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1

ELSA :
Prêt à décoller? Passeport, dentifrice, préservatifs? En tout cas c’est sympa de me sacrifier une heure.

LOUISE :
Je voulais pas partir sans boire un coup avec toi. Surtout que j’ai un petit service à te demander

ELSA :
Tout ce que tu veux sauf m’occuper de ton cauchemar de chat.

LOUISE :
T’inquiète, il va se faire les griffes chez ma mère. Non, c’est pour mes plantes. Elles tiendront pas le coup
deux mois sans arrosage. Ca t’embêterait si je te donnais mes clefs pour y aller de temps en temps?

ELSA :
Donne. J’y veillerai comme sur mes cheveux.

LOUISE :
C’est ça qui m’inquiète !

ELSA :
Saloperie.

LOUISE :
Fausse blonde.

ELSA :

LOUISE :
Tu as l’air tendu.

ELSA :
Voir une pote partir forcément ça donne le blues, surtout quand on reste à quai.

LOUISE :
Je te jure que je t’écrirai de longs mails ennuyeux, avec tous les bons gros clichés du Québec.

ELSA :
Tu peux tartiner, je m’ennuierai jamais en te lisant.

LOUISE :
Quel aveu, toi qui es toujours à faire de l’ironie…

ELSA :
Oh, ça va.
Temps.
LOUISE :
Il y a un problème ? Pourquoi tu fixes ton verre?

ELSA :
Pourquoi je fixe mon verre? Pourquoi je fixe mon verre? Temps. Parce que je t’aime. Je t’aime comme si
j’avais douze ans. J’ai l’impression d’avoir des gyrophares dans les yeux.

LOUISE :
Regarde-moi.

ELSA :
Non, pas tant que j’aurai pas tout dit. J’ai un éclair d’inconscience alors tu permets, je m’en sers. Après ce
sera trop tard. Voilà. Tu es là tout le temps, Louise. Tu t’es glissé dans je ne sais pas trop quoi…mon
ventre, mes poumons, ma tête de mule, j’ai pas bien localisé. Mais j’ai le trac à chaque fois que tu
m’appelles. Et je dois toujours respirer un grand coup avant de répondre par un « allo » qui donne pas
l’impression que je m’étrangle. Pour te dire, je me suis préparée pendant deux heures avant de venir
prendre cette pauvre bière avec toi. Je t’aime sans aucune pause. J’ai la tête en vrac. Et je suis furieuse de
te voir partir dans le pays le plus chaleureux de la terre, où les femmes sont aussi entreprenantes que les
hommes à ce qu’on dit. Je suis jalouse. Pas une jalousie de midinette. Non. Une jalousie vitale. Parce
qu’on va être clairs : si tu rencontres quelqu’un, ma vie part en fumée. Je mourrai. Je veux être près de toi
pendant des années, et tant qu’on y est, jusqu’à ce que je sois sous terre. Ca a rien à voir avec les autres
couples et leurs petits jeux mesquins, je veux qu’on fasse de grands beaux projets, je veux t’emporter dans
des montagnes d’adrénaline, je veux qu’on fasse des enfants de toutes les couleurs, je veux prendre soin
de nous, te donner confiance en tout, même en la mort…

LOUISE :
Mais…

ELSA :
Je veux te faire jouir ! Tu comprends ? Je veux te faire jouir !

LOUISE :
Ha bon ? Je…

ELSA :
Tais-toi. Dis rien. Je vais réussir un jour à quitter ma bière des yeux, mais là, c’est pas gagné.

LOUISE :
Regarde-moi.

ELSA :

LOUISE :
Rentre chez toi... Et mets des habits chauds dans ta valise parce qu’il caille à Montréal.
ELSA :
Et les plantes ?

LOUISE :
Qu’elles crèvent.
2

ELLE :
Je vais te poser une question difficile. Elle va te paraître adolescente mais elle me tortille la tête tous les
jours, alors je me dis qu’il ne faut pas la réfréner. Ca contribue aussi au travail que je fais sur moi en ce
moment, pour exprimer tout de suite ce qui se passe dans ma tête avant que ça ne se transforme en bombe.
Comme c’est dur. Je me calme. Je vais me lancer. D’ailleurs, je précise à l’avance que tu as le droit de
prendre ton temps, de conduire ta réflexion sur plusieurs jours,
et même, pourquoi pas, de ne pas répondre si ça t’embarrasse. Sache que dans tous les cas, je préfère le
silence à la malhonnêteté.

