteurs spécifiques117. Elle va permettre d’assurer un bon
fonctionnement neurologique et va intervenir également dans la synthèse de l’ADN et
la formation des globules rouges 118.
L’effet des IPP sur les carences en vit B12 serait lié à un défaut de dissociation entre
les protéines porteuses et la vit B12 causé par la diminution de la sécrétion gastrique.
D’autre part, l’augmentation du pH gastrique favoriserait la prolifération bactérienne
responsable du catabolisme de la vitamine B12 et donc de son amenuisement sérique.
De plus, le sujet gériatrique est à risque de carence de par le vieillissement
physiologique favorisant l’augmentation du pH gastrique. 97
58
VI. Risque de fracture osseuse
Outre l’impact possible des IPP sur l’absorption de la vitamine B12 et sur le
magnésium, cette classe médicamenteuse semble également diminuer l’absorption
entérale du calcium lorsqu’il est contenu dans des aliments complexes tels que le lait
ou le fromage110. Ce sel minéral possède un rôle primordial dans le maintien du capital
osseux (99%) et dans une plus faible mesure dans le bon fonctionnement de
l’organisme (1% : conduction nerveuse, contraction musculaire…)119.
Il est primordial de maintenir une quantité suffisante d’apport calcique, peu importe
l’âge. Toutefois à partir de 30 ans une perte osseuse physiologique commence à se
mettre en place. Cette dernière s’accentue vers 50 ans chez la femme et 60 ans chez
l’homme. Partant de ce principe, une consommation suffisante de calcium (950 mg
par jour) sera donc essentielle au maintien de la masse osseuse, et ce d’autant plus
chez le sujet gériatrique plus à risque de fractures osseuses et d’ostéoporose.
Le maintien de la solidité du tissu osseux est assuré par un remodelage constant entre
les ostéoclastes qui résorbe l’os et les ostéoblastes qui forment l’os. Cet équilibre est
régulé par la vitamine D, ainsi que par les hormones sexuelles (androgènes et
œstrogènes). Avec l’âge ces hormones ont tendance à diminuer, de façon plus
précoce et importante chez la femme que chez l’homme dû à la ménopause, ce qui
entraine une perte de résistance et de masse osseuse. Si chez certaines personnes,
cette déplétion est sans conséquences, elle peut devenir pathologique chez d’autres
et mener à l’ostéoporose ou à des fractures.
En France on estime que 39% des femmes de plus de 65 ans souffrent d’ostéoporose.
Ce chiffre croit avec l’âge pour atteindre 70% chez celles âgées de plus de 80 ans.
L’une des majeures complications de cette pathologie est le risque de fractures
(vertébrales, poignet, du col du fémur) en cas de chutes. Ces dernières sont favorisées
par plusieurs facteurs de risque retrouvé communément chez le sujet âgé : la
sédentarité, la baisse de l’acuité visuelle, les troubles orthopédiques, les maladies
neuromusculaires et neuropsychiques...
59
L’effet des IPP sur le risque de fracture ostéoporotique a fait l’objet d’un grand nombre
d’études avec des résultats contradictoires97,98. Le mécanisme invoqué actuellement
serait que l’utilisation des IPP à long terme entrainerait une hyperparathyroïdie due à
l’hypergastrinémie, associée à une malabsorption de minéraux (Calcium et VitB12)
due à l’hypochlorhydrie120,121 (annexe 6). Les IPP auraient également une action
directe sur les cellules osseuse et notamment sur les pompes à protons
ostéoclastiques, cependant il s’agit pour l’heure d’études encore expérimentales122.
60
Suite aux grands nombres d’études mettant en avant l’augmentation du risque osseux
associé à l’utilisation des IPP, la Food and Drug Administration (FDA) a décidé de
lancer une alerte en mai 2010123. Cet avertissement ne concernant pas les
médicaments « Over The Counter » (OTC) en raison de la faible quantité de preuve
sur le court terme. La FDA préconise donc d’utiliser la dose la plus faible d’IPP pendant
la durée le plus court possible.
