Books by Benjamin Ferron
La communication des mouvements sociaux. Pratiques militantes et stratégies médiatiques, Oct 9, 2024
Comment des personnes mobilisées autour de la défense d’une cause – amélioration des conditions d... more Comment des personnes mobilisées autour de la défense d’une cause – amélioration des conditions de travail, anti-racisme, défense de l’écologie, féminisme – peuvent-elles donner une large publicité à leurs revendications ? Comment transformer ces revendications en « débats de société » ? Doivent-elles jouer le jeu des médias ou chercher à les contourner en créant leurs propres moyens d’information ?
Pour répondre à ces questions, ce manuel propose une synthèse des recherches sur la médiatisation des mouvements sociaux et les stratégies d’information et de communication des organisations protestataires. Ces stratégies renvoient à l'ensemble des pratiques journalistiques, militantes et citoyennes qui contribuent à donner sens, publiciser et politiser les activités et revendications de groupes d’intérêt tels que les partis d’opposition, les syndicats de travailleurs, les associations et ONG, les collectifs militants informels ou les réseaux d’activistes. Qu'il s'agisse de mobiliser le corps et les émotions des militants, de prendre la parole en public, de faire un usage stratégique de dispositifs d’information, de produire un discours collectif, d'accéder aux médias de grande diffusion et d’en séduire les journalistes, ou de créer des réseaux d’information et de communication indépendants en ligne, le répertoire de communication des mouvements sociaux inclut des moyens diversifiés. Un livre indispensable pour comprendre les nouvelles pratiques militantes qui contribuent à politiser les discours sur les médias et le journalisme et à reconfigurer les règles du jeu politique.
Presses Universitaires de Rennes - Coll. Res Publica, 2022
Les sciences sociales se sont largement attachées ces dernières années à analyser le silence des ... more Les sciences sociales se sont largement attachées ces dernières années à analyser le silence des « sans-voix ». Or, elles montrent précisément que ces derniers sont bien mal nommés, au sens où leur parole, souvent considérée comme négligeable, voire discréditée, n'en a pas moins d'existence ni de vigueur. Paysans, ouvriers, précaires, travailleurs informels, colonisés, exilés, soldats, prostitués, enfants malades, jeunes de quartiers populaires : s'ils occupent des positions dominées dans les rapports sociaux de classe, de genre, de nationalité ou de génération, les groupes invités à s'exprimer dans les dispositifs étudiés au fil des contributions de cet ouvrage sont aussi généralement constitués comme collectifs par ceux-là même qui leur adressent cette offre de prise de parole. Ce livre se concentre ainsi sur le travail politique de ces entreprises de réhabilitation symbolique et sur leurs acteurs. Ceux-ci contribuent non seulement à donner un sens à ces dispositifs, mais aussi à provoquer, configurer et encadrer les discours qui y sont tenus : ainsi, militants, artistes et professionnels de la culture, personnels administratifs et politiques, chercheurs, travailleurs et patients du secteur médico-social, journalistes participent-ils à la reconfiguration des règles du jeu politique.
Benjamin Ferron, Émilie Née et Claire Oger sont enseignants-chercheurs au Centre d'étude des discours, images, textes, écrits, communications (Céditec) de l'université Paris-Est Créteil.
Paru le 29 mai 2015 aux Presses Universitaires de Rennes (coll. Res Publica)
L'usage des « résea... more Paru le 29 mai 2015 aux Presses Universitaires de Rennes (coll. Res Publica)
L'usage des « réseaux sociaux » par des mouvements protestataires récents (du « Printemps arabe » aux « Indignados ») a suscité un déferlement d'analyses et de commentaires soulignant les vertus intrinsèquement démocratiques des « nouvelles technologies de l'information et de la communication ». La thèse de la « démocratisation 2.0. » souffre cependant d'un déterminisme technologique qui va généralement de pair avec un oubli des conditions sociales et historiques de possibilité de ces pratiques militantes.
L'étude de Benjamin Ferron propose de revenir sur les stratégies politiques et médiatiques d'un réseau transnational de militants, le zapatisme mexicain, souvent considéré, après son émergence en 1994, comme le principal initiateur des mobilisations altermondialistes qui ont marqué les années 1990 et 2000. L'auteur compare les stratégies déployées par les militants de ce réseau pour construire publiquement une cause « globale » centrée sur la lutte contre la mondialisation néolibérale et, progressivement, le problème de la démocratisation des médias au Mexique et dans le monde. Comment les acteurs du réseau zapatiste sont-ils parvenus à construire et diffuser un discours de lutte contre le néolibéralisme auprès de publics géographiquement et politiquement très hétérogènes qui les ont érigés en emblème de « l'autre mondialisation » ? Comment et pourquoi la question des médias a-t-elle été inscrite dans l'agenda politique de nombre d'organisations militantes qui le composent, au point de constituer la principale activité d'une partie d'entre elles ?
Optant pour une sociologie constructiviste des problèmes publics, l'étude rend compte au plus près des mécanismes de la circulation transnationale du zapatisme et de ses acteurs. Elle montre que la convergence partielle des cadres de mobilisation collective est le produit d’une série de choix tactiques et de contraintes intériorisées favorisant, chez les militants et sympathisants de l'Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN), la production de discours contestataires relativement indépendants de leurs conditions sociales de production.
Critique parue dans Le Monde Diplomatique (septembre 2015) : "Tiré de sa thèse de doctorat, le livre de Benjamin Ferron revient sur les stratégies politiques et médiatiques du néozapatisme mexicain, considéré comme l’un des précurseurs de la mouvance altermondialiste à l’orée des années 2000. Mobilisant une sociologie constructiviste des problèmes publics, s’appuyant sur un matériau empirique et une littérature très denses, l’auteur analyse la structuration d’un réseau transnational de militants autour de l’édification d’une cause globale : la lutte contre le néolibéralisme. L’examen du répertoire du zapatisme met en évidence « la corrélation négative entre l’évolution de sa couverture médiatique et l’investissement des militants dans des réseaux de “médias alternatifs” ». Loin du « rapport amoureux à l’objet » qui caractérise trop souvent nombre de publications sur ce phénomène, cet essai est un outil précieux pour comprendre le rôle joué par les médias dans l’internationalisation des mouvements contestataires" (Nils Solari).
Paru en juin 2015 aux Presses des Mines
Les pratiques amateur, foisonnantes et hétéroclites, res... more Paru en juin 2015 aux Presses des Mines
Les pratiques amateur, foisonnantes et hétéroclites, restent largement méconnues, en particulier dans le domaine des médias et du journalisme, alors qu’elles représentent bien souvent une part importante des activités culturelles et sociales. Les recompositions récentes de l’espace public médiatique ont fait émerger la figure du « journaliste amateur », tantôt perçu comme le fossoyeur du journalisme professionnel, tantôt célébré comme un agent de démocratisation de l’expression publique. Cette publication entend faire avancer les connaissances empiriques et la réflexion théorique sur ce « journalisme amateur » et les pratiques de diffusion des passions culturelles ordinaires par les médias. Les relations entre espaces amateurs et espaces professionnels, les médiations techniques et sociales des pratiques amateur, les conditions et les effets de leur inscription dans la durée, constituent autant de points d’entrée privilégiés sur le matériau empirique diversifié de l’ouvrage : les publications alternatives en Tchécoslovaquie, un réseau de médias libres à Mexico, les correspondant locaux d’un titre de presse quotidienne régionale, une entreprise de production de logiciels éducatifs, ou encore des blogs musicaux, de cinéma ou de bande dessinée. À rebours des discours normatifs dont le « journalisme amateur » est le plus souvent l'objet dans des débats publics récurrents, les analyses proposées ici s’appuient sur l’étude fine des individus et des groupes considérés, ainsi que des données de cadrage pour articuler étroitement l’étude des relations entre champs professionnels et espaces amateur, d’une part, et entre les sujets et les objets de leur passion politiques ou culturelles, d’autre part.
Papers by Benjamin Ferron
Politiques de communication, 2023
Cette introduction du numéro thématique n° 20-21 de la revue Politiques de communication propose ... more Cette introduction du numéro thématique n° 20-21 de la revue Politiques de communication propose une réflexion d’ensemble sur « l’emprise de la communication » dans la structuration des espaces sociaux contemporains. Par analogie avec « l’emprise du journalisme », étudiée par Pierre Bourdieu, l’article formule une hypothèse de travail : l’emprise de la communication serait la contrainte structurale que fait peser le champ des professionnels de la communication, lui-même soumis à des déterminants externes (politiques, économiques, intellectuels) sur d’autres champs sociaux. Elle se traduirait par une transformation (plus ou moins grande) des rapports de force internes aux espaces professionnels étudiés par la prise en compte d'un point de vue exogène, entraînant une modification des pratiques et des croyances existant dans un état antérieur du champ (par exemple avec l’importance nouvelle de « l’image publique » comme enjeu professionnel). Elle se manifesterait surtout par une extension des pratiques à des espaces autrefois préservés, comme les espaces militants.
Appréhender la « communication » comme un champ faiblement autonome - il ne s’agit en rien d’un « corps » professionnel unifié -, exerçant des effets plus ou moins forts d’attraction et de répulsion sur d’autres univers, engendrant ainsi des effets structuraux sur les pratiques, croyances et hiérarchies, permet de souligner les processus qui concourent à construire et maintenir des frontières entre « experts », « spécialistes », « clients » et « profanes ». L’espace des professionnels de la communication semble ainsi devoir être analysé comme un champ « à forte dispersion » : les articles réunis dans le numéro thématique tendent en effet à montrer l’existence d’une forme de concentration polycentrique des capitaux professionnels spécifiques susceptibles d’agir sur le champ de la communication. La reconnaissance professionnelle des « communicants » est liée à leur capacité à acquérir et mobiliser des combinaisons très singulières de capitaux, qui permettent à certains agents (grandes agences, institutions ou organisations à fort capital économique et symbolique) d’occuper des positions dominantes au sein de sous-champs définis par la spécialisation sur des pratiques différenciées (la communication publique n’est pas la communication publicitaire, etc.).
Afin d’éviter les généralités, la question de l’emprise de la communication ne peut donc être posée que de façon contextualisée, champ par champ. La conclusion à laquelle nous arrivons est celle d’une emprise variable, en intensité comme dans ses modalités, à l’échelle des espaces sociaux spécifiques où elle est susceptible d’exercer – ou non – des effets, en fonction des combinaisons spécifiques de capitaux que les agents peuvent mobiliser dans leur travail de légitimation des activités identifiées comme relevant de « la communication ».
Journalism and Media, Mar 8, 2022
While the sociology of journalism has traditionally granted epistemic privilege to the mainstream... more While the sociology of journalism has traditionally granted epistemic privilege to the mainstream news media, professional elites and their dominant meta-discourse, there is a recent trend to research journalism from other points of view. Researchers have investigated alternative and community media, journalists with low visibility or legitimacy in the workplace, as well as heterodox conceptions of professional excellence. These studies shed new light on little studied sub-groups and practices. How can we integrate them into a sustained scientific dialogue between researchers? This paper presents a methodologically original attempt to do so by dialogically re-interrogating material from studies of three situations where journalism absorbs precarious and politicised agents in the field (media activists), new practices and tasks that need doing (online discussion administration) and unusual kinds of professional attributes (experiencing emotionality in crisis reporting). In each case journalism’s pursuit of professional autonomy is at stake, since conditions of production clash with established professional myths and practices or generate incompatibilities with institutionalised expectations. Our three-way exchange using the bridging/sensitising concept of edge focuses on the conversion or convertibility of external forms of capital (legitimacies, resources and experiences) into forms redeemable and tradeable in a professional field. It exhibits how forces external to the journalistic profession are (made) present in each case but refracted differently in each local configuration. We call for a more systematic and relational study of these kinds of localised refractions.
This article is an open access article distributed under the terms and conditions of the Creative Commons Attribution (CC BY
La recherche française contemporaine sur le journalisme suit deux tendances principales : une ins... more La recherche française contemporaine sur le journalisme suit deux tendances principales : une institutionnalisation sur le modèle des journalism studies aux États-Unis et un usage routinier d’analyses de contenus, peu ajustées aux exigences du métier de sociologue à partir du moment où elles s’autonomisent des méthodes d’enquête principales de la discipline. Dans ce contexte, cet article plaide pour une réinscription des données empiriques produites sur le journalisme dans une sociologie de la production des biens symboliques, et, au-delà, dans une théorie générale du social. Plus spécifiquement, les auteurs proposent un programme de recherche articulé autour d’une cartographie du champ journalistique et de l’analyse de ses relations avec les autres composantes du champ du pouvoir.
Politique et Sociétés, Jun 28, 2020
L’article décrit les pratiques d’une équipe en sciences sociales face à une demande institutionne... more L’article décrit les pratiques d’une équipe en sciences sociales face à une demande institutionnelle de recherche sur le problème de la « qualité de l’air intérieur ». En étudiant l’appel à propositions, les réponses des scientifiques et leurs interactions avec les commanditaires, l’enquête explore à quelles conditions il est possible de définir une approche scientifique de ce type de problème public défini par les administrations. Positionnée à la frontière entre champ scientifique et expertise d’État, l’équipe doit mener un travail de déconstruction du problème public par l’étude critique de la genèse et de l’usage des catégories bureaucratiques qui sont à son principe. L’article souligne ainsi le poids, dans la « recherche orientée », d’influences peu visibles et répandues, moins souvent analysées que les pressions directes exercées sur les chercheurs.
This paper describes how a research team in social science approached the institutionally constructed problem of “indoor air quality.” Based on the analysis of a call for proposals, the scientists’ responses and their interactions with the funding institutions, the investigation explores how it was possible to develop a scientific approach of this type of public problem defined by administrations. Positioned between the scientific field and state expertise, the team must deconstruct the public problem and proceed to a critical analysis of the production and uses of the bureaucratic categories at its origin. The article thus underlines the importance of invisible and routinized influences in “oriented research” which, compared to direct pressures exerted on researchers, are less analyzed.