LUI :
Tu la poses ta question !

ELLE :
Attention, on ne me brusque pas. Il faut avoir totalement confiance en son partenaire pour oser lui confier
une interrogation pareille. En même temps, prenons ça comme un jeu. Tu te souviens, ces petites devinettes
qu’on se posait quand on jouait à « Action ou vérité » au collège. Soyons joueurs ! Tu es prêt ? Je peux me
lancer ?
Un temps.
Voilà. Si dans une vie virtuelle, pour de faux, tu devais choisir une maîtresse parmi toutes mes cop…

LUI :
Sans hésiter, Christina.
3

ELLE :
La bête se rhabille déjà ? Il me plait beaucoup ce caleçon. Cette couleur c’est… crème ? Ecru ?

LUI :
Je sais pas... Blanc.

ELLE :
Ca doit être ça. Tu veux que je nous prépare à manger ?

LUI :
Je suis un peu serré aujourd’hui.
Un temps
Dis-moi, tu n’es pas en train de t’attacher, hein ?

ELLE :
Surtout pas.
LUI :
Les femmes le disent mais pensent tout le contraire.

ELLE :
Tu as oublié que j’étais une femme hors du commun.

LUI :
A ce point ?

ELLE :
J’ai tout sauf envie de m’engager avec un homme. Le butinage me convient très bien.

LUI :
Je ne suis pas le seul gibier sur ton tableau de chasse ?

ELLE :
Qu’est ce que tu en penses ?

LUI :
C’est peut-être naïf, mais j’ai la sensation que si. Peut-être parce que tu as l’air d’être pleinement là, avec
moi, quand on se voit. Attention, je suis prêt à entendre l’inverse.

ELLE :
On s’aventure sur des œufs…

LUI :
Je suis solide. Alors, j’ai tort ?

ELLE :
Tu veux vraiment savoir ?
LUI :
Oui. Et je trouverais ça parfaitement normal puisque de mon côté j’ai Mathilde.

ELLE :
Les hommes le disent, mais la plupart du temps, pensent le contraire.
LUI :
Tu oublies que je suis un homme exceptionnel.

ELLE :
Ah ? Bon. D’accord. Je fréquente...

LUI :
« Fréquente»…qu’est-ce que ça veut dire « fréquente »...

ELLE :
J’ai un autre amant.

LUI :
Très bien. Ca me rassure pour toi. Je le connais ?

ELLE :
Non.

LUI :
Je trouve ça bien mais ça me surprend de toi.

ELLE :
Ah oui ?

LUI :
Je pensais pas que tu serais du genre à te faire sauter par deux types en même temps, quel appétit !

ELLE :
Je ne mange personne. On partage des moments.

LUI :
Tu te rends compte que tu as 32 ans, et que tu n’as rien construit, que tu te satisfais de moments ?

ELLE :
Tu te rends compte que tu es à peine marié depuis un an et que tu trompes ta femme toutes les semaines?

LUI :
Mais au moins j’ai construit ma grande. J’ai bâti quelque chose de solide. Tu ne veux pas d’enfant ? Tu
comptes vieillir seule ?

ELLE :
Je ne compte rien.
LUI :
Est-ce qu’il t’arrive de nous voir tous les deux dans la même journée ?

ELLE :
Honnêtement ?

LUI :
Arrête avec ce « honnêtement ». C’est d’un condescendant.

ELLE :
Oui, ça m’arrive.
LUI :
Tu changes les draps au moins entre deux passes?

ELLE :
Fais attention à ce que tu…

LUI :
Je plaisante. Comment est-il?

ELLE :
Différent, sinon je me contenterais de nos rencontres.

LUI :
Quel métier ?

ELLE :
Guitariste.

LUI :
C’est touchant. Temps. Donc moi, je suis le cadre plan plan.

ELLE :
Tu portes des costumes, c’est vrai. Tu sens bon. Tu es fier. Tu évolues dans le vrai monde du travail. Pour
moi, tu es presque le plus exotique des deux.

LUI :
Je trouve que ta vie est triste.

ELLE :
J’ai l’air triste ?

LUI :
Non. Mais dans le fond, tu l’es pour rêver si peu à la famille idéale. Il y a forcément un problème.

ELLE :
Il n’y a pas de famille idéale, il n’y a que des familles qui mentent. Je suis peut-être déréglée, mais je suis
honnête.

LUI :
C’est facile d’être honnête quand on ne s’engage pas.

