Poly de Cours Dorga - L1 - 2024
Poly de Cours Dorga - L1 - 2024
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Chimie organique
LICENCE 1
INTRODUCTION
Dans cette partie du module, nous allons dans un premier temps étudier les effets électroniques
dans les molécules organiques, comprendre leur influence sur la structure et la stabilité des espèces
organiques, sur la formation ou la rupture de liaisons, pour aborder dans un deuxième temps la
réactivité en chimie organique. Nous étudierons les mécanismes réactionnels, leur écriture
conventionnelle en chimie organique, ainsi que leur profil énergétique.
EFFETS ELECTRONIQUES
I. Rappels : l’élément carbone, l’hybridation, les liaisons ou ............................................... 1
II. Effet inductif ............................................................................................................................ 3
III. Mésomérie ................................................................................................................................ 5
IV. Effet mésomère ........................................................................................................................ 8
V. Récapitulatif des effets électroniques....................................................................................... 9
VI. Cas particulier des groupements alkyle ................................................................................. 10
VII. Influence des effets électroniques sur la structure des molécules .......................................... 11
VIII. Influence des effets électroniques sur la stabilité des espèces ............................................... 12
Rappelons la règle de l’octet proposée par Lewis : dans un édifice chimique (molécule ou
ion), un atome partage avec ses voisins autant d’électrons qu’il faut pour s’entourer d’un octet,
soit 8 électrons de valence. En fonction du nombre d’électrons de valence au départ, il va donc
s’entourer de plus ou moins de liaisons (doublets liants) pour porter à 8 le nombre d’électrons
sur sa couche de valence.
La règle de l’octet permet d’expliquer qu’un atome de carbone dans une molécule s’entoure
de 4 doublets liants (4 électrons de valence au départ + 4 électrons apportés et mis en commun
par des atomes voisins). On dit que le carbone est tétravalent.
Notons que schématiquement, on peut considérer que l’atome de carbone passe de l’état
fondamental à un état excité C*, où ses 4 électrons de valence se retrouvent seuls dans une
orbitale atomique (s ou p), en tant qu’électrons célibataires, prêts à former chacun une liaison :
Rappelons ci-dessous les schémas de Lewis à connaître par cœur (sans avoir à repartir à
chaque fois du numéro atomique et de la configuration électronique…), pour les atomes
présents très fréquemment dans les molécules organiques (X représente un des 4 halogènes
possibles : F, Cl, Br ou I) :
Dans une molécule organique, les liaisons reliant les atomes : C, H, N, O, X, sont des
liaisons covalentes, car ce sont des atomes fortement électronégatifs, avec peu de différence
d’électronégativité entre eux.
Les liaisons entre deux atomes différents sont toutefois polarisées du fait de la différence
d’électronégativité. En chimie organique, on dit plutôt « liaison polarisée » que « liaison
covalente polaire », mais ce n’est qu’une question de vocabulaire. On indique en général le sens
de polarisation à l’aide de charges partielles notées + et -.
À noter que la liaison C-H est en général considérée comme non polarisée.
1
Les règles empiriques de Gillespie ou « théorie » VSEPR permettent de prédire la
géométrie des molécules. On retrouve ainsi que l’atome de carbone du méthane (CH4) est
tétraédrique (AX4E0), alors que pour l’éthylène (CH2=CH2) la géométrie est trigonale plane
(AX3E0) autour de chaque atome de carbone ; et que l’acétylène (HC≡CH) est une molécule
linéaire (AX2E0) :
Rappelons maintenant que toutes les liaisons (doublets liants) ne sont pas identiques. Entre
deux atomes, il se crée toujours en premier lieu une liaison de type sigma () : orbitale
moléculaire (OM) obtenue par recouvrement axial de deux orbitales atomiques (OA). Et ensuite
peut éventuellement se former une liaison de type pi () : OM obtenue par recouvrement
latéral de deux autres OA.