Politiques de communication, 2016
Since the mid-1990s, the issue of indoor air pollution has discreetly made its way onto French po... more Since the mid-1990s, the issue of indoor air pollution has discreetly made its way onto French political and media agendas. Confined to the periphery of the highly-competitive public health problem market, the issue of the long-term exposure of inhabitants to household pollutants receives little media coverage, and even that is predominantly didactic and educational in nature. Covered by non-specialist and occasional journalists, the problem generally appears in sections of secondary importance from a journalistic point of view. The current article analyses the social conditions of the media confinement of this issue, paradoxically described by some analysts as a “sanitary scourge” that may play a role in a worrying epidemic of chronic diseases. This inquiry into the career taken by the indoor air problem in French media between 1995 and 2015 is based on the analysis of a corpus of written and audiovisual publications (n=746) and a campaign of interviews with journalists and communicators having worked to publicize this issue (n=16). Data provides us with a better understanding of the mechanisms ensuring that media exposure of this problem to the public remains tightly controlled: on the one hand, the unequal relationships between journalists and their sources which helps reduce their role to that of mere relayers of public health policy, and on the other, the specific dynamics at work within the journalistic field. These include transformations in the conditions of information production and the work of journalists in a context of reinforced economic pressures and the rising influence of public communication.
Savoir/Agir, 2018
Introduction d'un dossier thématique portant sur la critique sociologique du journalisme (revue S... more Introduction d'un dossier thématique portant sur la critique sociologique du journalisme (revue Savoir/Agir, n°46) Cet article fait un point sur les structures sociales du journalisme en posant l’hypothèse d’une double recomposition de ce champ depuis une dizaine d’années : d’un côté, la poursuite et l’intensification de l’emprise du pôle commercial sur les pôles culturels et politiques, ces derniers voyant leur pouvoir de structuration s’affaiblir ; d’un autre, une verticalisation de la distribution des positions journalistiques avec une accentuation des écarts entre dominants et dominés. Le champ journalistique constitue ainsi un espace stratégique dans les luttes pour la distribution sociale des blâmes et des privilèges. Si l’hégémonie qu’y exerce le pouvoir économique résulte des rapports de pouvoir entre les classes sociales, elle ne peut pas, en retour, être sans incidences sur le rendement différencié des divers types de capitaux, donc sur les hiérarchies matérielles et symbolique qui structurent la société dans son ensemble.
Biens Symboliques, 2018
La recherche française contemporaine sur le journalisme suit deux tendances principales : une ins... more La recherche française contemporaine sur le journalisme suit deux tendances principales : une institutionnalisation sur le modèle des journalism studies aux États-Unis et un usage routinier d’analyses de contenus, peu ajustées aux exigences du métier de sociologue à partir du moment où elles s’autonomisent des méthodes d’enquête principales de la discipline. Dans ce contexte, cet article plaide pour une réinscription des données empiriques produites sur le journalisme dans une sociologie de la production des biens symboliques, et, au-delà, dans une théorie générale du social. Plus spécifiquement, les auteurs proposent un programme de recherche articulé autour d’une cartographie du champ journalistique et de l’analyse de ses relations avec les autres composantes du champ du pouvoir.
Contemporary French research on journalism follows two main trends : institutionalisation according to the model of “journalism studies” in the United States, and a routine use of content analysis. These techniques are not well suited to the needs of sociologists, given that they are increasingly removed from the discipline’s primary methods of investigation. In this context, this article advocates for the empirical data produced on journalism to be re-situated within a sociology of the production of symbolic goods, and beyond that within general sociological theory. More specifically, the authors propose a research program that is structured around the mapping of the journalistic field and the analysis of its relations with other components of the field of power.
La investigación francesa contemporánea sobre el periodismo sigue dos principales tendencias : una institucionalización según el modelo de los Journalism studies estadounidenses y un uso rutinario del análisis de contenido, poco adaptado a las exigencias del oficio de sociólogo/a, a partir del momento en que éstas se autonomizan de los principales métodos de investigación de la disciplina. En este contexto, este articulo aboga por una reinscripción de los datos empíricos producidos sobre el periodismo en una sociología de la producción de bienes simbólicos y, mas allá, en una teoría social general. Más específicamente, los autores proponen un programa de investigación articulado en torno a una cartografía del campo periodístico y del análisis de us relaciones con los otros componentes del campo del poder.
Este artículo propone una reflexión crítica sobre algunas de las tensiones que se pueden encontra... more Este artículo propone una reflexión crítica sobre algunas de las tensiones que se pueden encontrar en la corriente académica de la “Comunicación para el cambio social”, así como pistas para superarlas.
Inspirándose en enfoques de sociología política, se identifican tres mecanismos generadores de polarización: la tendencia de los investigadores a comprender su objeto de estudio a partir de categorías militantes; el proceso de especialización de la investigación que lleva a considerar a los “medios alternativos y comunitarios” como autónomos y universalmente comparables; y la creencia en el poder de los medios de comunicación y sus efectos sociales. El artículo plantea que los científicos que estudian este activismo orientado hacia los medios forman parte de un campo de producción cultural especializado (Bourdieu). Defendemos la idea de que desarrollar una sociología política de este campo aportaría mucho a la comprensión y al análisis de sus lógicas de funcionamiento, con beneficios tanto científicos como políticos.
Depuis le milieu des années 1990, la question de la pollution de l'air dans les lieux d'habitatio... more Depuis le milieu des années 1990, la question de la pollution de l'air dans les lieux d'habitation s'est introduite en toute discrétion dans l'agenda politique et médiatique français. Confiné en périphérie du marché hautement concurrentiel des problèmes de santé publique, dominé par des « scandales » comme celui de l'amiante, le problème de l'exposition prolongée des habitants aux polluants domestiques fait l'objet d'un traitement médiatique relativement faible qui relève pour l'essentiel du registre didactique ou pédagogique. Pris en charge par des journalistes non spécialisés et occasionnels, le problème échoue généralement dans des rubriques qui, d'un point de vue journalistique, occupent des places secondaires (santé, environnement, bien-être, maison). Le présent article s'attache à rendre compte des conditions sociales du confinement médiatique de cet enjeu, pourtant décrit par certains comme un « fléau sanitaire » participant d'une inquiétante épidémie de maladies chroniques. Cette enquête sur la carrière du problème de l'air intérieur dans la presse française entre 1995 et 2015 repose sur l'analyse d'un corpus de publications écrites et audiovisuelles (n=746) et une campagne d'entretiens auprès de journalistes et de « communicants » ayant travaillé à publiciser cet enjeu (n=16). L'analyse des données permet de saisir quelques-uns des mécanismes qui assurent l'exposition médiatique contrôlée des publics à ce problème : d'une part, les rapports inégaux entre les journalistes et leurs sources (scientifiques, institutionnelles, administratives, politiques, etc.), qui contribuent à les entretenir dans un rôle de relais des politiques sanitaires ; d'autre part, des tendances propres au champ journalistique, telles que les transformations des conditions de production de l'information et de travail des journalistes dans un contexte de renforcement des logiques économiques et de montée en puissance d'une communication institutionnelle elle-même soumise à la contrainte médiatique.
Since the mid-1990s, the issue of indoor air pollution discreetly broke into the French political and media agendas. Confined to the periphery of the highly competitive market of public health problems, dominated by « scandals » such as the asbestos one, the problem of the long-term exposure of inhabitants to household pollutants is the subject of a relatively weak media coverage dominated with a didactic and pedagogical tone. Covered by non-specialist and occasional journalists, the problem generally appears in second-row sections from a journalistic point of view (health, environment, well-being, house issues). The current article analyses the social conditions of the media confinement of this problem, paradoxically described by some analysts as a « sanitary scourge » which may participate to a worrying epidemic of chronic diseases. This inquiry on the career of indoor air problem in French media between 1995 and 2015 is based on the analysis of a corpus of written and audiovisual publications (n=746) and a campaign of interviews with journalists and communicators who worked to publicize this issue (n=16). Data allows a better understanding of the mechanisms which ensure a controlled media exposure of the public to this problem: on the one hand, the unequal relationships between the journalists and their sources (scientists, institutions, agencies, political decision-makers) which contribute to keep them in the role of mere relays of the sanitary public policies ; on the other hand, specific dynamics within the journalistic field, such as the transformations in the conditions of production of information and the work of journalists in a context of reinforcement of economic pressures and the increasing influence of public communication, itself under media coercion.
À partir d’une enquête centrée sur l’histoire et les acteurs de la "Coordination Permanente des M... more À partir d’une enquête centrée sur l’histoire et les acteurs de la "Coordination Permanente des Médias Libres", cet article entend fournir
des éléments de compréhension sociologique des mécanismes de polarisation et de reproduction du mouvement
des « médias alternatifs » en France. Comment se structure et de quelle
autonomie jouit cet espace de relations qui tend à rétribuer la dissidence et à sanctionner la doxa ? Quelles sont les propriétés sociales des agents qui parviennent à s’y inscrire durablement ?
Media, Culture & Society, 2014
In January 1994 the Zapatista movement in southern Mexico inaugurated a new era of media use for ... more In January 1994 the Zapatista movement in southern Mexico inaugurated a new era of media use for dissent. Since that time, an array of dissenting collectives and individuals have appropriated media technologies in order to make their voices heard or to articulate alternative identities. From Zapatista media to the Arab Spring, social movements throughout the world are taking over, hybridizing, recycling, and adapting media technologies. This new era poses a new set of challenges for academics and researchers in the field of Communication for Social Change (CfSC). Based on examples from Mexico, Lebanon, and Colombia, this article highlights and discusses four such research challenges: accounting for historical context; acknowledging the complexity of communication processes; anchoring analysis in a political economy of information and communication technologies; and positioning new research in relation to existing knowledge and literature within the field of communication and social change.
Revue internationale de politique comparée, 2012
Ferron Benjamin, « Les troubles du langage sociologique dans la comparaison internationale : le c... more Ferron Benjamin, « Les troubles du langage sociologique dans la comparaison internationale : le cas des médias des mouvements sociaux au Chiapas et en Palestine »,
Pôle Sud, 2009
L’Organisation Socialiste Israélienne (OSI) est un groupuscule militant israélien d’extrême gauch... more L’Organisation Socialiste Israélienne (OSI) est un groupuscule militant israélien d’extrême gauche, fondée en 1962. L’OSI est l’un des premiers mouvements politiques organisés, exprimant publiquement une opposition au projet sioniste en Israël. Connue sous le nom de son journal, Matzpen, cette organisation fait l’objet, après la Guerre des Six Jours (1967), d’une véritable « chasse aux sorcières » dans l’espace public israélien. Les militants de Matzpen s’attaquent en effet de front aux institutions et mythes officiels de l’État israélien. L’article étudie, à partir du « modèle du boomerang » de Keck et Sikkink, comment le mouvement se transnationalise pour faire face à ce contexte domestique hostile, en exportant sa cause à l’étranger, en particulier aux États-Unis, en Europe et dans le monde arabe, dans le contexte d’émergence de la « nouvelle gauche » à la fin des années 1960 et au début des années 1970.
The Israeli Socialist Organization (ISO) is a small left-wing Israeli activist group, founded in 1962. The ISO is one of the first organized political movement, publicly expressing an opposition to the Zionist project in Israel. Known by the name of its newspaper, Matzpen, this organization faces a real «witch hunt» in the Israeli public sphere. Indeed, the activists from Matzpen directly attack the official institutions and myths at the heart of the Israeli State. Using the «boomerang pattern» proposed by Keck and Sikkink, the article studies the transnationalization of this movement as a strategy of exportation of the cause, in order to by-pass this hostile domestic context. It specifically studies this process in the United States, in Europe and in the Arab World, in a context of emergence of the «New Left» at the end of the 1960’s and the beginning of the 1970’s.
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Books by Benjamin Ferron
Pour répondre à ces questions, ce manuel propose une synthèse des recherches sur la médiatisation des mouvements sociaux et les stratégies d’information et de communication des organisations protestataires. Ces stratégies renvoient à l'ensemble des pratiques journalistiques, militantes et citoyennes qui contribuent à donner sens, publiciser et politiser les activités et revendications de groupes d’intérêt tels que les partis d’opposition, les syndicats de travailleurs, les associations et ONG, les collectifs militants informels ou les réseaux d’activistes. Qu'il s'agisse de mobiliser le corps et les émotions des militants, de prendre la parole en public, de faire un usage stratégique de dispositifs d’information, de produire un discours collectif, d'accéder aux médias de grande diffusion et d’en séduire les journalistes, ou de créer des réseaux d’information et de communication indépendants en ligne, le répertoire de communication des mouvements sociaux inclut des moyens diversifiés. Un livre indispensable pour comprendre les nouvelles pratiques militantes qui contribuent à politiser les discours sur les médias et le journalisme et à reconfigurer les règles du jeu politique.
Benjamin Ferron, Émilie Née et Claire Oger sont enseignants-chercheurs au Centre d'étude des discours, images, textes, écrits, communications (Céditec) de l'université Paris-Est Créteil.
L'usage des « réseaux sociaux » par des mouvements protestataires récents (du « Printemps arabe » aux « Indignados ») a suscité un déferlement d'analyses et de commentaires soulignant les vertus intrinsèquement démocratiques des « nouvelles technologies de l'information et de la communication ». La thèse de la « démocratisation 2.0. » souffre cependant d'un déterminisme technologique qui va généralement de pair avec un oubli des conditions sociales et historiques de possibilité de ces pratiques militantes.
L'étude de Benjamin Ferron propose de revenir sur les stratégies politiques et médiatiques d'un réseau transnational de militants, le zapatisme mexicain, souvent considéré, après son émergence en 1994, comme le principal initiateur des mobilisations altermondialistes qui ont marqué les années 1990 et 2000. L'auteur compare les stratégies déployées par les militants de ce réseau pour construire publiquement une cause « globale » centrée sur la lutte contre la mondialisation néolibérale et, progressivement, le problème de la démocratisation des médias au Mexique et dans le monde. Comment les acteurs du réseau zapatiste sont-ils parvenus à construire et diffuser un discours de lutte contre le néolibéralisme auprès de publics géographiquement et politiquement très hétérogènes qui les ont érigés en emblème de « l'autre mondialisation » ? Comment et pourquoi la question des médias a-t-elle été inscrite dans l'agenda politique de nombre d'organisations militantes qui le composent, au point de constituer la principale activité d'une partie d'entre elles ?