61
PARTIE IV : Etude réalisée au Centre Hospitalier de Compiègne-
Noyon (CHCN)
Introduction :
I. Objectif :
Le choix des IPP reposait sur les IPP disponibles au livret à l’hôpital de Compiègne-
Noyon, soit le LANSOPRAZOLE 30mg (pleine dose) et le LANSOPRAZOLE 15 mg
(demi-dose).
62
Afin d’avoir une population homogène, les critères d’inclusion étaient définis au
préalable. Pour se faire, l’ensemble des sujets devaient être âgés de plus de 65 ans,
être traités par IPP sans respecter les durées et/ou les indications recommandées par
la HAS. Les patients dont la mise en place de l’IPP était justifiée dans le DPI, ou qui
venait d’être institutionalisés ne faisaient pas partis de l’étude.
Pour chaque patient inclus, les critères utilisés afin d’évaluer la pertinence étaient les
suivants : l’indication pour laquelle l’IPP était prescrit, la posologie, ainsi que la durée
de traitement. Parallèlement, était recherchée la présence de certains effets
secondaires pouvant être associés à la prise d’IPP : l’insuffisance rénale, la démence
et l’ostéoporose (et risque de fracture associée).
L’indication ainsi que la durée de traitement sont dites respectées, dans le cas où elles
suivent les recommandations émises par la HAS1 :
− Reflux gastro-oesophagien sans œsophagite (2 à 6 semaines)
− Cicatrisation de l’œsophagite par RGO (4 à 8 semaines)
− Prévention de récidives d’œsophagite par RGO (au long cours)
− Prévention des lésions gastro-duodénales (GD) dues aux AINS (jusqu’à la fin
du traitement)
− Traitement des lésions GD dues aux AINS (4 à 8 semaines)
− Eradication d’Helicobacter Pylori
− Syndrome de Zollinger-Ellison
Le choix de ces évènements indésirables potentiels s’est fait compte tenue des
dernières études internationales, mais également car il s’agit de pathologie qui, quand
elles sont présentes, sont souvent décrites dans les comptes-rendus par les médecins
contrairement à d’autres effets secondaires liés à l’utilisation des IPP (infection à
Clostridium Difficile, hypomagnésie, pneumonies extra-hospitalières).
Un « effet rebond » est souvent décrit à la suite de l’arrêt des IPP. Afin de rendre
compte de cet effet, une consultation du DPI a été faite un mois après, pour observer
la reprise ou non de l’IPP.
63
Dans un premier temps il y a eu un recueil de données patients à partir du dossier
patient informatisé (DPI), transposé par la suite dans un fichier Excel. Ces dernières
étaient composées : de l’âge, du sexe, de l’indication, de la posologie, de la durée de
traitement, de la clairance à la créatinine (selon MDRD), ainsi que de la présence
d’ostéoporose et de démence.
Un logigramme (voir page suivante) sur l’action à proposer aux prescripteurs pour les
prescriptions non-conformes a été établi par les pharmaciens hospitaliers afin
d’effectuer des interventions pharmaceutiques. En fonction de la non-conformité des
prescriptions, les IP sont saisies dans le DPI par le pharmacien et les internes
conformément à ce logigramme. Cette méthode permet également l’échange médico-
pharmaceutique mais également la traçabilité de la décision finale.
Dans les cas de conformité de la prescription, aucune IP n’est saisie, dans le cas
contraire, les IP saisies étaient de quatre types :
− l’arrêt du traitement par IPP
− la diminution posologique (passage d’une dose pleine à une demi-dose)
− le passage en si besoin
− le passage à un antiacide local, le GAVISCON ® (1 à 3 par jour en si besoin).
A la suite de la saisie de l’IP, l’acceptation ou le refus par le médecin ont été suivis et
tracés dans le DPI ainsi que dans le fichier Excel.