Une simple liaison est donc toujours une liaison ; une double liaison est constituée d’une
liaison et d’une liaison ; une triple liaison d’une liaison et de deux liaisons :
2
Un carbone tétraédrique (AX4E0) est hybridé sp3 : les 4 électrons autour du carbone (les
4 électrons célibataires de C*) vont se retrouver dans 4 OH identiques dites sp3 car issues d’une
« moyenne » entre l’orbitale s et les 3 orbitales p de la couche de valence. Ces 4 OH sp3 sont
bien orientées régulièrement dans l’espace pour former le carbone tétraédrique.
Un carbone trigonal plan (AX3E0) est hybridé sp2 : 3 OH sp2 (issues d’une « moyenne »
entre l’orbitale s et 2 orbitales p), et une OA p restante. Cette OA p restante est perpendiculaire
au plan formé par les 3 OH ; c’est elle qui permet la formation de la liaison avec un autre
carbone sp2.
Un carbone linéaire (AX2E0) est hybridé sp : 2 OH sp tête-bêche (géométrie linéaire), et
2 OA p restantes perpendiculaires entre elles et perpendiculaires à la ligne des OH sp.
Bien noter que les charges « partielles » notées + et - ne sont pas les charges « formelles »
que l’on rencontre dans les formules de Lewis : les charges formelles sont notées et ,
usuellement entourées sur un schéma de Lewis pour ne pas confondre un signe négatif et un
doublet non liant.
3
On appelle effet inductif attracteur (noté –I) d’un atome ou d’un groupement d’atomes,
l'effet d'attraction électronique qu’il exerce sur les liaisons voisines. Les atomes exerçant un
effet inductif attracteur sont les éléments fortement électronégatifs (O, N, halogène), plus
électronégatifs que le carbone.
Dans l'exemple ci-dessous, on dira que l'atome de chlore exerce un effet inductif attracteur
sur la chaîne carbonée. On représente des « pointes de flèches » sur les liaisons, dans le sens
de déplacement du nuage électronique : les flèches pointent vers l’atome qui attire les
électrons. L’atténuation de cet effet avec la distance est symbolisée par une diminution du
nombre de « pointes de flèches » : trois à côté de l’atome électroattracteur, puis deux, puis une.
Inversement, un effet inductif donneur (noté +I) d’un substituant sur une chaîne carbonée,
a pour effet de repousser les électrons vers les liaisons voisines. Les atomes exerçant un effet
inductif donneur sont les éléments très peu électronégatifs (métaux alcalins, alcalino-
terreux…), comme par exemple le magnésium, dans un réactif organomagnésien.
Dans l’exemple ci-dessous, on dira que le magnésium exerce un effet inductif donneur sur
la chaîne carbonée. Ici le déplacement du nuage électronique se fait du magnésium vers la
chaîne carbonée, en s’atténuant toujours avec la distance.
L’effet inductif est additif. Par exemple, le groupement CF3 exerce un fort effet inductif
attracteur du fait de l’effet cumulatif des trois atomes de fluor. Son effet va ainsi un peu plus
loin sur la chaîne carbonée.
4
III. Mésomérie
Une molécule n’est pas toujours correctement décrite par une seule structure de Lewis. Il
faut parfois utiliser plusieurs représentations, appelées formes ou formules « mésomères » ou
« limites » ou « de résonnance ». La structure réelle de la molécule est alors un hybride (hybride
de résonnance) entre ces différentes formes mésomères, une « moyenne pondérée » de ces
différentes formes, toutes n’ayant pas le même « poids », c’est-à-dire ne contribuant pas de
façon égale à la molécule réelle.
La mésomérie est le terme utilisé pour parler de la description d’une molécule à l’aide de
plusieurs formes mésomères. Ceci est nécessaire lorsque la molécule présente un phénomène
de conjugaison, de délocalisation électronique.
La délocalisation des électrons se traduit sur les formes mésomères par le déplacement de
doublets d’électrons. A partir d’une première formule de Lewis, l’écriture de la mésomérie
implique de représenter le déplacement des doublets par des flèches courbes : . La flèche
part du doublet et la pointe de la flèche indique où se déplace le doublet. On dessine alors une
deuxième formule résultant de ce déplacement. Deux formes mésomères sont séparées par une
flèche double : .