Optant pour une sociologie constructiviste des problèmes publics, l'étude rend compte au plus près des mécanismes de la circulation transnationale du zapatisme et de ses acteurs. Elle montre que la convergence partielle des cadres de mobilisation collective est le produit d’une série de choix tactiques et de contraintes intériorisées favorisant, chez les militants et sympathisants de l'Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN), la production de discours contestataires relativement indépendants de leurs conditions sociales de production.
Critique parue dans Le Monde Diplomatique (septembre 2015) : "Tiré de sa thèse de doctorat, le livre de Benjamin Ferron revient sur les stratégies politiques et médiatiques du néozapatisme mexicain, considéré comme l’un des précurseurs de la mouvance altermondialiste à l’orée des années 2000. Mobilisant une sociologie constructiviste des problèmes publics, s’appuyant sur un matériau empirique et une littérature très denses, l’auteur analyse la structuration d’un réseau transnational de militants autour de l’édification d’une cause globale : la lutte contre le néolibéralisme. L’examen du répertoire du zapatisme met en évidence « la corrélation négative entre l’évolution de sa couverture médiatique et l’investissement des militants dans des réseaux de “médias alternatifs” ». Loin du « rapport amoureux à l’objet » qui caractérise trop souvent nombre de publications sur ce phénomène, cet essai est un outil précieux pour comprendre le rôle joué par les médias dans l’internationalisation des mouvements contestataires" (Nils Solari).
Les pratiques amateur, foisonnantes et hétéroclites, restent largement méconnues, en particulier dans le domaine des médias et du journalisme, alors qu’elles représentent bien souvent une part importante des activités culturelles et sociales. Les recompositions récentes de l’espace public médiatique ont fait émerger la figure du « journaliste amateur », tantôt perçu comme le fossoyeur du journalisme professionnel, tantôt célébré comme un agent de démocratisation de l’expression publique. Cette publication entend faire avancer les connaissances empiriques et la réflexion théorique sur ce « journalisme amateur » et les pratiques de diffusion des passions culturelles ordinaires par les médias. Les relations entre espaces amateurs et espaces professionnels, les médiations techniques et sociales des pratiques amateur, les conditions et les effets de leur inscription dans la durée, constituent autant de points d’entrée privilégiés sur le matériau empirique diversifié de l’ouvrage : les publications alternatives en Tchécoslovaquie, un réseau de médias libres à Mexico, les correspondant locaux d’un titre de presse quotidienne régionale, une entreprise de production de logiciels éducatifs, ou encore des blogs musicaux, de cinéma ou de bande dessinée. À rebours des discours normatifs dont le « journalisme amateur » est le plus souvent l'objet dans des débats publics récurrents, les analyses proposées ici s’appuient sur l’étude fine des individus et des groupes considérés, ainsi que des données de cadrage pour articuler étroitement l’étude des relations entre champs professionnels et espaces amateur, d’une part, et entre les sujets et les objets de leur passion politiques ou culturelles, d’autre part.
Papers by Benjamin Ferron
Appréhender la « communication » comme un champ faiblement autonome - il ne s’agit en rien d’un « corps » professionnel unifié -, exerçant des effets plus ou moins forts d’attraction et de répulsion sur d’autres univers, engendrant ainsi des effets structuraux sur les pratiques, croyances et hiérarchies, permet de souligner les processus qui concourent à construire et maintenir des frontières entre « experts », « spécialistes », « clients » et « profanes ». L’espace des professionnels de la communication semble ainsi devoir être analysé comme un champ « à forte dispersion » : les articles réunis dans le numéro thématique tendent en effet à montrer l’existence d’une forme de concentration polycentrique des capitaux professionnels spécifiques susceptibles d’agir sur le champ de la communication. La reconnaissance professionnelle des « communicants » est liée à leur capacité à acquérir et mobiliser des combinaisons très singulières de capitaux, qui permettent à certains agents (grandes agences, institutions ou organisations à fort capital économique et symbolique) d’occuper des positions dominantes au sein de sous-champs définis par la spécialisation sur des pratiques différenciées (la communication publique n’est pas la communication publicitaire, etc.).
Afin d’éviter les généralités, la question de l’emprise de la communication ne peut donc être posée que de façon contextualisée, champ par champ. La conclusion à laquelle nous arrivons est celle d’une emprise variable, en intensité comme dans ses modalités, à l’échelle des espaces sociaux spécifiques où elle est susceptible d’exercer – ou non – des effets, en fonction des combinaisons spécifiques de capitaux que les agents peuvent mobiliser dans leur travail de légitimation des activités identifiées comme relevant de « la communication ».
This article is an open access article distributed under the terms and conditions of the Creative Commons Attribution (CC BY
This paper describes how a research team in social science approached the institutionally constructed problem of “indoor air quality.” Based on the analysis of a call for proposals, the scientists’ responses and their interactions with the funding institutions, the investigation explores how it was possible to develop a scientific approach of this type of public problem defined by administrations. Positioned between the scientific field and state expertise, the team must deconstruct the public problem and proceed to a critical analysis of the production and uses of the bureaucratic categories at its origin. The article thus underlines the importance of invisible and routinized influences in “oriented research” which, compared to direct pressures exerted on researchers, are less analyzed.
Contemporary French research on journalism follows two main trends : institutionalisation according to the model of “journalism studies” in the United States, and a routine use of content analysis. These techniques are not well suited to the needs of sociologists, given that they are increasingly removed from the discipline’s primary methods of investigation. In this context, this article advocates for the empirical data produced on journalism to be re-situated within a sociology of the production of symbolic goods, and beyond that within general sociological theory. More specifically, the authors propose a research program that is structured around the mapping of the journalistic field and the analysis of its relations with other components of the field of power.
La investigación francesa contemporánea sobre el periodismo sigue dos principales tendencias : una institucionalización según el modelo de los Journalism studies estadounidenses y un uso rutinario del análisis de contenido, poco adaptado a las exigencias del oficio de sociólogo/a, a partir del momento en que éstas se autonomizan de los principales métodos de investigación de la disciplina. En este contexto, este articulo aboga por una reinscripción de los datos empíricos producidos sobre el periodismo en una sociología de la producción de bienes simbólicos y, mas allá, en una teoría social general. Más específicamente, los autores proponen un programa de investigación articulado en torno a una cartografía del campo periodístico y del análisis de us relaciones con los otros componentes del campo del poder.
Inspirándose en enfoques de sociología política, se identifican tres mecanismos generadores de polarización: la tendencia de los investigadores a comprender su objeto de estudio a partir de categorías militantes; el proceso de especialización de la investigación que lleva a considerar a los “medios alternativos y comunitarios” como autónomos y universalmente comparables; y la creencia en el poder de los medios de comunicación y sus efectos sociales. El artículo plantea que los científicos que estudian este activismo orientado hacia los medios forman parte de un campo de producción cultural especializado (Bourdieu). Defendemos la idea de que desarrollar una sociología política de este campo aportaría mucho a la comprensión y al análisis de sus lógicas de funcionamiento, con beneficios tanto científicos como políticos.
Since the mid-1990s, the issue of indoor air pollution discreetly broke into the French political and media agendas. Confined to the periphery of the highly competitive market of public health problems, dominated by « scandals » such as the asbestos one, the problem of the long-term exposure of inhabitants to household pollutants is the subject of a relatively weak media coverage dominated with a didactic and pedagogical tone. Covered by non-specialist and occasional journalists, the problem generally appears in second-row sections from a journalistic point of view (health, environment, well-being, house issues). The current article analyses the social conditions of the media confinement of this problem, paradoxically described by some analysts as a « sanitary scourge » which may participate to a worrying epidemic of chronic diseases. This inquiry on the career of indoor air problem in French media between 1995 and 2015 is based on the analysis of a corpus of written and audiovisual publications (n=746) and a campaign of interviews with journalists and communicators who worked to publicize this issue (n=16). Data allows a better understanding of the mechanisms which ensure a controlled media exposure of the public to this problem: on the one hand, the unequal relationships between the journalists and their sources (scientists, institutions, agencies, political decision-makers) which contribute to keep them in the role of mere relays of the sanitary public policies ; on the other hand, specific dynamics within the journalistic field, such as the transformations in the conditions of production of information and the work of journalists in a context of reinforcement of economic pressures and the increasing influence of public communication, itself under media coercion.
des éléments de compréhension sociologique des mécanismes de polarisation et de reproduction du mouvement
des « médias alternatifs » en France. Comment se structure et de quelle
autonomie jouit cet espace de relations qui tend à rétribuer la dissidence et à sanctionner la doxa ? Quelles sont les propriétés sociales des agents qui parviennent à s’y inscrire durablement ?
The Israeli Socialist Organization (ISO) is a small left-wing Israeli activist group, founded in 1962. The ISO is one of the first organized political movement, publicly expressing an opposition to the Zionist project in Israel. Known by the name of its newspaper, Matzpen, this organization faces a real «witch hunt» in the Israeli public sphere. Indeed, the activists from Matzpen directly attack the official institutions and myths at the heart of the Israeli State. Using the «boomerang pattern» proposed by Keck and Sikkink, the article studies the transnationalization of this movement as a strategy of exportation of the cause, in order to by-pass this hostile domestic context. It specifically studies this process in the United States, in Europe and in the Arab World, in a context of emergence of the «New Left» at the end of the 1960’s and the beginning of the 1970’s.
Pour répondre à ces questions, ce manuel propose une synthèse des recherches sur la médiatisation des mouvements sociaux et les stratégies d’information et de communication des organisations protestataires. Ces stratégies renvoient à l'ensemble des pratiques journalistiques, militantes et citoyennes qui contribuent à donner sens, publiciser et politiser les activités et revendications de groupes d’intérêt tels que les partis d’opposition, les syndicats de travailleurs, les associations et ONG, les collectifs militants informels ou les réseaux d’activistes. Qu'il s'agisse de mobiliser le corps et les émotions des militants, de prendre la parole en public, de faire un usage stratégique de dispositifs d’information, de produire un discours collectif, d'accéder aux médias de grande diffusion et d’en séduire les journalistes, ou de créer des réseaux d’information et de communication indépendants en ligne, le répertoire de communication des mouvements sociaux inclut des moyens diversifiés. Un livre indispensable pour comprendre les nouvelles pratiques militantes qui contribuent à politiser les discours sur les médias et le journalisme et à reconfigurer les règles du jeu politique.
Benjamin Ferron, Émilie Née et Claire Oger sont enseignants-chercheurs au Centre d'étude des discours, images, textes, écrits, communications (Céditec) de l'université Paris-Est Créteil.
L'usage des « réseaux sociaux » par des mouvements protestataires récents (du « Printemps arabe » aux « Indignados ») a suscité un déferlement d'analyses et de commentaires soulignant les vertus intrinsèquement démocratiques des « nouvelles technologies de l'information et de la communication ». La thèse de la « démocratisation 2.0. » souffre cependant d'un déterminisme technologique qui va généralement de pair avec un oubli des conditions sociales et historiques de possibilité de ces pratiques militantes.
L'étude de Benjamin Ferron propose de revenir sur les stratégies politiques et médiatiques d'un réseau transnational de militants, le zapatisme mexicain, souvent considéré, après son émergence en 1994, comme le principal initiateur des mobilisations altermondialistes qui ont marqué les années 1990 et 2000. L'auteur compare les stratégies déployées par les militants de ce réseau pour construire publiquement une cause « globale » centrée sur la lutte contre la mondialisation néolibérale et, progressivement, le problème de la démocratisation des médias au Mexique et dans le monde. Comment les acteurs du réseau zapatiste sont-ils parvenus à construire et diffuser un discours de lutte contre le néolibéralisme auprès de publics géographiquement et politiquement très hétérogènes qui les ont érigés en emblème de « l'autre mondialisation » ? Comment et pourquoi la question des médias a-t-elle été inscrite dans l'agenda politique de nombre d'organisations militantes qui le composent, au point de constituer la principale activité d'une partie d'entre elles ?
Optant pour une sociologie constructiviste des problèmes publics, l'étude rend compte au plus près des mécanismes de la circulation transnationale du zapatisme et de ses acteurs. Elle montre que la convergence partielle des cadres de mobilisation collective est le produit d’une série de choix tactiques et de contraintes intériorisées favorisant, chez les militants et sympathisants de l'Armée Zapatiste de Libération Nationale (EZLN), la production de discours contestataires relativement indépendants de leurs conditions sociales de production.
Critique parue dans Le Monde Diplomatique (septembre 2015) : "Tiré de sa thèse de doctorat, le livre de Benjamin Ferron revient sur les stratégies politiques et médiatiques du néozapatisme mexicain, considéré comme l’un des précurseurs de la mouvance altermondialiste à l’orée des années 2000. Mobilisant une sociologie constructiviste des problèmes publics, s’appuyant sur un matériau empirique et une littérature très denses, l’auteur analyse la structuration d’un réseau transnational de militants autour de l’édification d’une cause globale : la lutte contre le néolibéralisme. L’examen du répertoire du zapatisme met en évidence « la corrélation négative entre l’évolution de sa couverture médiatique et l’investissement des militants dans des réseaux de “médias alternatifs” ». Loin du « rapport amoureux à l’objet » qui caractérise trop souvent nombre de publications sur ce phénomène, cet essai est un outil précieux pour comprendre le rôle joué par les médias dans l’internationalisation des mouvements contestataires" (Nils Solari).