ELLE :
Je voudrais que tu dégages maintenant. Le tourisme sexuel au pays des attachés cases m’a fatiguée.

LUI :
Tu es dégoûtante.

ELLE :
Ca tombe bien. Tu ne me goûteras plus.

LUI :
Je te souhaite un jour d’être la femme d’un seul homme.

ELLE :
Je t’enverrai un avis de décès, promis.
4

FRANCOIS
-Hé ! Deux mojitos svp !

ASTRID
Vous etes sur de la coupe de cheveux ?

FRANCOIS
Ca passe ou ça casse…

ASTRID
J’imagine que quand on a pas d’humour, ça casse alors…

FRANCOIS
… Et, je sais pas, vous faites du sport ?

ASTRID
Oh non, si on pouvait éviter les questions type agence matrimoniale.

FRANCOIS
Ok… ça vous semble évident ?

ASTRID
Pardon ?

FRANCOIS
ça vous semble aussi évident que pour ma sœur ou votre frère ?

ASTRID
Ah vous êtes direct… En 30 secondes on a peut être pas assez de recul, je sais pas… vous ?

FRANCOIS
En ce qui me concerne je pense qu’ils se sont plantés mais… ils vont être affreusement décus

ASTRID
Oui, terrible la déception

FRANCOIS
ça les excitait comme des puces de jouer les entremetteurs

ASTRID
On va pas se forcer pour leur faire plaisir non plus…

FRANCOIS
Oui, ne tuons pas l’ours avant de l’avoir attrapé hein… c’est juste un stupide a priori physique… Attention
vous êtes tout à fait jolie -c’est une question d’univers
ASTRID
Univers ou pas univers : Tchin ! A la famille qui croit nous connaître mieux que n’importe qui !

FRANCOIS
Et qui tombe toujours à côté de la plaque !

ASTRID
Bon on se dit quand même qu’on reste une petite heure ici, histoire de leur dire qu’on a été de bonne
volonté

FRANCOIS
Pourquoi pas, j’ai rien à faire

ASTRID
Et ben quand on aura fini les mojitos je prendrai du gin tonic, ça fait des lustres que j’en ai pas bu

FRANCOIS
Pourquoi attendre ? (au serveur) Deux gin-to s’il vous plait !

ASTRID
Ok… Alors comme ça vous vous attendiez à une fille dans votre style? Un peu « coiffé décoiffé », blouson
en cuir avec des petits bracelets péruviens ? Une fille vintage quoi

FRANCOIS
Oho dis donc vous avez une idée bien précise de ma future femme, dans le mille… En fait c’est vous qui
devriez me trouver quelqu’un, pas ma sœur !

ASTRID
Elle veut quoi pour vous votre sœur ?

FRANCOIS
Une femme qui lui fait pas d’ombre

ASTRID
Charmant… Vous me ferez penser à lui mettre mon poing dans la gueule la prochaine fois que je la vois !

FRANCOIS
Une boxeuse sous le tailleur… j’aime bien

ASTRID
Il faudrait que je grignote quelque chose si je veux pas vomir sur mon tailleur d’ailleurs

FRANCOIS
Je vous ai vexé tout à l’heure…

ASTRID
Non.
FRANCOIS
Si, si je vous ai vexé … Vous vous attendiez à ce que je m’émerveille dès le premier regard, qu’on se quitte
et que je vous rappelle jamais

ASTRID
Votre franchise ne me dérange absolument pas… Je suis parfaitement d’accord quand vous dites qu’on a
rien à faire ensemble… Garçon ! Deux autres !

FRANCOIS
Si vous avez pas froid aux yeux, pourquoi pas jouer au jeu de la vérité, comme ça on repartira au moins
avec quelque chose ?

ASTRID
Le jeu de la vérité ?

FRANCOIS
Pendant une heure on se dit tout, sans filtre social, on s’en fiche puisqu’on se reverra jamais… Par
exemple, est-ce que vous vous rendez compte que niveau séduction on joue pas dans la même cour ?

ASTRID
Pardon ?

FRANCOIS
Ben, on joue pas dans la même cour, vous le voyez ? Moi je suis très stylé. J’ai peu de vêtement mais
j’investis dans la qualité… Vous vous êtes moins regardante sur les matières, les coupes…

ASTRID
Aah je vois…Vous les joutes ça vous amuse. Être un peu vache avec l’autre…

FRANCOIS
Meuh…

ASTRID
Vous avez trop bu… Attention je vais vous rattraper, et vous allez souffrir à votre jeu de la vérité

FRANCOIS
Une bouteille de vodka s’il vous plait ! Oh et puis détachez vos cheveux, vous avez l’air d’une veille
danseuse là

ASTRID
Oh et puis merde Elle détache son chignon Voilà ça vous plait ? C’est tout emmele non ?