Les électrons mobiles en mésomérie sont uniquement les doublets (doubles ou triples
liaisons) et les doublets non liants (notés n). Le phénomène de conjugaison est le fait que des
doublets soient mobiles, et donc que l’on puisse écrire de la mésomérie. Les électrons mobiles
(doublets déplacés d’une forme mésomère à l’autre) sont des électrons qui, dans la molécule
réelle, ne sont pas exactement localisés là où ils apparaissent sur les formes limites, mais qui
sont délocalisés sur un ensemble de liaisons et d'atomes. La représentation d’un hybride de
résonnance fait apparaître des pointillés pour les électrons délocalisés.
O O
+
hybride de résonnance : 4e- -
O
4 électrons délocalisés
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Systèmes conjugués
p n
A B C D A B C D
Enchaînement- -
Exemple :
Enchaînementn- -
Exemple :
p p
A B C A B C
Enchaînement- - p
Exemple :
p
n
A B A B
Enchaînement n - - p
Exemple :
6
Ecriture des formes mésomères
Il est possible d’écrire les formes mésomères d’un système conjugué donné, en partant d’une
formule de Lewis correcte, et en déplaçant les doublets d’électrons en respectant les règles
suivantes :
Seuls les électrons et les doublets non liants n, (ou un électron célibataire) peuvent être
déplacés. En aucun cas on ne doit rompre les liaisons , ni changer l’ordre des atomes.
Le nombre d’électrons de valence est inchangé.
La charge globale (somme des charges formelles sur les formules de Lewis) reste la même.
Le déplacement d’un doublet d’électrons est indiqué par une flèche courbe qui part du doublet
déplacé et qui pointe vers l’atome ou la liaison recevant le doublet (devenant n ou
respectivement sur la forme mésomère résultante).
Si ce déplacement d’électrons conduit à un dépassement de la valence sur un atome donné, un
second doublet d’électrons doit pouvoir être déplacé depuis cet atome pour que la règle de
l’octet ne soit pas dépassée. Pour mémoire, les atomes de carbone C, d’azote N et d’oxygène O
ne peuvent pas dépasser l’octet !
Afin de ne pas oublier de formes limites possibles, on évitera de déplacer plus de deux doublets
à la fois.
Les différentes formes mésomères sont séparées par un trait avec deux pointes :
et NON par une double flèche représentant un équilibre chimique : ou ; ni par un
égal ; ni par (utilisée en rétrosynthèse) ; ni par ou ; etc.
Pour bien les identifier comme telles, les formes mésomères sont souvent représentées entre
crochets.
Seules les formes mésomères de poids non négligeable sont représentées (voir paragraphe
suivant).
Toutes les formes mésomères d’une molécule donnée n’ont pas la même énergie. La
contribution (ou le poids) de chaque forme mésomère à la structure réelle de la molécule peut
donc être différente. Le poids de chacune des formes mésomères est d’autant plus grand que la
structure hypothétique correspondante est plus stable. Les formes les plus stables
correspondent à :
7
IV. Effet mésomère
L’effet mésomère d’un atome ou groupe d’atomes est son aptitude à provoquer par
mésomérie un déplacement d’électrons (ou n) dans un système conjugué.
On définit un effet mésomère attracteur (noté –M) lorsque l’atome ou le groupe d’atomes
a la capacité d’attirer à lui un doublet d’électrons (ou n) du système conjugué. Dans l’exemple
ci-dessous, le groupement carbonyle C=O a un effet mésomère attracteur –M sur la double
liaison C=C. C’est la présence de l’atome d’oxygène, plus électronégatif que le carbone, qui
provoque cet effet. En effet, par définition, l’atome le plus électronégatif d’une liaison attire à
lui les électrons de la liaison. Le long d’une liaison , c’est ce qu’on a appelé l’effet inductif
(voir paragraphe II) ; mais ici la liaison est double, on a une liaison et une liaison . Or les
électrons sont mobiles par mésomérie, on peut donc écrire une forme limite où le doublet
s’est déplacé pour se localiser sur l’atome d’oxygène qui l’a attiré (l’atome d’oxygène a alors
3 doublets non liants et il est important de noter que ceci laisse une lacune électronique sur
l’atome de carbone). Comme la double liaison carbone-carbone est conjuguée avec le carbonyle
(ils sont séparés d’une et une seule liaison simple sigma), on a aussi la forme limite extrême où
le doublet de C=C a été attiré vers l’oxygène par mésomérie, c’est-à-dire déplacé entre les
deux carbones initialement liés par liaison simple.