Les pratiques amateur, foisonnantes et hétéroclites, restent largement méconnues, en particulier dans le domaine des médias et du journalisme, alors qu’elles représentent bien souvent une part importante des activités culturelles et sociales. Les recompositions récentes de l’espace public médiatique ont fait émerger la figure du « journaliste amateur », tantôt perçu comme le fossoyeur du journalisme professionnel, tantôt célébré comme un agent de démocratisation de l’expression publique. Cette publication entend faire avancer les connaissances empiriques et la réflexion théorique sur ce « journalisme amateur » et les pratiques de diffusion des passions culturelles ordinaires par les médias. Les relations entre espaces amateurs et espaces professionnels, les médiations techniques et sociales des pratiques amateur, les conditions et les effets de leur inscription dans la durée, constituent autant de points d’entrée privilégiés sur le matériau empirique diversifié de l’ouvrage : les publications alternatives en Tchécoslovaquie, un réseau de médias libres à Mexico, les correspondant locaux d’un titre de presse quotidienne régionale, une entreprise de production de logiciels éducatifs, ou encore des blogs musicaux, de cinéma ou de bande dessinée. À rebours des discours normatifs dont le « journalisme amateur » est le plus souvent l'objet dans des débats publics récurrents, les analyses proposées ici s’appuient sur l’étude fine des individus et des groupes considérés, ainsi que des données de cadrage pour articuler étroitement l’étude des relations entre champs professionnels et espaces amateur, d’une part, et entre les sujets et les objets de leur passion politiques ou culturelles, d’autre part.
Appréhender la « communication » comme un champ faiblement autonome - il ne s’agit en rien d’un « corps » professionnel unifié -, exerçant des effets plus ou moins forts d’attraction et de répulsion sur d’autres univers, engendrant ainsi des effets structuraux sur les pratiques, croyances et hiérarchies, permet de souligner les processus qui concourent à construire et maintenir des frontières entre « experts », « spécialistes », « clients » et « profanes ». L’espace des professionnels de la communication semble ainsi devoir être analysé comme un champ « à forte dispersion » : les articles réunis dans le numéro thématique tendent en effet à montrer l’existence d’une forme de concentration polycentrique des capitaux professionnels spécifiques susceptibles d’agir sur le champ de la communication. La reconnaissance professionnelle des « communicants » est liée à leur capacité à acquérir et mobiliser des combinaisons très singulières de capitaux, qui permettent à certains agents (grandes agences, institutions ou organisations à fort capital économique et symbolique) d’occuper des positions dominantes au sein de sous-champs définis par la spécialisation sur des pratiques différenciées (la communication publique n’est pas la communication publicitaire, etc.).
Afin d’éviter les généralités, la question de l’emprise de la communication ne peut donc être posée que de façon contextualisée, champ par champ. La conclusion à laquelle nous arrivons est celle d’une emprise variable, en intensité comme dans ses modalités, à l’échelle des espaces sociaux spécifiques où elle est susceptible d’exercer – ou non – des effets, en fonction des combinaisons spécifiques de capitaux que les agents peuvent mobiliser dans leur travail de légitimation des activités identifiées comme relevant de « la communication ».
This article is an open access article distributed under the terms and conditions of the Creative Commons Attribution (CC BY
This paper describes how a research team in social science approached the institutionally constructed problem of “indoor air quality.” Based on the analysis of a call for proposals, the scientists’ responses and their interactions with the funding institutions, the investigation explores how it was possible to develop a scientific approach of this type of public problem defined by administrations. Positioned between the scientific field and state expertise, the team must deconstruct the public problem and proceed to a critical analysis of the production and uses of the bureaucratic categories at its origin. The article thus underlines the importance of invisible and routinized influences in “oriented research” which, compared to direct pressures exerted on researchers, are less analyzed.
Contemporary French research on journalism follows two main trends : institutionalisation according to the model of “journalism studies” in the United States, and a routine use of content analysis. These techniques are not well suited to the needs of sociologists, given that they are increasingly removed from the discipline’s primary methods of investigation. In this context, this article advocates for the empirical data produced on journalism to be re-situated within a sociology of the production of symbolic goods, and beyond that within general sociological theory. More specifically, the authors propose a research program that is structured around the mapping of the journalistic field and the analysis of its relations with other components of the field of power.
La investigación francesa contemporánea sobre el periodismo sigue dos principales tendencias : una institucionalización según el modelo de los Journalism studies estadounidenses y un uso rutinario del análisis de contenido, poco adaptado a las exigencias del oficio de sociólogo/a, a partir del momento en que éstas se autonomizan de los principales métodos de investigación de la disciplina. En este contexto, este articulo aboga por una reinscripción de los datos empíricos producidos sobre el periodismo en una sociología de la producción de bienes simbólicos y, mas allá, en una teoría social general. Más específicamente, los autores proponen un programa de investigación articulado en torno a una cartografía del campo periodístico y del análisis de us relaciones con los otros componentes del campo del poder.
Inspirándose en enfoques de sociología política, se identifican tres mecanismos generadores de polarización: la tendencia de los investigadores a comprender su objeto de estudio a partir de categorías militantes; el proceso de especialización de la investigación que lleva a considerar a los “medios alternativos y comunitarios” como autónomos y universalmente comparables; y la creencia en el poder de los medios de comunicación y sus efectos sociales. El artículo plantea que los científicos que estudian este activismo orientado hacia los medios forman parte de un campo de producción cultural especializado (Bourdieu). Defendemos la idea de que desarrollar una sociología política de este campo aportaría mucho a la comprensión y al análisis de sus lógicas de funcionamiento, con beneficios tanto científicos como políticos.
Since the mid-1990s, the issue of indoor air pollution discreetly broke into the French political and media agendas. Confined to the periphery of the highly competitive market of public health problems, dominated by « scandals » such as the asbestos one, the problem of the long-term exposure of inhabitants to household pollutants is the subject of a relatively weak media coverage dominated with a didactic and pedagogical tone. Covered by non-specialist and occasional journalists, the problem generally appears in second-row sections from a journalistic point of view (health, environment, well-being, house issues). The current article analyses the social conditions of the media confinement of this problem, paradoxically described by some analysts as a « sanitary scourge » which may participate to a worrying epidemic of chronic diseases. This inquiry on the career of indoor air problem in French media between 1995 and 2015 is based on the analysis of a corpus of written and audiovisual publications (n=746) and a campaign of interviews with journalists and communicators who worked to publicize this issue (n=16). Data allows a better understanding of the mechanisms which ensure a controlled media exposure of the public to this problem: on the one hand, the unequal relationships between the journalists and their sources (scientists, institutions, agencies, political decision-makers) which contribute to keep them in the role of mere relays of the sanitary public policies ; on the other hand, specific dynamics within the journalistic field, such as the transformations in the conditions of production of information and the work of journalists in a context of reinforcement of economic pressures and the increasing influence of public communication, itself under media coercion.
des éléments de compréhension sociologique des mécanismes de polarisation et de reproduction du mouvement
des « médias alternatifs » en France. Comment se structure et de quelle
autonomie jouit cet espace de relations qui tend à rétribuer la dissidence et à sanctionner la doxa ? Quelles sont les propriétés sociales des agents qui parviennent à s’y inscrire durablement ?
The Israeli Socialist Organization (ISO) is a small left-wing Israeli activist group, founded in 1962. The ISO is one of the first organized political movement, publicly expressing an opposition to the Zionist project in Israel. Known by the name of its newspaper, Matzpen, this organization faces a real «witch hunt» in the Israeli public sphere. Indeed, the activists from Matzpen directly attack the official institutions and myths at the heart of the Israeli State. Using the «boomerang pattern» proposed by Keck and Sikkink, the article studies the transnationalization of this movement as a strategy of exportation of the cause, in order to by-pass this hostile domestic context. It specifically studies this process in the United States, in Europe and in the Arab World, in a context of emergence of the «New Left» at the end of the 1960’s and the beginning of the 1970’s.
La question de l’articulation entre construction symbolique et dimension structurelle se pose si l’on veut rendre compte de la façon dont les problèmes publics émergent ou changent de propriétaire dans le temps. Comprendre comment s’opèrent l’appropriation d’un problème public et ses évolutions suppose de s’intéresser aux caractéristiques, ressources et positions dans la structure sociale de ses propriétaires initiaux et de ceux qui leur succèdent le cas échéant. C’est précisément ce que fait Gusfield, qui porte attention à la stratification sociale ou aux mutations structurelles de l’État-providence. Pour saisir ces évolutions de moyen ou long terme, il souligne l’importance des « relations structurelles » entre groupes sociaux ou professions, comme complément d’une approche définitionnelle et culturelle des problèmes publics.
Cette grille d’analyse combinée est apparue particulièrement pertinente à notre équipe de recherche lorsque nous avons étudié la genèse et l’imposition d’un problème public récent, la « qualité de l’air intérieur » défini comme l’exposition des populations à des substances dangereuses pour la santé en espace confiné - domiciles privés ou lieux publics, hors cadre professionnel. Celui-ci se caractérise par une appropriation relativement rapide, en l’espace de deux décennies, par des intervenants publics proches du secteur économique du bâtiment et de la construction. Alors qu’elle est à peine explorée par les milieux techniques spécialisés au début des années 1990, cette thématique prend une forme institutionnelle au début des années 2000. Cette imposition rapide d’une définition dominante est d’autant plus frappante qu’elle vise la sphère privée (le foyer domestique, l’appartement ou la maison individuelle) dans laquelle l’intervention collective ne va pas de soi.
This chapter offers a reexamination of the media repertoire of the Zapatistas to understand how and why media has been so central in the political agenda of Zapatista activist networks. Zapatismo owes some of its international fame to its media communication repertoire, as the conflict played out on the battlefield as well as in the news media and on the Internet. Our hypothesis is that the transnational movement’s media strategies significantly helped the Zapatista “text” circulate out of its “context,” contributing to the production of a universalist political discourse relatively independent of its social conditions of production.
"In his chapter, Benjamin Ferron investigates how much importance researchers should attribute to non-specialist field actors’ understanding when it comes to formulating their survey problematic. Drawing on his own comparative research on pro-Palestinian anti-globalist movements and the Zapatistas in Mexico, he shows how shaping a research problem in the social sciences may require distancing oneself from the highly politicized, strategic view that militant actors have of the research topic (in this case by integrating particular conflicts into a more general denunciation of neoliberalism). For the author, this difficulty proved useful and productive in that this problem became the very subject of his research. He therefore shows how a methodological difficulty can help shape a line of questioning that is central to the research, through the dual labour of distancing oneself from the problem as imposed by the field and describing and exposing actor strategies" (https://www.cairn-int.info/article-E_POPU_1602_0401--christine-guionnet-and-sophie-retif.htm?DocId=45080&hits=718+717+)
economic power “from below”.
Reviewed : Ingrid Nyström, Patricia Vendramin, Le boycott, Paris, Presses de SciencesPo, 2015, 135 p., 13€.
This thesis compares the strategies deployed by two international solidarity networks – the neo-Zapatista movement, based in Chiapas, Mexico, and the Israel/Palestine anti-occupation movement – to publicly communicate the political causes they espouse in an activist context dominated by the development of global justice frameworks (1994-2006). It seeks to explain how two such politically dissimilar struggles – the rebellion of the indigenous people of Chiapas, the resistance against Israel’s occupation of the Palestinian territories – might have come to be considered, in some political and media arenas, in similar terms to those used to characterise the opposition to “neo-liberal globalisation”; it sets out also to explain how the neo-Zapatista struggle might have come to be more naturally framed as a symbol of the global justice movement rather than as one of resistance to occupation. This study adopts a constructivist approach, closely exploring the practical dynamics of the international circulation of global justice ideas and actors, and is particularly concerned with the role played by activist media in this process. It argues that the partial convergence of collective action frameworks is the result of a series of tactical choices and internalised constraints, which have together favoured the development of discourses of struggle which are relatively independent of their social contexts of production. In order to understand the conditions which have enabled the conferment of a ‘performative’ power on discourses critical of neoliberal globalisation, I undertook fieldwork comprising 76 semi-directive interviews with activists and journalists, a series of observations in “alternative media” centres, and archival work. The comparison of the media repertoires of each network enables the identification of the progressive specialisation of activists in the work of alternative mediatisation. Part I of the thesis focuses on the processes of internationalisation of movement political capital. Part II highlights the existence of a negative correlation between the development of conventional media coverage and activist investment in “alternative media” networks, which may function as spaces of compensation or of symbolic correction. Finally, Part III analyses the material conditions of production, diffusion and institutionalisation of media activism in each of the two networks.
Nous proposons ici de poser les bases d’un cadre analytique qui réponde à cette visée en suivant certaines pistes tracées par Gusfield, depuis ses premiers travaux sur les mouvements de tempérance (Gusfield, 1986) jusqu’à ses réflexions sur les relations entre propriétaires de problèmes publics dans les univers professionnels ou bureaucratiques. Il s’agira ici de revenir sur les sens donnés à la notion de structure : comme cadre organisationnel, institutionnel ou professionnel préexistant, comme stratification sociale ou encore comme rôles et attitudes socialement attendues. Partant de cette réflexion, le cadre proposé tentera d’associer le suivi de la publicisation d’un problème et celui des dynamiques relationnelles entre ses propriétaires : par l’étude au sein de différents espaces sociaux des répartitions inégalitaires de ressources et de capitaux de différents types, l’évolution de leur capacité différentielle à s’approprier (own) un problème et à déposséder (disown) de sa prise en charge d’autres acteurs.
Cette orientation a été suggérée par l'étude empirique d'un problème émergent de santé environnementale, la lutte contre les pollutions de l’air intérieur, qui servira ici de terrain pour mettre à l’épreuve ce cadre. La communication reconstitue la genèse de cette entreprise collective sur le moyen terme (1990-2010) dans deux champs (bureaucratique et médiatique) dans lesquels interviennent des acteurs issus de l’administration, des secteurs économiques du bâtiment et de l’industrie, des mouvements environnementaux et de consommateurs, enfin des milieux techniques et scientifiques.