FRANCOIS
C’est vrai c’est le bordel… Allez tchin !

ASTRID
Tchin ! Bon allez, tant qu’on y est : elle est comment votre verge ?
FRANCOIS éclate de rire
Verge ? Vous me posez la question la plus gonflée du monde, et vous dites ‘verge’ ? Mais dites Bite !
Vous voulez savoir comment elle est ma bite !

ASTRID
Oui. Elle est comment, racontez

FRANCOIS
C’est pas la plus énorme que j’ai vu, mais elle se défend pas mal

ASTRID
Oh ils disent tous ça : elle est ni petite ni grande, mais dans les vestiaires j’étais dans les premiers, nanana..
Soyons sérieux : combien de centimètre au repos, et combien en érection ?

FRANCOIS
Ah ouais … ça c’est pas une question d’agence matrimoniale… Et vous votre chatte elle se défend
comment ?

ASTRID
Des lèvres assez fines… Et puisqu’on se reverra jamais, je peux vous avouer que j’ai un tatouage de Kurt
Cobain sur la cuisse gauche

FRANCOIS
Oh je peux regarder ? …Oh, pas jojo… Attends je vais pisser

ASTRID
Pourquoi j’ai le fou rire

FRANCOIS
Parce que t’es con

ASTRID
Ah non c’est toi qui est con !

FRANCOIS
Ah non c’est toi

ASTRID
Non c’est toi

FRANCOIS
D’abord tu me tutoies ?

ASTRID
Bah c’est toi qui as commencé

FRANCOIS
Non c’est toi
ASTRID
Non c’est toi ! Eh, tu veux te battre ! Tiens, prends ça !

FRANCOIS
Raté ! T’es toute bourrée

ASTRID
Oh je peux venir regarder ?

FRANCOIS
D’accord, mais comme un musée hein, on touche pas

ASTRID
Attends tu m’aides à me lever

FRANCOIS
Fais un effort…

ASTRID
Ce que t’es con

FRANCOIS
Ah non c’est toi

ASTRID
Non c’est toi

FRANCOIS
Je crois que tu me plais

ASTRID
Non c’est toi qui me plais

FRANCOIS
Non c’est toi.. C’est toi, c’est toi

Ils s’embrassent
5

FANNY
Tu pourrais te charger d’emmener la petite à l’école demain ?

ROBERT
Impossible, mon train part à 7h47… Demande à Elena

FANNY
Tu ne peux pas décaler ton billet ?

ROBERT
C’est le congrès entier qu’il faudrait que je décale, c’est délicat

FANNY
Tu pourrais quand meme te charger d’emmener la petite à l’école… et apres la conduire à son solfege

ROBERT
Qu’est-ce que tu as à faire de si important ?

FANNY
Rien… Partir

ROBERT
Partir où ?

FANNY
Partir d’ici dans un premier temps… mais où je ne peux pas te le dire

ROBERT
Qu’est-ce qui t’arrives ?

FANNY
Je viens de lire « Un train pour la vie » de Sarah Rayner

ROBERT
Je vois pas le rapport

FANNY
C’est normal il faut l’avoir lu… C’est l’histoire d’un ex-danseuse qui quitte sa fille et son mari pour
vivre sa vie

ROBERT
N’importe quoi… si je te donne un livre où la mère trucide toute sa famille, ça t’inspirera aussi?

FANNY
T’es bête ! Là les points communs avec l’histoire son flagrants ! J’ai fait de la danse classique toute
mon enfance, nous avons une fille qui s’appelle Sarah, et le père est électricien !

ROBERT
Je suis chirurgien

FANNY
Oui ben deux métiers avec des outils !

ROBERT
Bon et dans ton histoire la mère saute de joie quand elle abandonne toute sa famille ?

FANNY
Non, elle a des crises de manque, elle souffre bien sûr, mais elle transforme sa vie en destin. Elle est
libre parce qu’elle ne fait aucune concession.