8
Contrairement à l’effet inductif qui se propage le long des liaisons et qui s’atténue
rapidement avec la distance, l’effet mésomère se propage dans tout le système conjugué.
Dans l’exemple de l’aniline ci-dessous, l’effet mésomère donneur du groupement amino
correspond à la délocalisation du doublet non liant de l’azote dans le cycle aromatique. On peut
« faire le tour » du cycle par déplacement minimal du doublet. On voit alors que cette
délocalisation renforce la densité électronique du noyau aromatique en positions ortho et para,
positions où apparaît sur les formes limites une charge négative sur l’atome de carbone.
Pour certains groupements (partie gauche du tableau ci-dessus), les effets inductif et
mésomère sont opposés.
Attention, il faut la présence d’un système conjugué pour parler d’effet mésomère. Sans
système conjugué, un groupement n’a pas d’effet mésomère. L’effet inductif lui, est toujours
présent. Lorsque des effets inductifs et mésomères sont présents, l’effet mésomère est souvent
déterminant par rapport à l’effet inductif vis-à-vis de réactions chimiques. On dit dans ce cas
que « l’effet mésomère l’emporte ».
Dans l’exemple suivant, l’atome de brome a un effet inductif attracteur (-I) et un effet
mésomère donneur (+M).
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VI. Cas particulier des groupements alkyle
Les groupements alkyle, noté R (pour Radical alkyle), font l’objet d’une attention
particulière dans un certain nombre de cas.
Ce sont les groupements carbonés, sans hétéroatome. Les plus simples sont :
Ils ne peuvent pas avoir d’effet mésomère, puisqu’ils ne possèdent aucun doublet
électronique ou n à partager, ni de « place » pour à l’inverse recevoir un doublet électronique.
Et vis-à-vis d’une chaîne carbonée, ils n’ont a priori aucun effet inductif, puisque la liaison
reliant la chaîne carbonée à un groupement alkyle est une liaison C-C, entre deux atomes de
carbone de même électronégativité ! Cette liaison n’est donc pas polarisée et on ne peut pas
parler d’effet inductif…
Néanmoins, on évoque souvent un effet inductif donneur des groupements alkyles. Il
s’agit d’un abus de langage ; cet effet est mieux décrit par le phénomène d’hyperconjugaison.
Dans le cas d’un carbocation (étude ultérieure au VIII), on peut comprendre l’interaction
stabilisante qui s’établit entre un groupement méthyle par exemple, et le carbone cationique
(schéma ci-dessous). C’est cette interaction que l’on qualifie pour simplifier d’effet inductif
donneur. En termes orbitalaires (théorie des orbitales atomiques OA et moléculaires OM, voir
cours de chimie du 1er semestre), c’est une interaction entre une orbitale moléculaire à deux
électrons (liaison C-H) et l’orbitale atomique p vide du carbocation. C’est un effet de
« donation » (d’où effet donneur) des électrons de l’OM vers l’OA p vide, qui est possible
car les orbitales peuvent se positionner « presque parallèlement » :
C CH2CH3 C C
H H CH2CH3
10
VII.Influence des effets électroniques sur la structure des molécules
Cas du buta-1,3-diène
La formule semi-développée du buta-1,3-diène : CH2=CH ̶ CH=CH2 montre un système
conjugué . On peut donc écrire de la mésomérie. Le déplacement des électrons peut se
faire dans un sens ou dans l’autre puisqu’il n’y a pas d’hétéroatome électronégatif pour orienter
le déplacement dans un sens préférentiellement :
Les deux formes mésomères à gauche et à droite sur le schéma ci-dessus ont chacune le
même poids (ce sont les mêmes, c’est symétrique). Elles sont par contre moins représentatives
de la molécule réelle que la formule diénique puisqu’elles font apparaître des charges formelles
(voir au III la contribution des formes mésomères). La structure réelle de la molécule est donc
un « hybride de résonnance » entre ces formes mésomères.