L’enquête montre la constitution parallèle d’un problème public et d’un groupe d’acteurs dans l’appareil d’État autour de la redéfinition de situations de pollutions de l’espace domestique privé comme enjeu de « qualité de l’air intérieur ». Cette définition devient progressivement dominante dans la sphère publique en s’appuyant sur la création de dispositifs spécifiques (un observatoire statistique ; la fabrication de standards et de normes) et la production de discours relativement routinisés et relayés médiatiquement. Les reconfigurations des champs étudiés expliquent la prédominance progressive de certains cadrages influençant son traitement institutionnel comme médiatique, qui aboutit notamment à une forme de refroidissement des alertes liées aux risques chimiques du quotidien. L’antériorité et la prépondérance de l’État dans ce processus dessinent une carrière de problème public originale par rapport aux processus portés par des mobilisations sociales. Le cadrage et le traitement public se révèlent proches de celui de certains problèmes sociaux évoqués par Gusfield, ou plus récemment de ceux, environnementaux (Comby, Grossetête 2013), où prévalent une conception individualisante, la prise en charge par des professionnels techniques et une forme de dépolitisation.
L’enquête s’appuie sur la participation des auteurs au projet de recherche mentionné, mobilisant les sciences sociales pour étudier le développement de ces « politiques de l’air intérieur ». Dans le cadre de la présente section thématique, l’objectif est d’analyser la conception et les évolutions de notre recherche autour de cet « objet complexe » en explorant deux questions en particulier :
- l’ajustement entre les objectifs scientifiques initiaux et ceux de financeurs orientés vers l’action (un ministère, un organisme de recherche appliqué et une agence de moyen à vocation sectorielle), ainsi que les conditions – institutionnelles, sociales et sémantiques - de leur convergence, notamment par l’analyse croisée de l’appel à projet et de la proposition de recherche.
- les conséquences du travail scientifique, conduisant à déconstruire progressivement l’objet et le cadrage institutionnel initial (« les politiques de l’air intérieur ») tout en produisant des connaissances utiles à l’action - quoique différemment de ce qui était envisagé au point d’origine. Cette déconstruction s’appuie en particulier sur une étude parallèle des discours médiatiques, des mobilisations et des structures de mise en œuvre associés au problème de l’air intérieur.
Ces éléments empiriques nous conduisent à proposer une réponse provisoire à la question de la possible conciliation entre projet scientifique centré sur la compréhension des phénomènes et projet bureaucratique, orienté vers la production de solutions : si cette conciliation reste entravée par le malentendu épistémologique initial, elle est rendue possible par un travail critique sur les catégories de l’entendement bureaucratique mobilisant les apports constructivistes. Toute la difficulté de ce « détour productif » réside toutefois dans la capacité à déconstruire sans les détruire les objets complexes insérés dans la demande institutionnelle de produits de recherche.
Ce résultat sera mis en relation avec les réflexions portant sur la commande publique et ses effets sur les sciences sociales dans d’autres secteurs (social, ville, éducation) en explorant notamment les stratégies, positionnement et apports des enquêtes privilégiant un type d’approche critique.
IMPACT aims at giving to its students (Master 2 & PhD) a critical perspective on how the internationalization of communication, the sharp increase and speeding up of the production of information, and the unprecedent development of digital media, play a role in the way political action, citizens mobilizations and public debates are now be framed.
The following topics will be addressed by several researchers :
Social Networks and Public Debate in Post-Charlie France (Romain Badouard)
Media activism: thinking about production, distribution and circulation (Flor Enghel)
Public Communication & Governmentality (Caroline Ollivier-Yaniv)
Media Systems and Politics in Latin America (Erica Guevara)
Electoral campaigns in the 21th century: web, social media and political communication (Simon Gadras)
The Media Construction of International Issues (Benjamin Ferron)
Social Movement Media and the Construction of Public Debate (Benjamin Ferron)
IMPACT (International Media, Political Action & Communication Technologies) is a 3-weeks program of courses within the UPEC-UPEM Summer School (East-Paris) which aims to provide a critical perspective on International Media, Political Action & Communication Technologies. IMPACT aims to give its students a critical perspective on how the internationalization of communication, the sharp increase in and acceleration of the production of information, and the unprecedented development of digital media play a role in the way political action, citizen mobilization and public debate are now being framed.
The course is available for Masters and PhD level students interested in political and public communication, social movements and transnational media activism, as well as the role of communication technologies in international relations. Suitable academic backgrounds include communication studies, political science, discourse analysis, area and cultural studies and sociology. The IMPACT course allows you to obtain 3 ECTS.
The academic program has been prepared by Benjamin Ferron and Stéphanie Wojcik, both lecturers at the UPEC.
**Program:**
• Dominique Marchetti - The Spaces of Production and Circulation of “International” Information: the Example of “Moroccan” News in Foreign Media – Tuesday July 5
• Jiangeng Sun - A Study of the Practice of French Correspondents in China – Wednesday Juy 6
• Florence Brisset - Producing Media Speech in Africa: Coercion, Resistance and the Invention of a Profession – Thursday July 7
• Romain Badouard - Social Networks and Public Debate in Post-Charlie France – Friday July 8
• Jib Comby - Studying Social Structures of a Public Debate: the Case of Climate Change – Monday July 11
•Simon Gadras - Electoral Campaigns in the 21st Century: Web, Social Media and Political Communication – Tuesday July 12
• Tristan Mattelart - Exploring the Transnational Circulation of News in Digital Times: from Myths to Realities – Wednesday July 13
• Rabia Polat - Social Media during the Gezi Park Protests in Turkey and afterwards (2013-) – Friday July 15
• Stephanie Wojcik - Political Participation and the Internet: Some Issues from Public Debates to Web-Campaigning – Monday July 18
• Victor Marí - The Field of Communication for Development and Social Change. From Spain to the Entire World: Hybridizations, Tensions and Possibilities – Tuesday July 19
• Simon Smith - Discussion in Online Newspapers and the Realignment of Journalistic Work: the Case of Slovakia and Post-Communist Europe – Wednesday July 21
•Benjamin Ferron - Mobilizing through and for “Alternative” Media: Comparative Perspectives from Latin America, the Middle East & Europe – Thursday July 21
The workload of the courses is approximately 50 hours (30 hours of courses and approximately 20 hours of personal work) and they can be recognized by up to 3 ECTS credits at the home university. The Summer School fees include accommodation and meals, local transport in Paris area, cultural tours and sport, among other services (welcome at the airport, a French student buddy, wifi, library access, etc.).
For further practical information, please visit our Summer School website: summerschool.univ-paris-est.fr
We’ll be happy to answer your practical questions: summerschool@univ-paris-est.fr
Looking forward to welcoming your students to our university!
Best regards,
Stéphanie Wojcik (stephanie.wojcik@u-pec.fr) and Benjamin Ferron (benjamin.ferron@u-pec.fr)
Ces médias occupent en effet des positions économiquement et symboliquement dominées dans l’espace des entreprises de presse, de plus en plus dominé par son pôle commercial, mais certains parviennent, seuls et/ou grâce au travail de leurs organes de liaison et de représentation (syndicats, coordinations, réseaux, etc.), ainsi
que des aides publiques, à des formes de consécration journalistique et/ou politique. L’analyse de ce processus de « consécration des avant-gardes journalistiques » est au coeur de la problématique du projet de recherche.
L’enquête repose sur une méthodologie mixte. En complément de méthodes d’enquête qualitative (observation ethnographique, entretiens semi-directifs) et quantitative (questionnaire et analyse textométrique et lexicométrique de discours), l’originalité de la méthode employée dans ce projet réside dans le fait de travailler avec les listes de médias fournies par divers organes de liaison et de représentation (syndicats, coordinations, fédérations, réseaux, fondations philanthropiques, etc.). Cette méthode, qui a d’ores et déjà facilité la standardisation du protocole d’enquête, permet de contourner le problème insoluble de leur définition préalable, en se basant sur les qualifications indigènes et le jeu de la reconnaissance (ou de l’exclusion) par les pairs. 150 entretiens ont déjà été réalisés, ainsi qu’un questionnaire individuel (238 réponses en mai 2024) et une quinzaine de séquences d’observation ethnographique. Une base de données de 600 médias - qui reste à compléter - a été constituée
autour de 5 séries variables, et l’équipe dispose de 10 années d’archives (2014-2024) issues de mailing lists internes à des organismes de liaison et de représentation (environ 2500 messages faisant l’objet d’un codage).
Plus de 220 émissions de l’émission « Les Autres Voix de la presse » feront l’objet d’une transcription intégrale via le logiciel Whisper et d’une analyse factorielle.
Les premières données regroupées par l’équipe sur les trajectoires biographiques et des propriétés sociales de leurs salariés et bénévoles indiquent que leurs statuts d’emplois sont généralement marqués par une forte précarité, la faiblesse des revenus, couplés à un haut niveau de diplôme et à un intense investissement, Ces médias et leurs protagonistes, tournés vers la production « d’informations politiques et générales » (IPG),
pour reprendre la terminologie issue des nomenclatures du Ministère de la culture et de la communication, se positionnent éditorialement comme des « hétérodoxes » : pour les uns, du côté de la « gauche de gauche »
(comme Politis, Bastamag, Reporterre, pour n’en citer que quelques-uns), pour les autres de la « droite nationale » ou « identitaire » (comme Rivarol, F... de Souche ou L’observatoire du Journalisme). Sociologiquement, leurs
agents font partie, pour certains, des fractions cultivées ou économiques des « classes moyennes » et, pour d’autres, de différentes fractions des classes populaires (médias de la mouvance « Gilets jaunes » ou médias
de « banlieues populaires »). L’un des enjeux du projet de recherche est de comprendre les rapports entre les positions et propriétés sociales des agents, leurs dispositions incorporées et leurs prises de position éditoriales, mais aussi de reconstituer les homologies structurales et les relations entre les différents pôles de cet espace de production de biens symboliques.
Formée en 2023-2024, l’équipe du projet MEDLIB est un groupe de recherche national qui se donne pour objectif d’étendre le travail de collecte de données et de cartographie (ACM) déjà entamé sur les médias qui se positionnent éditorialement « à gauche » : l’espace des médias de l’extrême-droite nationaliste et identitaire, l’espace des médias nés dans le sillage du mouvement des Gilets Jaunes, des espaces locaux de « médias
libres » (Nantes, Bretagne, Lyon), des fondations philanthropiques et des syndicats (le Syndicat de la presse indépendante d’information en ligne, le Fonds pour une Presse Libre).
L’équipe, coordonnée par Benjamin Ferron (MCF, UPEC/Céditec), est composée des personnes suivant. es : Olivier Baisnée (MCF, Sciences Po Toulouse/Lassp), Samuel Bouron (MCF, U. Dauphine-PSL), Téo Cazenaves (doctorant), Safia Dahani (post-doc, EHESS), Cégolène Frisque
(MCF, Université de Nantes), Guillaume Goasdoué (docteur, chercheur indépendant), Cyriac Gousset (doctorant, Sciences Po Toulouse), Nicolas Kaciaf (MCF HDR, Sciences Po Lille/Ceraps), Cyrielle Montrichard (MCF, UPEC/Céditec), Emilie Née (MCF, UPEC/Céditec), Jocelyn Peyret (animateur radio, Les Autres Voix de la Presse), Florence Ramel (masterante, U. de Nantes), Julie Sedel (MCF HDR, Unistra/Sage), Laurent Thiong-Kay (MCF, Sciences Po Lyon).
L’ambition de ce colloque est de regrouper et de faire dialoguer des études empiriques visant à mesurer les formes et la force de cette emprise de la communication dans divers champs sociaux : la politique ou les activités économiques, bien sûr, mais aussi la culture, le journalisme, l’enseignement et la recherche, le sport, la mode, le droit, la religion, l’alimentation, l’habillement et jusqu’aux manières d’être et de vivre en société.
Les chercheuses et chercheurs des différentes disciplines des sciences sociales. sont invité.e.s à participer à cette entreprise critique collective. Les propositions attendues devront, d’une part, présenter une construction de l’objet explicite autour de cette « emprise de la communication », et d’autre part, mobiliser et s’adosser à des données empiriques rigoureusement construites afin d’éviter le risque de la dénonciation spéculative.
Le colloque aura lieu les 15 et 16 décembre 2022 à Sciences Po Toulouse.
Les propositions de communication sont à adresser avant le 15 juin 2022 à l’adresse suivante : colloque.emprise.communication@gmail.com
Courtes (environ 3000 signes), elles devront présenter leur objet d’étude, le cadre théorique, la problématique et les éléments empiriques. Elles seront attentives à expliciter la dimension critique de la démarche et indiquer ce qu’elles souhaitent montrer/démontrer. Les auteur.e.s dont les propositions seront retenues participeront au colloque et, en parallèle, remettront une version écrite de leur communication qui fera l’objet d’une expertise en vue de sa publication dans le numéro anniversaire de la revue. Les propositions seront sélectionnées par le comité de rédaction de la revue Politiques de communication.
Le comité se prononcera le 15 juillet 2022. En vue de la publication d’un numéro spécial anniversaire, les communications devront être rédigées dans un format correspondant à ceux de la revue et envoyées à l’équipe organisatrice du colloque pour le 15 novembre 2022.
Comité d’organisation
Olivier BAISNEE
Benjamin FERRON
Sandrine LEVEQUE
Jérémie NOLLET
Conseil scientifique
Anne-Claude AMBROISE-RENDU | Olivier BAISNEE | Christine BARATS | Clémentine BERJAUD | Loïc BLONDIAUX | Julien BOYADJIAN | Isabelle CHARPENTIER | Ivan CHUPIN | Clément DESRUMAUX | Benjamin FERRON | Charles GADEA | Jean-Paul GÉHIN | Nicolas HUBE | Christian LE BART | Jean-Baptiste LEGAVRE | Brigitte LE GRIGNOU | Pierre LEROUX | Sandrine LEVEQUE | Erik NEVEU | Jérémie NOLLET | Caroline OLLIVIER-YANIV | Aurélie OLIVESI | Stéphane OLIVESI | Rémy RIEFFEL | Julie SEDEL | Jean-Claude SOULAGES | Anaïs THEVIOT
Le débat portera sur la série Jeux d'influence (Arte, 2019), dont le premier épisode sera projeté en première partie. Elle se fera en présence du réalisateur de la série Jean-Xavier de Lestrade, du chercheur Jean-Noël Jouzel (Centre de sociologie des organisations de SciencesPo), spécialiste de la question des pesticides et des enjeux de santé environnementale, et des contributeurs et contributrices du numéro thématique de Biens Symboliques "Faire (de) la télévision" coordonné par Séverine Sofio et Muriel Mille.