ROBERT
Fanny… C’est un livre, une vision romantique. Quand t’as eu la gastro le mois dernier et que t’as raté
les toilettes pour vomir, je ne t’ai pas dit : « Je viens de lire Belle du seigneur, et nous sommes trop
différents d’Ariane et Solal : je me tire »

FANNY
Je suis malheureuse…

ROBERT
Viens… Je vois bien que tu rames un peu en ce moment

FANNY
J’ai l’impression d’être transparente ! J’aimerais marquer ma vie par quelque chose ! un braquage, une
chanson, un attentat, n’importe quoi !

ROBERT
Tu m’as donné une fille extraordinaire

FANNY
Non ! Quand je l’accompagne au parc et que je la compare aux autres fillettes, elle n’a rien
d’extraordinaire: elle est aussi banale que moi…

ROBERT
Tu mérites une claque…

FANNY
Mais justement tu ne me bats même pas ! Je te dis que j’ai envie de tout abandonner, et toi tu me
réconfortes et tu me consoles : t’es parfait ! J’ai rien à raconter à mes amies…

ROBERT
T’as qu’à leur dire que je te tabasse tous les soirs

FANNY
Pff en plus t’es drôle…
ROBERT
Si tu veux, on va organiser ta disparition… On va réserver une chambre dans une jolie petite ville, au
nom de Mrs Brighton… Demain tu déposes Sarah, puis tu prends le train, et tu disparais

FANNY
Oh oui ! Et tu enverras chercher après moi, tu appelleras la police ? Tu feras pleurer ma mère ?

ROBERT
Voilà. Bon tu reviens une semaine plus tard, je veux pas inquiéter la petite non plus.
6

SOPHIE
C’est fini Mathilde.
MATHILDE
Ha non. C’est fini.
SOPHIE
Oui c’est ce que je dis.
MATHILDE
Sauf que c’est moi qui le dis. C’est fini je suis désolée.
SOPHIE
T’as pas à être désolée. C’est moi qui te quitte.
MATHILDE
Tu. Tu vas pas me voler ça ?
SOPHIE
Je vole rien c’est…

MATHILDE
Si. T ‘es en train de me voler ma rupture.
SOPHIE
Pas du tout !
MATHILDE
Si. Tu peux pas t’empêcher. Le « Je t’aime », tu sais, au tout début, tu me l’avais déjà volé. Tu t’étais
démerdé pour le dire juste avant moi. Tu m’avais volé MON moment de princesse. T’es très fort pour ça.
Pour faire croire aux autres qu’ils sont seconds partout et tout le temps.

SOPHIE
Je veux surtout pas te voler quoique ce soit. Tu veux me quitter en premier ? Vas-y,
MATHILDE
Mais c’est ce qu’il s’est passé! Je l’ai décidé en premier !
SOPHIE
Ok. Si tu veux. Ca va ? On est au clair ? J’y vais.
MATHILDE la tire par le bras brutalement pour le rasseoir.
MATHILDE
Non.
SOPHIE
Quoi encore.
MATHILDE
C’est MOI qui me lève en premier pour claquer la porte.
SOPHIE
Je peux plus ! Je peux plus supporter. Je peux plus.
MATHILDE
Pourquoi tu pleures ? Tu crois pas que ce serait à moi de pleurer après tout ça ?
SOPHIE
Aaaaaah!
MATHILDE
aaaaaa !
ENSEMBLE
Haaaaaaaaaaa !
Long temps.
SOPHIE :
Si tu veux bien Mathilde, on va se lever ensemble tout doucement, bien bien ensemble, on va marcher tous
les deux vers la porte et on va la claquer très fort ensemble. Et puis on s’éloignera l’un de l’autre ensemble.
Tout bien ensemble comme tu aimes.
MATHILDE :
Tu peux me dire à quoi ça sert de tout faire ensemble si on est plus en couple ?
SOPHIE
Haaaaaaaa !
MATHILDE
Haaaaaaaaaa !
7

JEAN
Pardon mais… on se connait ?

CAMILLE
Pardon ?

JEAN
On se connait ?