En effet, l’expérience montre que la liaison centrale C2 ̶ C3 est plus courte que la longueur
classique attendue d’une simple liaison C ̶ C (154 pm), alors que les deux autres liaisons sont
plus longues que la longueur classique attendue d’une double liaison C=C (133 pm). C’est la
conjugaison qui rend ces liaisons intermédiaires entre liaisons simples et doubles, comme le
montrent les formes limites sur lesquelles elles sont chacune tantôt simple, tantôt double.
Par ailleurs, la molécule est plane. Ceci s’interprète également par la mésomérie, par la
délocalisation des quatre électrons sur les quatre atomes de carbone du buta-1,3-diène, et à
l’aide des orbitales moléculaires (voir cours de chimie du 1er semestre).
Les quatre atomes de carbone sont hybridés sp2 (3 orbitales hybrides sp2 dans un même plan
orientées à environ 120° les unes des autres), avec chacun un électron dans l’orbitale atomique p
non hybridée (orbitale p perpendiculaire au plan des 3 orbitales sp2). C’est le recouvrement
latéral de ces orbitales p qui forme ce qu’on appelle les liaisons (orbitales moléculaires ). Ici
le recouvrement se fait donc sur l’ensemble des quatre atomes de carbone. Or le recouvrement
n’est possible que si les orbitales p sont parallèles : c’est ce parallélisme des quatre orbitales p
qui impose la planéité de la molécule.
ou
11
Cas du benzène
La formule du benzène (C6H6) présente une alternance de simples et doubles liaisons dans
le cycle à 6 atomes de carbone. Le système est donc conjugué sur l’ensemble du cycle, et on a
2 formes mésomères prépondérantes de même poids (formules de Kékulé). On représente
souvent l’hybride de résonnance du benzène à l’aide d’un cercle au milieu du cycle, ce dernier
symbolisant les 6 électrons délocalisés sur l’ensemble du cycle.
L’énergie réelle de la molécule est bien inférieure à celle de chacune des deux formes
mésomères. C’est la différence entre l’énergie de la molécule hypothétique avec les électrons
localisés, et l’énergie de la molécule réelle où les électrons sont délocalisés, que l’on appelle
« énergie de résonnance ».
Ici le benzène est un composé dit aromatique. Les composés aromatiques, toujours cycliques,
où (4n+2) électrons (n entier) sont délocalisés sur l’ensemble du cycle, sont particulièrement
stables. De manière générale, plus l’énergie de résonnance est élevée, plus la conjugaison est
importante, plus la molécule est stable.
Comme pour le buta-1,3-diène, les liaisons du cycle du benzène sont intermédiaires entre
simples et doubles liaisons (longueur C-C aromatique : 140 pm) et la molécule du benzène est
plane. Les 6 atomes de carbone sont en effet hybridés sp2, les 6 orbitales atomiques p contenant
chacune un électron se mettent parallèles entre elles permettant ainsi leur recouvrement.
penta-1,3-diène penta-1,4-diène
12
Les systèmes les plus stables sont les systèmes aromatiques (voir le cas du benzène). Mais
sinon, de manière générale, plus la conjugaison est importante, étendue sur une grande partie
de la molécule, plus la molécule est stable. Aussi, en pratique, plus on peut écrire de formes
mésomères, plus la molécule considérée est stable.
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Dans l’exemple précédent, un carbocation primaire : possédant un seul groupement alkyle
sur le C (ici le groupement alkyle est un groupement méthyle), n’est stabilisé que par un seul
effet inductif donneur ; il est donc moins stabilisé qu’un carbocation secondaire possédant deux
groupements alkyle sur le C et bénéficiant donc de deux effets inductifs donneurs. Le
carbocation tertiaire possédant trois groupements alkyle sur le C est encore plus stabilisé que
le secondaire puisqu’il bénéficie de trois effets inductifs donneurs stabilisants.
