La Traductologie Origine Et Théories 2

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La théorie du Skopos – ‫نظريّة السكوبوس أو النظريّة الغائيّة أو نظريّة الهدف‬

Lancée en Allemagne aux années 1980, la théorie du Skopos porte spécialement sur la
traduction écrite. Elle ajoute un nouveau paramètre au processus de traduction : le
destinataire du texte cible. En effet, le mot « skopos » signifie en allemand « fonction
». Ainsi, cette théorie évalue la traduction conformément à la fonctionnalité du texte
d'arrivée. Comment ? Un même texte peut avoir, vers une même langue cible,
plusieurs bonnes traductions qui sont pourtant différentes les unes des autres.
Pourquoi ? Chaque traduction remplit auprès de son destinataire une fonction
spéciale, qui est différente des fonctions remplies par les autres traductions faites pour
le même texte vers la même langue cible. Prenons par exemple un texte spécialisé
français. Pour le traduire en arabe, il faut prendre en compte la terminologie en
vigueur dans le pays arabe concerné, car les termes arabes ne sont pas tout à fait les
mêmes dans les pays arabes. Par exemple, le terme « concurrence » est traduit en
Syrie par « ‫» المنافسة‬, mais au Maghreb par « ‫» ال َحمائيّة‬. De plus, le terme « optique » est
traduit en Syrie par « ‫ » علم الضوئيّات‬et en Egypte par « ‫» علم البصريّات‬. Ainsi, deux
traductions arabes pour un même texte spécialisé français peuvent être correctes,
malgré leurs différences terminologiques, car chacune d'entre elles prend en compte la
terminologie adoptée par le pays arabe concerné, c'est-à-dire qu'elles remplissent
chacune leur fonction auprès du destinataire. Voilà pourquoi la théorie du Skopos
souligne le rôle de la recherche documentaire afin que le traducteur parvienne à
s'exprimer spontanément en langue d'arrivée. En conséquence, la théorie du Skopos
rejette la correspondance des langues prônée par les théories linguistiques, tout en la
remplaçant par une équivalence de discours. Cela implique une remise en cause de la
déverbalisation revendiquée par la théorie interprétative : y a-t-il une pensée sans
support verbal ? se demande la théorie du Skopos.

Les théories inférentielles – ‫النظريات االستداللية‬


L'inférence, c'est une opération logique par laquelle on admet une proposition en
fonction de sa liaison avec d'autres propositions déjà tenues pour vraies. Il s'agit donc
de remplacer la déverbalisation par le principe inférentiel. Si les théories inférentielles
observent, comme la théorie interprétative, l'absence du contact entre les langues et
soulignent, comme Seleskovitch et Ledrer, le rôle crucial du sens en traduction, le
principe inférentiel en présente une nouvelle explication inspirée des sciences

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La traductologie : origine et théories – WARD HASSAN - 2019
cognitives. En effet, la traduction est un acte de communication interlinguistique et
interculturelle. Elle consiste en succession de décisions : les unes sont subconscientes,
alors que les autres sont délibérées. Les décisions subconscientes sont prises dans la
phase de compréhension, tandis que les décisions délibérées sont prises dans la phase
de réexpression. Ces décisions ont pour but de comprendre le sens et de le réexprimer
en langue cible. La compréhension du sens et sa réexpression dépendent des bagages
linguistique et thématique dont dispose le traducteur qui les mobilise. Ainsi, le
processus de traduction ne se limite pas à trois phases : compréhension –
déverbalisation – réexpression. Mais, il est plus compliqué : il y a toute une
mobilisation des connaissances linguistiques et thématiques chez le traducteur pour
pouvoir comprendre le sens et le réexprimer en langue d'arrivée.

Les théories décisionnelles – ‫النظريّات الذاتيّة‬


Comme leur nom l'indique en français, les théories décisionnelles s'intéressent
essentiellement aux facteurs qui influencent les décisions du traducteur. Selon ces
théories, la compréhension et la réexpression du sens ne dépendent pas seulement des
connaissances linguistiques et thématiques du traducteur, mais de ses valeurs aussi.
Autrement dit, les décisions du traducteur sont influencées par ses valeurs. L'émotion
n'est pas une simple réaction, mais un outil avec lequel le traducteur prend ses
décisions. Cela touche particulièrement la traduction des mots liés à des notions
controversées. Plusieurs exemples peuvent être cités là-dessus. Le terme ‫ حرب تشرين‬a
deux traductions en français : « la guerre d'octobre » et « la guerre du Kippour ». La
première traduction est basée sur le terme arabe, alors que la deuxième est basée sur le
terme hébreu. Sachant que le terme arabe indique uniquement le mois du calendrier
grégorien où la guerre a eu lieu, tandis que le terme hébreu lie la guerre à une fête
juive coïncidant avec le début des combats. Autrement dit, les Israéliens veulent
montrer qu'il s'agit d'un conflit religieux entre Musulmans et Juifs, contrairement aux
Arabes qui cherchent à montrer que c'est plutôt un conflit existentiel entre occupants
sionistes et libérateurs arabes. Le choix entre les deux traductions françaises, dans la
plupart des cas, ne se fait pas par hasard : les traducteurs français pro-Arabes
choisissent « la guerre d'octobre », contrairement aux traducteurs français pro-
Israéliens qui optent pour « la guerre du Kippour ». Ainsi, les valeurs et les émotions
des traducteurs concernés jouent un rôle décisif par rapport à leurs choix
terminologiques. Cela touche évidemment à l'objectivité de la traduction. Voilà

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pourquoi il est nécessaire que le traducteur neutralise autant que possible ses propres
émotions et ses propres valeurs, afin de pouvoir se mettre complètement dans la peau
de l'auteur et réexprimer fidèlement ses idées, de quoi assurer la communication
interlinguistique et interculturelle entre les peuples. Sinon, les lecteurs de la traduction
recevraient un faux message et auraient une conception erronée de l'auteur de
l'original. Même si le traducteur rejette les idées du texte source pour des raisons
idéologiques, il n'a jamais le droit de les changer ni de les modifier. Il vaut mieux
renoncer complètement à les traduire que les traduire faussement.

Conclusion
Au vu de ce qui précède, chaque théorie souligne un élément particulier dans le
processus de traduction. Mais jusqu'à présent, il n'y a aucune théorie qui englobe tous
les facteurs qui comptent en traduction. En outre, aucune théorie ne prend en compte
la particularité des différents types de traduction/interprétation : aucune théorie ne
porte en détail sur la simultanée par exemple. Ainsi, la traductologie est toujours
incomplète, ce qui est normal parce que son émergence est relativement récente.

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