CAMILLE
La plaie… Est-ce que j’ai l’air d’être une fille à qui on dit ce genre banalités ? Et tant qu’on y est on va se
faire la liste :
« Vous avez les yeux de mon futur enfant »
« vous connaissez les dix chiffres du bonheur ? votre numéro de téléphone »
ou le maitre avec son clébard « pfiou »…
Mais vous auriez un taux de réussite beaucoup plus élevé si vous lachiez, de but en blanc,
« j’ai envie de me réchauffer contre une petite brune, et vous feriez parfaitement l’affaire »
mais pourquoi c’est si difficile à dire ? Pourquoi il faut toujours enrober le cul ?
« On se connait non ? »
Je suis atterrée… ça sent la misère… on se dit que ça donne pas de piquant au lit.
Et puis ça te la couperait, si je te disais
« allez, viens, monte chez moi, moi aussi j’ai une petit pulsion animale, allez viens, puisque d’après toi on
se connait, on va pas perdre de temps à boire un café et se raconter notre adolescence ! »
...Ah on perd la face là… tout de suite le petit male veut rentrer chez sa maman

JEAN
Ah ça y est je te resitue ! Camille Delaveine ! La petite sœur d’Olivier Delaveine ! C’est ça ?
DETAILS La librairie

STEPHAN : Pardon.

AURELIE : Quoi ? Mon dieu, vous m’avez fait une de ces peurs.

STEPHAN : Je suis désolé. Je ne peux pas m’en empêcher, je suis comme ça. Vous travaillez ici ?

AURELIE : Provisoirement. Je veux dire, oui. Je suis embauchée ici en extra.

STEPHAN : OK

AURELIE : Quoi ?

STEPHAN : OK. Je devrais acheter une paire de lunettes de soleil ; c’est ce que j’ai pensé. Mais le magasin
n’est pas encore ouvert ; de l’autre côté de la rue. Même s’il est écrit sur la vitrine qu’ils ouvrent à dix
heures. Ils ont des lunettes Armani pas mal à l’intérieur ; je suis resté devant et je les ai regardées à travers
la vitrine. Une vendeuse était là, j’ai frappé à la vitre, plusieurs fois, mais elle ne m’a pas entendu. Vous
pourriez m’aider ?

AURELIE : Bien sûr, à quel sujet ? En quoi je peux vous aider ?

STEPHAN : Je voudrais juste vous demander

AURELIE : Oui ? Quoi ?

STEPHAN : Est-ce que vous avez des livres sur le Sida, ou le VIH ?

AURELIE : Sur le Sida ? Ou le VIH ? Oui je crois. Ils devraient être au rayon médecine ; vous avez
regardé là-bas ?

STEPHAN : Non. Au rayon maladie ? C’est une maladie

AURELIE : Non, en médecine ; si on a quelque chose c’est dans ce rayon.

STEPHAN : Ok, merci. Sympa de votre part.

AURELIE : Vous avez trouvé ?

STEPHAN : Je peux vous demander quelque chose ?

AURELIE : Oui… bien sûr.

STEPHAN : Je peux ?

AURELIE : Oui. Quoi donc ?

STEPHAN : Vous sortez avec quelqu’un ?

AURELIE : Ah d’accord. Oui.

STEPHAN : Avec qui ?

AURELIE : Avec qui je sors ?


STEPHAN : Oui

AURELIE : Je suis pacsée. Elle est anglaise.

STEPHAN : Elle habite en Angleterre, au Royaume-Uni ? En Irlande ?

AURELIE : Non, elle n’est jamais allée en Irlande.

STEPHAN : Ok. Merci. Une chose encore.

AURELIE : Oui ?

STEPHAN : C’est Ok si je vous demande encore autre chose ?

AURELIE : Oui : quoi donc ?

STEPHAN : Vous faites quoi après ?

AURELIE : Quand ?

STEPHAN : Plus tard, après… quand vous avez fini… je veux dire, ici ; vous finissez quand ?

AURELIE : Ici ? à 18h.

STEPHAN : Et après vous allez faire quoi ?

AURELIE : Ce soir ? Eh bien je pensais aller voir un film au cinéma.

STEPHAN : Pourquoi pas oui…ça fait longtemps que je ne suis pas allé au cinéma. Le dernier film que j’ai
vu était sans doute La liste de Schindler. Vous l’avez vu ? Tout le monde est resté assis à la fin. Personne
ne voulait se lever pour partir ; c’était tellement beau. Ça a pris au moins un quart d’heure avant que
quelqu’un ait la force de se lever pour partir. Vous l’avez vu ? Vous étiez là ?

AURELIE : Non. C’était bien ?

STEPHAN : C’était bien. Si bien que les gens pleuraient. Vous pensiez aller voir quoi ce soir ?

AURELIE : Je ne sais pas, je n’ai pas décidé. La leçon de piano peut être.

STEPHAN : Vous aimez quoi ?

AURELIE : J’aime… j’aime… fuir.