Les effets inductifs attracteurs, quant à eux, ont tendance à déstabiliser un carbocation car
ils augmentent encore le déficit électronique sur l’atome de carbone chargé positivement.
Dans l’exemple ci-dessus, chaque atome de chlore a un effet inductif attracteur. Les atomes
de chlore (un, deux ou trois Cl) sont sur le même atome de carbone (lui-même relié au carbone
déficitaire). Or les effets inductifs se cumulent donc l’effet attracteur global sur le C
augmente en intensité avec le nombre de Cl. Donc plus il y a d’atomes de chlore, plus l’effet
attracteur global est important, plus le carbocation est déstabilisé.
Un carbocation peut être avant tout stabilisé par effet mésomère, plus important que l’effet
inductif. Un carbocation stabilisé par mésomérie est plus stable qu’un carbocation non
stabilisé ou stabilisé par des effets inductifs (donneurs) seulement.
Ainsi, dans l’exemple ci-dessous, c’est le carbocation primaire, stabilisé par mésomérie, qui
est plus stable que le carbocation tertiaire.
À noter que pour stabiliser un carbocation par mésomérie, il faut un groupement mésomère
donneur (+M) dont l’effet doit être de combler la lacune électronique (case quantique) du
carbone chargé positivement.
Dans l’exemple précédent, le groupement phényle exerce bien un effet mésomère donneur
sur le C . Attention, dans d’autres cas de figure (pas sur un carbocation mais sur un carbanion
par exemple) le groupement phényle peut exercer un effet mésomère attracteur…
14
Stabilité des carbanions
Dans le cas d’un carbanion, les effets stabilisants sont inversés par rapport au carbocation
car il s’agit plutôt ici de diminuer la densité électronique sur le carbone possédant un doublet
non liant et chargé négativement.
Pour un carbanion, plus il y a d’effets électroniques attracteurs autour de la charge
négative, plus le carbanion est stabilisé.
Les effets donneurs, quant à eux, ont tendance à déstabiliser un carbanion car ils
augmentent la densité électronique sur le carbone déjà chargé négativement. Les effets
inductifs donneurs des groupements alkyle sur le C ont donc pour effet de déstabiliser le
carbanion. Ainsi, un carbanion tertiaire est moins stable qu’un carbanion secondaire, qui est
lui-même moins stable qu’un carbanion primaire.
>
>
>
La mésomérie quant à elle a toujours le même effet stabilisant. Un carbanion stabilisé par
mésomérie est plus stable qu’un carbanion non stabilisé ou stabilisé par des effets
inductifs (attracteurs) seulement.
CH2
< CH2 CH2
H3C H2C H2C
-M
moins stable plus stable car stabilisé par mésomérie
À noter que pour stabiliser un carbanion par mésomérie, il faut un groupement mésomère
attracteur (-M) dont l’effet doit être de délocaliser le doublet non liant du carbone chargé
négativement.
Dans l’exemple précédent, le groupement vinyle exerce bien un effet mésomère attracteur
sur le C . On notera que la deuxième forme limite est « identique » à la première, elles ont le
même « poids » ; cela signifie que la charge négative n’est pas plus sur un carbone que sur
l’autre, mais qu’elle est en moyenne partagée entre les deux carbones des extrémités (hybride
de résonnance avec ½ sur chaque carbone). Le carbone central en revanche n’est pas chargé.
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Réactivité en chimie organique
exemple : Cl Cl Cl + Cl
Formation de liaison
La formation d’une liaison par voie radicalaire met en jeu au moins un partenaire possédant
un électron célibataire. Dans l’exemple ci-dessous, les deux réactifs possèdent chacun un
électron célibataire.
Un radical peut aussi réagir sur une liaison pour donner un nouveau radical et une nouvelle
liaison.