L'entrée est libre sur inscription et dans la limite des places disponibles. Conformément aux décisions gouvernementales, le passe sanitaire sera obligatoire pour accéder à la soirée.
Inscriptions : https://framadate.org/1EtkBAzFtE5fRw7x
Les propositions de communication (environ 5000 signes, espaces compris) devront comporter :
- une présentation de la thématique proposée, de son lien avec la problématique sociologique de l’appel à communication, et de l’axe auquel elle se rapporte ;
- une présentation du terrain et de la démarche empirique mise en œuvre ainsi que du cadre théorique d’analyse mobilisé ;
- quelques références bibliographiques.
Elles devront être déposées sur le site Web de l’AFS (http://afs-socio.fr/rt/rt37/) entre le 15 novembre 2020 et le 15 février 2021.
Les propositions de communication feront l’objet d’une évaluation en double aveugle par les membres du comité scientifique. Les auteurs seront notifiés des résultats de la sélection des propositions le 20 mars 2021. Des conseils pourront alors leur être transmis quant à l’intégration de leur communication dans la problématique des sessions.
Pour les propositions retenues, les textes définitifs (45 000 signes, espaces compris) devront être remis au plus tard le 31 mai 2021.
- Ivan, Chupin, Les écoles du journalisme. Les enjeux de scolarisation d’une profession (1899-2018), Rennes, PUR, coll. « Res Publica », 2018.
- Géraud Lafarge, Les diplômés du journalisme. Sociologie générale de destins singuliers, Rennes, PUR, coll. « Res Publica », 2019.
- Karim Souanef, Le journalisme sportif, Sociologie d’une spécialité dominée, Rennes, PUR, coll. « Res Publica », 2019.
Dans le cadre du VIIIe Congrès de l’Association Française de Sociologie qui porte sur le thème « Classer, déclasser, reclasser », les sessions du réseau thématique « Sociologie des médias » (RT37) proposent d’appréhender « les médias », ces entreprises économiques de production de biens culturels de grande diffusion, comme des opérateurs centraux des luttes asymétriques pour l’imposition de représentations légitimes de l’ordre social. Dans cette perspective, les communications présentées questionnent les opérations de découpage et de labellisation des agents, des contenus, des supports et des registres d’expression qui composent aujourd’hui l’univers médiatique, dans un contexte de subordination accrue aux logiques commerciales (session 1). Elles cherchent parallèlement à analyser les opérations de typifications de l’univers médiatique, conduites par des agents des champs politiques et bureaucratique (session 2). Il s’agit ensuite de saisir le travail de classement du monde social opéré par les professionnels des médias, en fonction des contraintes qui pèsent sur ce travail, sous forme d’injonctions économiques, politiques, professionnelles, et des intérêts spécifiques liés à leurs trajectoires et positions sociales (session 3). Elles interrogent également la manière dont les transformations des catégories de l’entendement médiatique informent des normes dominantes en vigueur chez les professionnels des médias, notamment les journalistes, comme de l’état des rapports de force entre les différents agents sociaux qu’ils médiatisent (session 4). Enfin, les échanges porteront sur les conditions d’imposition ou de subversion des logiques médiatiques dans d’autres champs de production symbolique susceptibles de contester le monopole journalistique de la production et de la distribution des informations (session 5).
Dans la continuité des réflexions engagées ces dernières années au sein du RT37 sur le champ journalistique (journées de juin 2017), l’ancrage de la sociologie des médias et du journalisme dans une sociologie générale (article collectif dans Biens Symboliques paru en avril 2018) et le renouvellement de la critique sociologique du journalisme (numéro de Savoir/Agir de décembre 2018), l’objectif de ce séminaire est de réfléchir à l’intérêt de la notion de “disposition” pour analyser le travail des professionnels des médias. A rebours des approches déterministes de la pratique qui ancrent les dispositions dans la biologie ou la génétique, et d’approche exclusivement intentionnalistes et interactionnistes qui tendent à évacuer celles-ci de l’analyse, l’approche en termes de dispositions invite, comme le remarquent David Pichonnaz et Kevin Toffel, à “ne pas séparer l’étude du travail de l’ancrage social des agents”. Quels enseignements les sociologues des médias et du journalisme peuvent-ils tirer des recherches menées dans cette perspective sur d’autres groupes professionnels ? Quels éclairages une sociologie dispositionnaliste du travail peut-elle trouver dans les travaux menés en sociologie des médias et du journalisme ?
Résumé. Ce numéro #25 d’Émulations propose de renouer avec une sociologie générale tout en se concentrant sur une question centrale en sociologie des professions et du travail, celle de l’étude des visions du métier et des pratiques professionnelles. En s’appuyant sur une analyse dispositionnelle, il propose de rendre compte de ces représentations et pratiques au travers d’une étude des trajectoires sociales des travailleurs et travailleuses. S’intéressant à la manière dont des dispositions acquises hors de la sphère du travail contribuent à façonner les carrières, les visions du métier et les pratiques professionnelles, les textes qui y sont réunis montrent l’importance de ne pas séparer l’étude du travail de l’ancrage social des agents. En explorant des contextes de socialisation divers, ces contributions attestent du fait que l’analyse de l’impact de la socialisation antérieure offre de belles promesses à l’étude du travail en contribuant à renouveler les approches en sociologie des professions.
Tuesday, May 22, 2018, East-Paris University, 2-5 p.m. / Mardi 22 mai 2018, Université Paris-Est Créteil, 14h-17h
In this seminar, Professor James C. Scott will be looking back on his books Weapons of the weak (1985) and Domination and the arts of resistance (1990) to offer an analysis of the most historically usual forms of peasant resistance designed to evade the worst dangers of direct confrontation: poaching, desertion, squatting, and “resistance dressed up as loyalty”. He will raise the issue of how it may be possible for an ethnographer to penetrate the thick walls of camouflage to discern the values and discourse of subordinate groups.
Revenant à ses ouvrages Weapons of the Weak (1985) et La domination et les arts de la résistance (1990), le professeur James C. Scott proposera dans ce séminaire (en anglais) une analyse des formes historiques les plus communes de résistance paysanne visant à échapper aux pires dangers de la confrontation directe : le braconnage, la désertion, le squat et la « résistance déguisée en loyauté ». Il soulèvera la question de savoir comment un ethnographe peut pénétrer les murs épais du camouflage pour discerner les valeurs et le discours des groupes subalternes.
Tout d’abord le sentiment, fort, que la sociologie a, depuis quelques années, délaissé l’objet « journalisme » alors même que ce champ professionnel continue à jouer un rôle central dans les catégorisations du monde social et la perpétuation des inégalités qui le traverse. Dynamique dans les années 1990-2000, la sociologie du journalisme est aujourd’hui en perte de vitesse. Il nous paraît donc important de mobiliser à nouveau les sociologues sur l’étude du journalisme, voire des « médias » aussi problématique puisse être la définition ce terme.
A défaut, et c’est un second constat, ces objets sont abandonnés à des travaux sur les contenus médiatiques qui, dans une forme d’enfermement sur leurs propriétés internes (Champagne, 1989 ; Neveu, 2010), ignorent les structures, les agents qui les font tenir, les relations d’interdépendances entre l’espace de production et les autres champs (politique, économique, littéraire, sportif, scientifique…) ou la manière dont ces rapports déterminent ce qui est dit ou écrit par les journalistes (Benson, 2004). Ces analyses contribuent ainsi à alimenter un sens commun savant sur les mutations des médias « à l’ère numérique ».
C’est donc enfin pour évaluer sociologiquement les éventuelles recompositions du journalisme qu’il nous a semblé utile de se demander : Où en est le champ journalistique ? Où en sont les recherches sur le champ journalistique ? Dans le cadre des réflexions du Réseau Thématique 37 « Sociologie des médias » de l’Association française de sociologie (AFS), nous souhaitons rappeler la nécessité de nous positionner dans une sociologie générale, ce qui implique, par exemple, de penser le journalisme comme un espace historiquement et socialement situé pour saisir comment il travaille et est travaillé par les hiérarchies matérielles et symboliques entre les groupes sociaux.
Le programme des sessions s’inspire de celui esquissé par Pierre Bourdieu (Bourdieu, 1994) et ses contemporains (Champagne, 1991 ; ARSS, 1994, 2000).
La première journée porte sur « la double dépendance » (Champagne, 2016), à savoir sur les relations entre le journalisme et les champs politique et économique.
La première session explore l’emprise réciproque entre les univers journalistique et politique. Rappelant les fondements de cette dépendance et ses évolutions, cette session interroge également, à partir de l’analyse de trajectoires sociales d’agents en politique, le poids des ressources médiatiques dans le jeu politique et, par ce biais, la place du journalisme dans les transformations du champ politique. Le concept de « capital médiatique » et son articulation avec celui de champ, seront questionnés.
La deuxième session envisage les formes de l’emprise du marché sur le journalisme et en particulier les agents sociaux qui l’exercent, à commencer par les dirigeants de presse d’information politique et générale. En plus de se porter sur le marché de l’information, le regard se pose sur la formation au métier et la manière dont les investissements patronaux l’infléchissent. En prenant comme exemple les nominations dans l’audiovisuel extérieur, cette session montre également la voie pour éviter l’économicisme en envisageant la télévision non pas comme un espace uniquement structuré par le capital économique, mais comme un lieu également réglé par des logiques hautement politiques incarnées par les trajectoires des agents occupant des positions de pouvoir dans l’audiovisuel public.
La deuxième journée interroge la structuration interne du journalisme et la contestation (relative) des règles en vigueur dans cet espace.
La troisième session examine la morphologie de l’espace des journalistes en étudiant principalement leurs trajectoires sociales, leurs formations et leurs parcours professionnels. Les contributions reviennent sur la genèse du champ journalistique, l’état actuel de ses frontières incertaines et cherchent à caractériser ses principes de division interne. Que nous disent les données disponibles sur les professionnels de l’information et leurs carrières, de l’autonomie du champ journalistique ? Une attention est également portée aux coordonnées sociales, aux orientations politiques ainsi qu’aux styles de vie des journalistes. Il s’agit ainsi de discuter de la place du journalisme dans les rapports de pouvoir entre les classes sociales.
La quatrième session explore les mécanismes sociaux qui sous-tendent les entreprises de contestation de la légitimité journalistique. Dans quelle mesure une sociologie du champ journalistique permet-elle de rendre compte des stratégies des agents qui en contestent les logiques dominantes de consécration ? Ces individus et groupes ont-ils des propriétés sociales, notamment en termes de capital économique, social et culturel, qui les prédisposent à s’engager dans des luttes pour la transformation des rapports de forces qui prévalent dans le champ journalistique ? Lesquels ont les moyens de convertir des ressources externes pour peser davantage dans les luttes internes ? Lesquels privilégient la construction d'espaces de contestation relativement protégés de la domination symbolique exercée par les agents mieux dotés en capitaux ?
D’autres questionnements plus généraux serviront de fil conducteur aux échanges : Est-il encore pertinent de parler de champ journalistique alors que ses recompositions récentes suggéreraient sa dilution (Champagne, 2016) ? N’est-il pas plus heuristique d’appréhender le journalisme à partir d’une sociologie des champs de production culturelle de grande diffusion (Marchetti, 2012) restituant davantage l’allongement des chaînes d’interdépendances et les circulations entre les espaces (journalisme, animation, production…) ? Est-il envisageable de parler de « champ médiatique », unité d’analyse souvent utilisée dans le langage sociologique sans pour autant être discutée en profondeur ? Comment éviter le risque de la multiplication des champs, à l’image de la tendance des sciences sociales à « accumuler les capitaux » (Neveu, 2013) ?
Au-delà, il s’agira donc de s’interroger sur les conditions de possibilité d’enquêtes (sur le journalisme, l’édition, le divertissement, le cinéma,…) outillant, et outillées par, le concept de champ. Quels programmes de recherche et mutualisations possibles dans un contexte contraignant de course (forcée) à la publication et d’injonction à une interdisciplinarité propice à la diffusion d’analyses sur les médias dont les opérations de rupture avec le sens commun, à la base du métier de sociologue, sont parfois inabouties, voire même impensées ?
Colloque international organisé par le Céditec (EA3119)
Paris, 21-22 juin 2018
Si le problème de la liberté d'expression a longtemps dominé les réflexions et les débats sur le fonctionnement des arènes publiques, la question de l'accès des groupes sociaux les plus démunis à la prise de parole légitime a été constituée au cours des dernières décennies en un problème public à part entière.
Les conditions de l'accès de ces groupes à l'expression publique et de l'audibilité de leurs discours sont aujourd'hui interrogées par de nombreux acteurs (associations, syndicats, partis, intellectuels, travailleurs sociaux, journalistes, éditeurs, etc.) qui proposent des dispositifs destinés à "donner la parole aux sans voix".
L’objectif de ce colloque est d’examiner, dans une perspective interdisciplinaire, les modalités, les formes et les enjeux de ces offres de prise de parole adressées aux plus démunis dans des contextes politiques et sociaux variés : les acteurs qui les promeuvent, les dispositifs qui les configurent et les discours qui les accompagnent.
L’objectif de cette section thématique est de participer à renouveler l'analyse des différents répertoires d’intervention médiatique et de construction militante des problèmes publics par les médias, et d'ouvrir une réflexion théorique et méthodologique sur leurs processus de production, de diffusion et de légitimation. De nombreuses recherches récentes sur les rapports entre médias et mobilisations collectives ayant été réalisées sur des terrains non-européens, nous privilégions également une perspective comparative, soit à travers la comparaison de cas, soit en mobilisant des notions de la sociologie politique sur de nouveaux terrains.