STEPHAN : Quel genre de film je veux dire.

AURELIE : Eh bien La leçon de piano je crois. Je crois que j’aime bien ce film. Vous voulez venir ?

STEPHAN : Au cinéma ? Oui. Absolument. Je vous attends dehors ?

AURELIE : Non, il est dix heures, n’attendez pas dehors ! Attendez-moi là-bas, au cinéma. Au cinéma Le
Royale.
DETAILS Le café

ERIC
Comment ça va ? Tu veux quelque chose ? Un expresso ou un café au lait ?
ELISE
Oui s’il te plait. Un cappuccino.
ERIC
Ok. Sucre ? Tu prends du sucre ?
ELISE
Non merci, pas de sucre. Tu t’en vas ?
ERIC
Non, non je vais juste chercher ton cappuccino au comptoir là-bas…
ELISE
Ah d’accord, pardon.
ERIC
Je n’aime pas cet endroit. La déco est horrible…
ELISE
Merci. Tu as quand même apporté du sucre.
ERIC
Ah oui ? Pardon. Je dois être nerveux.
ELISE
Vraiment ? Pourquoi ?
ERIC
Je ne sais pas. Qui sait.
ELISE
Pourquoi tu voulais me voir ?
ERIC
Oui, pourquoi je voulais te voir ?
ELISE
Oui.
ERIC
Oui pourquoi je voulais te voir … Pourquoi crois-tu que je voulais te voir ?
ELISE
Je ne sais pas.
ERIC
Tu ne sais pas ?
ELISE
Non.
ERIC
Non… Comment ça va ?

ELISE
Bien.
ERIC
Bon. J’ai pensé à toi.
ELISE
Tu as dit quoi ?
ERIC
J’ai pensé à toi… J’ai pensé à toi.
ELISE
Pourquoi ?
ERIC
Pourquoi ?
ELISE
Pourquoi tu as pensé à moi…je veux dire.
ERIC
Je ne sais pas. Pourquoi est-ce qu’on pense à quelqu’un ?
ELISE
… Tu as pensé quoi ?
ERIC
Uhm… Ce que j’ai pensé ? Un temps. Tu habites où ?
ELISE
Où j’habite ? Et bien j’habite… une amie me prête son appartement, un petit studio, à côté de Sentier. C’est
juste un petit studio. Je la connais depuis le lycée, elle est photographe… Là elle est en Asie. Je peux rester
dans son studio, en attendant. Mais tous mes livres et mes meubles sont stockés dans un garage. Toi, tu
habites où ?
ERIC
J’habite rue Saint Antoine ; dans le même appartement depuis dix ans. J’aimais bien vivre là-bas ;
maintenant plus tellement… Tu as pensé à moi ?
ELISE
Oui.
ERIC
Tu l’as fait ? Vraiment ?
ELISE
Bien sûr.
ERIC
C’est vrai ? Tu as pensé quoi ? Un temps. Tu vas faire quoi cet été ?
ELISE
Cet été ?
ERIC
Oui, tu vas voyager ?
ELISE
Peut-être partir en Irlande, avec mon petit ami, je crois, je ne sais pas trop.
ERIC
C’est bien… ça a l’air génial… Je ne suis jamais allé en Irlande… J’espère que ce sera sympa.
EMMA
Je l’espère aussi.
ERIC
Il s’appelle comment ?
ELISE
Daniel ?
ERIC
Daniel ? Il s’appelle Daniel ?
ELISE
Oui
ERIC
Mon fils s’appelle Daniel. J’espère que tu ne sors pas avec mon fils ?
ELISE
Je ne crois pas.
ERIC
Non. Il n’a que cinq ans. Il ne va pas en Irlande cet été. Il va passer quelques semaines avec son meilleur
ami en Provence. Il travaille au ministère des affaires étrangères. Enfin, le père de son meilleur ami travaille
au ministère des affaires étrangères. Un expert du moyen-orient, de l’économie du moyen-orient, de
l’économie moyen-orientale. Je pourrais te revoir cet automne ?
ELISE
Cet automne ?
ERIC
Quand tu seras de retour d’Irlande, c’est possible ?
ELISE
Je ne sais pas si je serai à Paris à ce moment-là.
ERIC
Ma femme est à Rome.
ELISE
En automne ?
ERIC
Non, en ce moment, ce week-end. Elle aide sa sœur à préparer son mariage ; elle va se marier avec un
Italien. Il est ergonome. Il a l’air sympathique, il sourit tout le temps
ELISE
Oui ils sont doués pour ça les Italiens
ERIC
L’ergonomie ?
ELISE
Non, pour sourire. C’est dans leur…vocabulaire, j’allais dire. Je dois y aller, maintenant.
ERIC
Je crois que je vais marcher avec toi jusqu’à la librairie, si ça ne te dérange pas.
Trahisons