64
Figure 15 - Logigramme décisionnel concernant les prescriptions d’IPP non-conforme (NC)
65
III. Résultats et discussion :
Au total, 90 patients ont été intégrés au sein de cette étude (8 patients sont décédés
au cours de l’étude). La moyenne d’âge des patients était de 87.3 ans et le sex ratio
homme/femme de 0.3.
66
La majorité des non conformités (NC) était due à un non-respect des
recommandations. En effet en consultant les dossiers patients, on constate qu’un
grand nombre d’entre eux n’ont pas d’indication nécessitant la mise en place d’un
traitement par IPP. La seconde cause de NC concerne les durées de traitement trop
longues. Il s’agit le plus souvent des cas de traitements initiés selon les
recommandations mais renouvelés au-delà de ce qui est nécessaire. Enfin, dans une
moindre mesure, on constate des surdosages, souvent associés à une durée de
traitement trop longue.
Pour chaque patient nous avons recherché la présence ou non d’un des trois effets
indésirables pouvant être aggravé par les IPP (démence, ostéoporose et insuffisance
rénale). Les patients pour lesquels l’information n’était pas renseignée dans leur
dossier ont été considérés comme non atteint.
Les résultats suggèrent que la majorité de la cohorte est atteinte de démences (N=57),
tandis qu’une faible partie serait sujette à l’ostéoporose (N = 30). Néanmoins, on
observe que la fonction rénale se trouve altérée dans 77% des cas. En outre 61% des
patients atteints de démences et 76% des patients insuffisants rénaux avaient une
prescription d’IPP non conforme aux recommandations.
Par la suite les interventions pharmaceutiques (IP) relatives aux non conformités ont
été transmises au médecin par le biais du dossier patient informatisé (DPI). Lors de la
saisie des IP, nous avons appuyé nos propos en fonction des possibles effets
indésirables pouvant être induits par les IPP. Un retour par le médecin pouvait être
constaté, soit par annotation dans le DPI à l’attention du pharmacien, soit par
modification du traitement par IPP.
67
Figure 18 - Répartitions des modifications demandées et des IP effectuées
Dans un premier temps sur les 50 « demandes d’arrêt » de l’IPP, seules 23 ont été
acceptées par les médecins (46%), trois ont été passées en si besoin (6%), et une
diminution de posologie avec passage d’une dose pleine à une demi-dose a été
constatée (2%).
D’autre part sur les 13 « passages en si besoin » proposés, cinq ont conduit à l’arrêt
du traitement directement (38%) et un a été passé en si besoin (8%).
Pour finir sur les 12 propositions de « diminution posologique », seules cinq ont été
acceptées (42%).
On constate donc 37 propositions pharmaceutiques n’entrainant aucun changement
de traitement (49%).
68
Les changements opérés sur le traitement des patients ont été suivis pendant
quelques mois (à peu près six mois) jusqu’à l’arrêt de l’étude.
Sur les 28 arrêts constatés, 25 ont été maintenus jusqu’à l’arrêt de l’étude (89,2%).
Parmi les 23 arrêts de prescription par le médecin suite à l’IP du pharmacien, 22 ont
été maintenus. La seule reprise s’est faite au bout de trois semaines après l’arrêt et
est due à une récidive de RGO avec hoquet au cours du repas particulièrement
invalidante pour le patient.
En ce qui concerne les cinq arrêts effectués, alors que la demande du pharmacien
était le passage en si besoin, deux ont été repris au bout de 1 et 3 mois. Les raisons
invoquées étaient des problèmes liés à l’alimentation et des douleurs stomacales
associées à des reflux acides.
Les cinq diminutions posologiques ont toutes été maintenues et seul un cas a
nécessité l’introduction d’un traitement par GAVISCON ®.