En effet, cette réforme qui prévoit le recul de l’âge légal de départ à 64 ans et l’allongement de la durée de cotisation à 43 annuités, est particulièrement injuste, comme l’ont montré les débats qui ont pu avoir lieu depuis des mois, alors même qu’elle n’apparaît pas justifiée sur le plan financier. Elle pénalisera en particulier celles et ceux qui ont commencé à travailler tôt, qui sont exposés à un travail pénible, et les femmes dont les carrières sont souvent discontinues et les niveaux de salaire moins élevés ; mais les jeunes non plus ne seront pas épargnés.
En tant que salariés du secteur de l’enseignement supérieur et de la recherche, nous sommes inquiets des conséquences de la réforme sur la carrière et la santé de l’ensemble des personnels. Nous sommes aussi particulièrement préoccupés pour les étudiantes et les étudiants, qui voient se dégrader leurs conditions d’études et d’accès à l’emploi, mais aussi s’allonger leurs carrières futures et s’amenuiser leurs chances de bénéficier d’une retraite décente.
Membres d’un laboratoire spécialisé en analyse du discours politique, nous dénonçons les faux-semblants de la communication gouvernementale qui utilise des arguments fallacieux et de fausses évidences pour faire reposer sur le seul travail la recherche de marges financières, sans taxer davantage les revenus du capital. Nous dénonçons aussi les mensonges caractérisés (retraite minimale à 1200 euros, réforme prétendument équitable pour les femmes…), qui ont ponctué les déclarations des défenseurs du projet et qui ont été, un à un, démentis par de nombreux chercheurs spécialistes du domaine. Enfin, l’absence de dialogue et de concertation véritables, l’évitement systématique du débat contradictoire et de la négociation nous inquiètent en tant que chercheurs et en tant que citoyens attachés à la démocratie.
Face à cette dérive autoritaire, les membres du Céditec appellent l’ensemble de la communauté universitaire à participer aux actions en cours et en particulier à la journée de mobilisation du jeudi 23 mars annoncée par l'intersyndicale.
Motion adoptée le 22 mars 2023 (22 pour, 2 NSSP)
Les travaux de sciences sociales sont particulièrement prolifiques depuis vingt ans sur le sujet. Ils montrent que la fabrique journalistique de l’actualité sert des intérêts sociaux qui correspondent rarement à ceux des groupes que ces mobilisations entendent défendre, comme l’illustre de façon emblématique la médiatisation des grèves de novembre-décembre 1995 contre le plan Juppé de réforme des retraites et de la sécurité sociale.
Un an après le déclenchement du mouvement des « gilets jaunes », il est peut-être temps, pour paraphraser le politiste Laurent Jeanpierre de tirer les leçons médiatiques des ronds-points : la question est-elle encore aujourd’hui de savoir comment les organisations du mouvement social peuvent s’assurer d’un traitement médiatique ample, durable et favorable de leurs revendications ou plutôt de se demander dans quelle mesure ce jeu médiatique en vaut – politiquement – la chandelle ?
These are only a few of the questions one could ask political scientist, anthropologist and anarchist thinker James C. Scott. During an exclusive interview with professors Benjamin Ferron and Claire Oger and their students (UPEC, UFR LLSH, Master 2 “Communication politique et publique en France et en Europe”), Professor Scott discusses what so-called “powerless” actors can do and which strategies they use. From hill tribes of the South-East Asia to medieval French peasants or enslaved African-Americans in the Great Dismal Swamp, James C. Scott paints a vast and diverse history of resistance to authoritarian tendencies. Edited excerpts for The Conversation France.
Benjamin Ferron est maître de conférences en sciences de l'information et de la communication à l’Université Paris-Est Créteil. Il est notamment co-auteur des Amateurs dans les médias (Presses des Mines, 2015) et travaille depuis une quinzaine d’années, selon différentes approches, sur les médias alternatifs. À l’occasion de l’édition 2017 des « Rencontres nationales des Médias Libres et du Journalisme de Résistance » , il nous éclaire sur ce phénomène.
aux “sans-voix” ? », les travaux de James C. Scott se sont imposés comme une source de réflexion stimulante, en particulier son premier livre traduit en français, La domination et les arts de la résistance. Fragments du discours subalterne : le politiste et anthropologue étasunien y analyse les mécanismes par lesquels celles et ceux que l’on appelle, trop hâtivement, les « sans-voix » sont susceptibles de prendre publiquement la parole.
Invité dans le cadre d’un séminaire, en mai 2018, James C. Scott a accepté de répondre à nos questions, en présence des membres du Céditec et d’une soixantaine de personnes venues participer aux échanges. Le séminaire a débuté par une conférence introductive. La présente contribution se concentre plutôt sur les échanges qui ont eu lieu à la suite de cette conférence entre James C. Scott, les organisateurs du séminaire et le public présent dans la salle.
afin de mieux comprendre l’articulation entre cette forme de journalisme
et les champs politique et économique. Une telle analyse permet finalement d’évaluer le genre de « solution » qu’il offre pour un meilleur fonctionnement d’une société démocratique.
SOMMAIRE
• Introduction du dossier. L’emprise de la communication et ses équivoques – Julie Sedel, Benjamin Ferron, Jérémie Nollet, Camille Noûs
• Retours sur les réceptions américaine et française
de The Whole World is Watching [Note liminaire au texte de Todd Gitlin] – Cyriac Gousset, Rodney Benson
• The Whole World is Watching : introduction – Todd Gitlin
• La production de l’événement politique « Gilets jaunes ». Le renouvellement de l’économie des manifestations médiatisées – Olivier Baisnée, Maximilien Gidon, Cyriac Gousset, Jérémie Nollet, Fanny Parent
• Ce que dit la police. Communication et légitimation de la force publique – Guillaume Le Saulnier
• Quand le ministère public investit officiellement Twitter – Isabelle Huré
• Les cadrages politiques de la communication publique. Analyse d’une politique agroécologique et alimentaire locale – Jeanne Pahun
• La civic tech : des professionnel·les de la communication numérique
à l’assaut de la participation citoyenne (2016-2019)– Tatiana de Feraudy
• Aux sources des discours sur la situation économique
Les prévisionnistes face à leur médiatisation – Théo Régniez
• L’emprise des médias sur le champ intellectuel. Les conférences savantes grand public comme espace intermédiaire dans la visibilité des idées – Boris Attencourt
• Lutter contre l’emprise de la communication. Les tentatives de Michel Crozier – Jean-Baptiste Legavre
• Les séries politiques, marqueurs de classe et de distinction – Isabelle Charpentier
Sommaire :
"La subordination au pouvoir économique", Jean-Baptiste Comby (Université Paris 2, CENS/CARISM) & Benjamin Ferron (UPEC, Céditec)
« L’institutionnalisation d’un incerti loci. Le champ journalistique et l’espace des écoles de journalisme », Géraud Lafarge (Université Rennes 1 / Centre nantais de sociologie)
« Quand l’autonomisation professionnelle renforce la subordination aux logiques commerciales : l’institutionnalisation paradoxale des écoles de journalisme », Samuel Bouron (maître de conférences en sociologie, IRISSO, Université Paris-Dauphine).
« Le milliardaire éclairé. La conversion des habitus des élites politiques et journalistiques vers l’économie », Eric Darras (Sciences Po Toulouse, Laboratoire des sciences sociales du politique)
« Le genre du pouvoir médiatique », Julie Sedel (Université de Strasbourg, SAGE, UMR 7363)
« La reproduction 2.0. Les inégalités de position des journalistes blogueurs dans le champ journalistique », Marie Neihouser (Groupe de recherche en communication politique, Université Laval)
« Coproduire les biens politiques. Journalistes et politiques en comparaison dans des contextes centralisés et fédéraux », Martin Baloge et Nicolas Hubé (CESSP - Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)
« Perturber les notables. Les conditions de possibilité d’un journalisme d’enquête à l’échelle locale », Nicolas Kaciaf (IEP de Lille – CERAPS)
« Des rencontres discrètes : journalistes, politiques et groupes d’intérêt au Salon international de l’agriculture », Chupin Ivan (Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines, Printemps UMR 8085, CNRS) et Mayance Pierre (Université Paris I Panthéon-Sorbonne, CESSP UMR 8209, CNRS).
« Incorporer la contrainte, transmettre la critique, occuper les médias. Sur la médiatisation de jeunes dirigeants du Front National », Safia Dahani (LaSSP/IEP de Toulouse et CHERPA/IEP d’Aix-en-Provence)
"Le journalisme à but non lucratif aux Etats-Unis : un secteur sous la double contrainte de la ‘viabilité’ et de ‘l’impact’ », Rodney Benson (New York University)
Ivan, Chupin, Les écoles du journalisme. Les enjeux de scolarisation d’une profession (1899-2018), Rennes, PUR, coll. « Res Publica », 2018.
Les médias occupent une place particulière dans nos démocraties contemporaines. Les journalistes sont souvent critiqués pour leur conformisme et leur « formatage ». Mais on ne sait rien de la manière dont ils sont formés en pratique(s). Jusqu’à quel point des écoles peuvent-elles rester autonomes par rapport à l’Etat ou des entreprises de médias ? Comment ces savoir-faire se sont-ils codifiés ? Comment le contenu des formations est-il défini ? Pour répondre à ces questions, ce livre propose une socio-histoire des écoles de journalisme en France depuis la fin du XIXe siècle jusqu’à nos jours. Il offre un nouveau regard sur le lien peu exploré entre formation et profession. Il repose sur l’exploitation d’archives inédites, d’observations et d’entretiens auprès des acteurs de cette histoire. Il raconte comment le journalisme est parvenu suite à l’affaire Dreyfus à se scolariser alors même que la plupart des professionnels considéraient à l’époque qu’il était possible de l’apprendre directement « sur le tas ».
Géraud Lafarge, Les diplômés du journalisme. Sociologie générale de destins singuliers, Rennes, PUR, coll. « Res Publica », 2019.
Le journalisme est un secteur qui semble touché par une crise durable, massive et double. Une crise économique qui ne cesse de réduire la nombre et la taille des rédactions. Une crise symbolique avec une défiance croissante envers une profession dont les membres et les productions sont contestés et rejetés parfois violemment. La critique de professionnels formatés et d’un monde où la diversité sociale n’a pas sa place vient la renforcer. Pourtant les formations au métier de journalistes se multiplient et les vocations sont nombreuses. Porter une attention particulière aux propriétés et trajectoires sociales des étudiants en école de journalisme comme le fait cet ouvrage qui s’appuie sur une enquête statistique et des entretiens permet de sortir de ces paradoxes et de mettre en lumière les conditions sociales de l’entrée et du maintien dans la profession de journaliste. Si la raréfaction des postes combinée à la course au diplôme tend à accroître la sélection à l’entrée, c’est à un espace hiérarchisé de formations que sont confrontés les prétendants au métier dont les exigences sont aussi celles de la reproduction sociale du groupe familial. Les ressources décisives pour l’entrée dans ces écoles (économique, culturelle mais aussi sociale), le sont aussi pour les carrières professionnelles qui confirment la hiérarchie de ces établissements. Ces différences se retrouvent dans les trajectoires singulières vécues par les étudiants montrant la nécessité sociale derrière la singularité des carrières individuelles. Ces évolutions traduisent l’institutionnalisation croissante de cet univers a priori incertain qu’est le champ journalistique.
Karim Souanef, Le journalisme sportif, Sociologie d’une spécialité dominée, Rennes, PUR, coll. « Res Publica », 2019.
Le journaliste sportif serait un « beauf » populiste, proche de la figure du supporter. À rebours de ce cliché, et des analyses qui réduisent la spécialité à un journalisme de connivence sous l’emprise des intérêts marchands, ce livre restitue la pluralité des pratiques et la complexité des logiques qui les sous-tendent. Des rédactions de médias nationaux aux terrains sportifs, en passant par les écoles de journalisme et les associations professionnelles, l’enquête lève le voile sur ce métier peu singulier, caractéristique de la double évolution du journalisme contemporain. D’un côté, la concurrence médiatique et le renouvellement du personnel ont pour effet une diversification des modèles d’excellence avec notamment le déploiement de registres critiques et caustiques. Cette tendance est d’autant plus forte que les institutions (sportives) médiatisées renforcent leur contrôle sur l’information engendrant, en réponse, des stratégies de contournement de la part des reporters. De l’autre, cette autonomisation est très fortement limitée par les contraintes pesant sur le travail quotidien des producteurs de l’information de grande diffusion (pression managériale, alignement sur les attentes supposées du public, course au scoop, écriture dans l’urgence, dépendance aux sources officielles, …). Produit d’un ensemble de facteurs mis en évidence dans cet ouvrage, l’offre médiatique dominante nourrit un spectacle dit « populaire », participant, ainsi, à la reproduction du sport professionnel et de son ordre socio-économique inégalitaire.
Le séminaire est ouvert au public. Merci de signaler votre présence en envoyant un email préalable à l’adresse suivante : rt37afs.sociologiedesmedias@gmail.com
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Proches, car journalistes et communicants occupent des positions de relative proximité dans l’espace social. Membres des fractions cultivées des classes moyennes et supérieures, ils partagent des dispositions, des styles de vie et des systèmes de coordonnées sociales qui facilitent l’entretien d’affinités électives. Toutefois, ils vivent souvent cette proximité sur le registre de la dénégation.
Comparables, du fait que leurs activités respectives sont celles d’intermédiaires culturels positionnées dans des champs de production symboliques relativement autonomes et stratifiés. Ces derniers exigent l’intériorisation de « sens pratiques » du métier partiellement similaires. Ces espaces, qui participent aux luttes pour l‘imposition de représentations légitimes du monde social, sont marqués par une dépendance aux champs politique, économique et intellectuel. Ils se caractérisent par une structure interne inégalitaire, de type oligopolistique. Une poignée d’agents et d’organisations formant les « élites » de ces professions capte l’essentiel des ressources professionnelles tandis qu’une masse croissante d’agents dont le capital culturel est systématiquement exploité connait une précarisation de ses conditions de travail et une réduction des rétributions tant matérielles que symboliques attachées à leur activité.