JERRY
Salut
EMMA
Salut. Je viens seulement d’arriver. Je voulais arriver beaucoup plus tôt. Je fais mijoter un plat, ça prend des
heures. Tu as faim ?
JERRY
Oui. Joli tablier (ils s’embrassent)
EMMA
Le feu est allumé c’est bon.

JERRY
De la vodka ? Au déjeuner ?
EMMA
J’en ai envie. Je suis tombée sur Judith hier. Elle te l’a dit ?
JERRY
Non, elle en a pas parlé. Où ?
EMMA
A un déjeuner. Elle ne t’a rien dit ?
JERRY
Non
EMMA
C’est bizarre
JERRY
Tu veux dire quoi, à un déjeuner, où ça ?
EMMA
Au restaurant Chez Gino.
JERRY
Chez Gino ? Qu’est-ce qu’elle faisait chez Gino ?
EMMA
Elle déjeunait. Avec une femme.
JERRY
Une femme ?
EMMA
Oui
JERRY
Chez Gino –c’est loin de l’hopital
EMMA
Mais non bien sur que non
JERRY
M je suppose que non. Et toi ?
EMMA
Moi ?
JERRY
Qu’est-ce que tu faisais Chez Gino ?
EMMA
Je déjeunais avec ma sœur
JERRY
Ah
EMMA
Judith…ne t’a rien dit ?
JERRY
Je ne l’ai pas vraiment vu. Je suis rentré de soirée tard hier. Et elle est partie tôt ce matin
EMMA
Tu penses qu’elle sait ?

JERRY
Qu’elle sait ?
EMMA
Qu’elle sait ? Pour nous ?
JERRY
Non
EMMA
Tu en es sûr ?
JERRY
Elle est trop occupée pour ça. A l’hopital. Et avec les enfants. Elle n’a pas la tête à… soupçonner quoi que
ce soit
EMMA
Et, rapport aux indices ? Elle n’est pas… intriguée, ne veut pas enquêter ?
JERRY
Quels indices ?
EMMA
Eh bien il doit y en avoir… des traces qu’elle pourrait… remarquer
JERRY
Il n’y en a aucune…aucune à sa portée
EMMA
Oh, bien, parfait
JERRY
Elle a un admirateur
EMMA
Vraiment ?
JERRY
Un autre docteur. Il l’emmène boire des verres. C’est… irritant. Enfin, elle dit que c’est tout ce qu’il y a ;
qu’il ne se passe rien d’autre : il en pince pour elle, elle l’aime bien, etc etc –je ne sais pas vraiment ce qui se
passe
EMMA
Oh, et pourquoi elle ne pourrait pas avoir un admirateur ? J’en ai bien un moi
JERRY
Qui ?
EMMA
Euh… toi, il me semble
JERRY
Ah oui. Je suis plus que ça.
EMMA
Dis-moi… tu as déjà pensé à… complètement changer de vie ?
JERRY
Changer de vie ?
EMMA
Mmm
JERRY
C’est impossible
EMMA
Tu penses qu’elle te trompe ?

JERRY
Non. Je ne sais pas
EMMA
Pendant que tu étais en voyage aux Etats Unis cette smeaine par exemple ?
JERRY
Non
EMMA
Toi, tu as déjà été infidèle ?
JERRY
Envers qui ?
EMMA
Moi bien sûr
JERRY
Non. Et toi…avec moi ?
EMMA
Non. Si elle te trompait, qu’est-ce que tu ferais ?
JERRY
Elle est fidèle. C’est juste qu’elle est occupée. Elle aime sa vie. Elle aime les enfants
EMMA
Ah
JERRY
Elle m’aime
EMMA
Ah
JERRY
Mais je t’adore. Je t’aime.
EMMA
Oui. Ecoute je dois te dire quelque chose.
JERRY
Quoi ?

EMMA
Je suis enceinte. Ca date de quand tu étais aux Etats-Unis. Ce n’était personne d’autre. C’était mon mari.
JERRY
Oui, bien sur. Je suis très heureux pour toi

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