Notre étude permet de mettre en avant que les IPP peuvent être arrêtés sans pour
autant entrainer d’effets rebond. Sur les 28 arrêts au total, seuls trois ont été repris et
cinq ont nécessité la prise d’un traitement par GAVISCON ®.
Cette étude a été réalisée sur un maximum de patient possibles, cependant il aurait
été intéressant de la produire à plus grande échelle. Il s’agit d’une étude sur un groupe
restreint de patient qui est de surcroit âgé. Au total 90 patients ont intégré cette étude
et huit sont décédés pendant la durée de l’étude (cause non imputable à l’étude).
Malgré une analyse précise de leur dossier et une pose d’IP adaptée, peu d’IP ont été
suivis par les médecins. On se rend ainsi compte de la difficulté qu’ont les médecins à
arrêter un médicament continuant d’être prescrit hors indication.
Afin d’être plus pertinente, la consultation des DPI devrait être faite dans les mois à
venir afin de se rendre compte de la reprise ou non du traitement et donc d’un potentiel
effet rebond à plus long terme.
69
IV. Conclusion :
Dans notre étude, on se rend compte que les prescripteurs ont beaucoup de difficulté
à arrêter ou même modifier ce genre de traitement (37 acceptations d’IP sur 54). Or
dans les EHPAD, nous sommes en présence de personnes déjà fragilisées par l’âge.
La réévaluation régulière (dosage, durée et indications) de ce genre de traitement
devrait donc être mise en place afin de limiter la misuse et l’overuse des IPP.
Nous avons également pu constater que ces traitements peuvent être arrêtés sans
pour autant entrainer un effet rebond systématique. De plus, ce dernier peut être
maitrisé par un passage du traitement en « si besoin » ou par l’usage de pansements
gastriques tel que le GAVISCON® utilisé dans notre étude.
70
Conclusion :
La prise en charge des troubles gastriques a radicalement changé grâce aux IPP. Ils
font désormais partie des médicaments les plus vendus en officine. Cependant, si ces
derniers sont généralement bien tolérés et ne montrent que peu d’effets indésirables
à court terme, au long court le risque serait plus mitigé.
A ce propos depuis quelques années diverses études ont permis de mettre en avant
de possibles effets secondaires en cas d’utilisation prolongée des IPP, pouvant se
répercuter sur la santé des patients. On peut relever dans la littérature actuelle le
risque de fracture et d’ostéoporose, d’insuffisance rénale, d’infections à clostridium
difficile, de pneumonies communautaires aigues, de carence en vitamine B12,
magnésium et calcium et enfin de démences. Toutefois, l’interprétation de ces études
doit se faire avec prudence, puisqu’il s’agit en majorité d’études observationnelles
souvent reprises sous la forme de revue ou méta-analyse.
Malgré tout, l’usage prolongé des IPP tend à être remis en question et ce d’autant plus
chez les personnes âgées. En effet, la population gériatrique correspond à une
population déjà fragilisée d’un point de vue physiologique. On constate une
modification du microbiote intestinal, une diminution de l’acidité gastrique favorisant la
prolifération bactérienne, une diminution de la surface alvéolaire des poumons, une
diminution du DFG rénale, une neurodégénérescence, ainsi que des atteintes ostéo-
articulaires.
On comprend donc bien que les éventuels effets indésirables des IPP chez les
personnes âgées doivent être pris en considération lors de traitement prolongé. Une
réévaluation du traitement afin de suivre au mieux les recommandations énoncées
dans l’AMM est recommandée. Cependant, on s’aperçoit souvent que les
prescripteurs ne prennent pas l’initiative d’arrêter un traitement par IPP par crainte d’un
effet rebond important.
71
Annexes :
72
ANNEXE 2 – 30 SUBSTANCES ACTIVES LES PLUS VENDUES EN VILLE EN 20133
73
ANNEXE 3 – FORMATION DES MICROVILLOSITES 11
74
ANNEXE 5 – SIGNES ET SYMPTOMES D’UN DEFICIT EN MAGNESIUM 115
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