Distincts, dans la mesure où la profession journalistique a construit historiquement une partie de son autonomie professionnelle, de ses critères internes d’excellence et de sa légitimité sociale (aux yeux de l’Etat et de ses publics en particulier), dans un rapport de distinction voire d’opposition conflictuelle avec les métiers de la publicité, du marketing et de la communication. Ces derniers sont souvent associés aux tâches peu nobles de manipulation de la conscience des consommateurs et des citoyens. Les communicants, de leur côté, en particulier ceux qui travaillent pour de puissantes organisations publiques ou privées, peuvent considérer les journalistes et les médias d’informations avec un certain dédain, comme de simples moyens au service des objectifs stratégiques qui fondent leur propre légitimité professionnelle.
Interdépendants, au sens où communicants et journalistes travaillent ensemble et « se travaillent » mutuellement : les journalistes peuvent être érigés en « cibles » des communicants, et les communicants considérés comme « sources » des journalistes ; les communicants peuvent faire une partie de leur carrière dans le journalisme, et les journalistes une partie de leur carrière dans la communication ; enfin, l’emprise de la communication publicitaire dans les rédactions des entreprises de presse ne cesse d’interroger la frontière entre information et communication.
L’ensemble de ces éléments d’analyse invitent à mener une sociologie comparée et relationnelle de ces espaces professionnels, qui permet de saisir les rapports de force souvent invisibles qui président à leurs interactions quotidiennes.
En lien étroit avec le cours, le travail dirigé se veut une initiation à la recherche sociologique. Il repose, d’une part, sur la lecture et la discussion d’articles scientifiques et, d’autre part, sur la constitution et l’analyse d’un corpus de presse : les étudiant.e.s doivent analyser d’un point de vue synchronique et diachronique les relations entre le service de communication de leur organisme employeur (collectivité locale ou association) et la couverture de ses activités par les journalistes des médias d’information.
Initiées dans les années 1970, les recherches sur la communication médiatique des mouvements sociaux font l’objet d’un intérêt renouvelé, en particulier depuis les nombreuses mobilisations des années 2010 (Anonymous, Indignados, Occupy Wall Street, ZAD, Gilets Jaunes...) qui ont eu recours aux technologies du Web pour appeler à l’action et sensibiliser à leurs « causes ». Dans un contexte de « course aux armements communicationnels » (E. Neveu), de nombreux travaux sociologiques analysent la complexité des relations d’« associés-rivaux » entre les médias de masse et les mouvements sociaux, ou encore l'émergence de « manifestations de papier », autrement dit d'actions qui, à la limite, n'existeraient pas sans les médias » (P. Champagne).
L’objectif de ce cours est d’apporter à des futur.e.s professionnelle.s de la communication des clés d’analyse des différents répertoires d’intervention médiatique et d’interpellation de « l’opinion publique » façonnés par des groupes d’intérêt militants. Le cours fait dialoguer différents types de travaux issus de la science politique, de la sociologie et des sciences de l’information et de la communication qui combinent une réflexivité critique et un travail empirique. Une attention particulière est portée aux approches généalogiques ou d’inspiration socio-historique
Cours magistral
Qu'il s'agisse d'organiser la communication interne, d'accéder et de séduire les médias de masse ou de créer des réseaux de communication « alternatifs », le répertoire médiatique des organisations militantes inclut une palette diversifiée de moyens d'action : la communication interpersonnelle à l’occasion de la formation des militants ou d’opérations de porte-à-porte ; l'utilisation d’un microphone ou de haut-parleur lors des réunions publiques ; l'affichage dans les rues et la diffusion de tracts ; la rédaction de communiqués de presse ou l'invitation de journalistes à des événements tels que des meetings, des manifestations ou des conférences de presse ; la publication de tribunes ou d'annonces dans les journaux, la participation de militants à des émissions de radio ou de télévision ; la création de mailing lists, de forums en ligne, le lancement d'un site Internet ou l'utilisation des réseaux sociaux ; la création de journaux militants, de « radios libres », de télévisions associatives, le piratage informatique ou l'utilisation de logiciels libres. Depuis les années 1970 environ, on observe ainsi dans les pratiques militantes une véritable « course aux armements communicationnels » (Neveu, 2010) qui a des incidences sur la division du travail au sein des organisations militantes, le profil et les compétences réelles et attendues de leurs membres, le travail des journalistes et les relations qu'ils entretiennent avec leurs sources d'information, ainsi que l'émergence d'un militantisme spécialisé dans les questions d'information et de communication médiatiques. Les pratiques militantes en matière de communication contribuent ainsi à politiser un discours - enjoué ou critique selon les cas - sur les médias et le journalisme qui participe d’une reconfiguration des règles du jeu politique.
Travaux dirigés
Les travaux dirigés sont destinés à approfondir le cours magistral en faisant travailler les étudiant.e.s en groupe sur des études de cas. Chacun.e d’entre vous doit renforcer et mobiliser des compétences générales (recherche documentaire, qualités d’analyse et de synthèse, réflexivité critique, capacités à problématiser une réflexion et structurer un plan argumenté, techniques d’écriture et de présentation orale, référencement des sources bibliographiques et documentaires) et des compétences spécifiques (concepts et théories de la sociologie de la participation, de l’action collective, des mouvements sociaux, du militantisme, du journalisme, des médias…). La première séance de TD est l’occasion de présenter le programme et les consignes méthodologiques, ainsi que de constituer les groupes de travail et de répartir les sujets. Les séances 2 à 4 sont consacrées à des lectures et des discussions autour de textes du dossier (voir ci-après). Les séances 5 à 11 sont organisées autour des présentations orales des dissertations, de discussions avec le reste du groupe et de mises au point méthodologiques.
Pour y répondre, le cours donne dans un premier temps les principaux repères de l’histoire politique et économique des médias en France, en particulier la genèse de la presse moderne aux XVIIe-XVIIIe siècle et l’institutionnalisation de la presse de masse et d’un champ professionnel du journalisme relativement autonome, à partir de la fin du XIXe siècle. L’objectif de ce retour historique est de comprendre l’emprise progressive des médias audiovisuels, en particulier la télévision et ses logiques d’audimat, sur les hiérarchies professionnelles des journalistes, à partir des années 1970-1980. Il s'agit dans un second temps de proposer une analyse structurale de l’espace des entreprises de presse en France aujourd’hui, dans les secteurs de la presse écrite, des agences, des médias audiovisuels et de l’information en ligne ainsi que d’analyser la morphologie et les transformations contemporaines du journalisme. Quel est l’intérêt d’appréhender ce dernier comme un « champ professionnel » et quelles sont ses spécificités par rapport à d’autres champs ? Qui sont les professionnels des médias et comment les positionner dans la structure des classes sociales ? Dans quelles conditions produisent-ils et hiérarchisent-ils les informations et les programmes qui font « l’actualité » ? Le cours propose dans un troisième temps de saisir la double dépendance des médias d’information aux champs politique et économique, et l’emprise qu’ils exercent sur différents champs de production culturelle (arts, sciences, littérature, religion, champ juridique…). Quel rôle joue l’Etat dans le fonctionnement du système médiatique ? Quels mécanismes permettent d’expliquer les processus actuels d’augmentation des pressions concurrentielles et de concentration industrielle des médias et quels en sont les effets sur le fonctionnement des entreprises de presse et les contenus diffusés ? Dans quelle mesure ces mécanismes pèsent-ils sur les choix stratégiques des dirigeants de presse quant aux modèles de production et de distribution des informations et des programmes auxquels sont soumis les salariés des médias dans leur travail quotidien et la gestion de leur carrière ? Enfin, quels mécanismes sociaux sous-tendent la réception des productions médiatiques en France, selon les groupes sociaux considérés ?
Cours magistral
Initiées dans les années 1970, les recherches sur la communication médiatique des mouvements sociaux et de l'action collective font l’objet d’un intérêt renouvelé, en particulier depuis le déclenchement des « révolutions arabes » et des nombreuses mobilisations des années 2010 (Anonymous, Indignados, Occupy Wall Street...) qui ont eu recours aux technologies du Web pour appeler à l’action et sensibiliser à leurs « causes ». Dans un contexte de « course aux armements communicationnels » (E. Neveu), de nombreux travaux sociologiques analysent la complexité des relations d’« associés-rivaux » entre les médias de masse et les mouvements sociaux, ou encore l'émergence de « manifestations de papier », autrement dit d'actions qui, à la limite, n'existeraient pas sans les médias » (P. Champagne). Ces travaux ont pu explorer des terrains aussi variés que le répertoire médiatique des militants écologistes, des syndicats d'agriculteurs, des collectifs de défense des « sans », des mobilisations en santé ou dans les quartiers populaires. L’objectif de ce cours est d’apporter à des futur.e.s professionnelle.s de la communication des clés d’analyse des différents répertoires d’intervention médiatique et d’interpellation de « l’opinion publique » façonnés par groupes d’intérêt militants, et d'ouvrir une réflexion sur les différentes approches théoriques et méthodologiques utilisées par les recherches contemporaines sur ce sujet en montrant l'intérêt d'une sociologie politique de leurs formes de légitimation et de leurs modalités de réception ou d’appropriation. Le cours fait dialoguer différents types de travaux issus de la science politique, de la sociologie et des sciences de l’information et de la communication qui combinent une réflexivité critique et un travail empirique. De nombreuses recherches récentes sur les rapports entre médias et mobilisations collectives ayant été réalisées sur des terrains non-européens, nous privilégions également une perspective comparative, soit à travers la comparaison de cas, soit en « faisant voyager » des notions de la sociologie politique sur de nouveaux terrains. Enfin, une attention particulière est aussi portée aux approches généalogiques ou d’inspiration socio-historique, qui permettent de resituer les médias et les mobilisations étudiées dans le temps long, et donc dans leur contexte historique, politique et social.
Ateliers
Les ateliers ont lieu après les séquences de cours magistral. L'atelier introductif est consacré à la présentation des sujets d’articles et d'exposés, la constitution des différents groupes, le choix des sujets et la passation d’un questionnaire individuel. Les trois ateliers suivants sont divisés entre un temps de discussion de textes qui devront impérativement être lus en amont de la séance (2 textes par séance, soit 6 textes en tout), et un temps de mises au point méthodologique sur différents aspects de vos travaux : problématisation et recherche documentaire ; construction du plan et de l’argumentaire, présentation écrite et orale des travaux. Les trois derniers ateliers sont consacrés à la présentation des exposés de chaque groupe (20 % de la note).
Structuré en deux parties, le cours aborde dans un premier temps la construction socio-historique de l'espace politique européen. Ce parcours historique commence par une analyse de l'émiettement des structures de domination caractéristique du féodalisme européen (chap. 1). Nous voyons ensuite comment s'est formé et codifié, notamment sur les plans politique, économique, diplomatique et culturel, le système des États européens entre la Renaissance et l'époque des Lumières (chap. 2). Il s'agit enfin de comprendre comment ce système a finalement contribué, de manière paradoxale, à la production de l'idée moderne d'Europe malgré le triple écueil des nationalismes, du colonialisme et des guerres européennes au moment de l'industrialisation du continent (chap. 3).
Dans un second temps, nous nous penchons sur les mutations de l'idée européenne à travers la construction de l'Europe politique et économique au cours des soixante-dix dernières années. Cette partie revient sur les conditions de genèse du projet européen avant et après la Seconde Guerre mondiale (chap. 4). Cette analyse permet de mieux saisir les enjeux et contradictions des élargissements successifs de l'Europe depuis le Traité de Rome (chap. 5). Elle éclaire l'originalité du dispositif institutionnel (Parlement, Conseil, Commission, Cour de justice) que nous connaissons aujourd'hui (chap. 6).
Le cours permet ainsi de comprendre les logiques sociales et politiques qui président à ce que l'on peut appeler le « régime politique de l'Union européenne » (A. Cohen). Ces éléments permettent d'interroger, au regard des enjeux démocratiques qu'elle pose, la notion plus prescriptive que descriptive de « société civile européenne »
1. Acquérir les concepts et les problématiques de la science politique, en particulier lorsqu'elle étudie avec les outils de la sociologie l'émergence des problèmes agricoles et alimentaires et leur prise en charge par les institutions publiques (Etat, Union européenne, collectivités locales, etc.). En lien direct avec le cours magistral, il s'agit de donner des clés de compréhension et des grilles d'analyse de l'environnement politique dans lequel évoluent les mondes agricoles et agro-alimentaires, et de permettre de situer et d'identifier les grands enjeux et les principaux acteurs qui les structurent. C'est un savoir crucial pour des étudiants qui seront amenés à prendre des décisions dans un contexte institutionnel et politique complexe, marqué par l'interdépendance des échelons (local, national et supranational) et la multiplicité des acteurs (publics, privés, civiques).
2. Développer vos capacités à organiser, exprimer et argumenter vos idées à l'écrit comme à l'oral. En effet, la méthode de la science politique vous apprend à lire et à écrire autrement, tout en développant votre sens critique. À cet égard, l'enjeu de ces conférences est aussi d'ordre méthodologique. La rigueur et la précision dans la recherche d'informations vont de pair avec la manifestation d'un « esprit de synthèse » dans l'expression écrite et orale. Autour d'un sujet donné, la réflexion devra être structurée et argumentée, tout en se déroulant harmonieusement et logiquement à partir d'une problématique. Une fois comprise et patiemment pratiquée, cette démarche pourra se révéler efficace pour d'autres types d'exercices, comme la rédaction d'un rapport ou d'un mémoire, ou bien un grand oral, mais aussi pour développer votre capacité à vous exprimer d'une manière claire, crédible et convaincante dans le monde professionnel. L'idéal à atteindre ici est de parvenir à exprimer librement vos idées et arguments au sein d'un cadre contraignant.