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Bien que les réactions radicalaires jouent un rôle très important dans les phénomènes
biologiques (dégradation de l’ADN par les radicaux libres et réaction inverse de réparation par
les enzymes, etc.), la grande instabilité des radicaux fait que leur intervention dans des réactions
chimiques classiques est plus rare.
La très grande majorité des réactions que nous rencontrerons procèderont par voie ionique.
C’est pourquoi nous nous attarderons, dans la suite du cours, sur la formation et la rupture des
liaisons par voie ionique.
Formation de liaison
Lors de la formation de liaison par voie ionique, un des deux partenaires apporte les deux
électrons nécessaires à la formation de la nouvelle liaison. Le second partenaire doit alors
pouvoir accepter les deux électrons dans sa couche électronique externe. Pour cela :
soit sa couche électronique externe est incomplète (présence d’une lacune électronique) :
soit un doublet d’électrons devra « partir » pour libérer la place pour les 2 électrons apportés :
17
III. Notion de nucléophilie et d’électrophilie
Les exemples précédents montrent que, parmi les deux réactifs qui interviennent dans la
formation d’une liaison covalente par voie ionique, l’un fournit les deux électrons et l’autre les
reçoit. On définit ainsi deux notions caractéristiques de la réactivité d’une espèce en chimie
organique dans les réactions ioniques : la nucléophilie et l’électrophilie.
On appellera nucléophile l’espèce qui apporte les deux électrons nécessaires à la formation
de la nouvelle liaison covalente. Ces deux électrons sont présents soit sous forme d’un doublet
non liant (doublet n), soit d’un doublet de liaison .
On appellera électrophile l’espèce qui reçoit les deux électrons apportés par le nucléophile.
Celui-ci doit donc soit posséder une lacune électronique, soit pouvoir faire de la place aux
nouveaux électrons par rupture d’une autre liaison. Dans ce dernier cas, un atome (ou un
groupement d’atomes) qu’on appellera groupe partant ou encore nucléofuge, partira avec le
doublet de la liaison rompue.
Ainsi, un nucléophile réagit toujours avec un électrophile et réciproquement.
L’ion hydroxyde HO- est un réactif nucléophile. En effet, l’atome d’oxygène, chargé
négativement avec 3 doublets non liants, peut « attaquer » un site électrophile avec un de ses
doublets non liants.
En face de ce nucléophile, la liaison C-Br étant polarisée, l’atome de carbone du
bromométhane est électrophile avec sa charge partielle +. Il peut donc « recevoir l’attaque »
d’un nucléophile en formant une nouvelle liaison, sous réserve qu’une autre liaison se rompe
car un carbone ne peut pas être pentavalent. Or si le carbone est électrophile, c’est grâce au
brome qui est plus électronégatif et qui va donc être nucléofuge, c’est-à-dire que le brome va
« partir » en emportant les 2 électrons de la liaison C-Br pour donner l’ion bromure Br-.
Tous les déplacements d’électrons sont représentés par des flèches courbes : un
déplacement se fait donc de l’atome d’oxygène nucléophile vers l’atome de carbone
électrophile pour la création de la liaison O-C ; ET le doublet liant (la liaison) entre C et Br va
vers l’atome de brome, symbolisant la rupture de la liaison C-Br :
18
IV. Notion de basicité et d’acidité
La notion d’acides et de bases au sens de Brønsted est abordée et développée en chimie
des solutions aqueuses.
Un acide au sens de Brønsted est une entité capable de céder un proton :
Une base au sens de Brønsted est une entité capable de capter un proton :
En chimie organique, c’est la même chose. Et les réactions acido-basiques sont fréquentes.
Mais au niveau du vocabulaire, on parlera plutôt de protonation (d’une base) et de
déprotonation (d’un acide). Si la molécule qui est l’objet de notre attention est un acide, de
type AH avec un hydrogène acide identifié avec une charge partielle +, alors on dira qu’en
présence d’une base, la molécule AH est déprotonée. Si l’objet de notre attention est maintenant
une base, de type B avec au moins un doublet non liant, alors en présence d’un acide, on dira
que la molécule B est protonée.
De plus, au niveau des mécanismes, on représente souvent les formations et ruptures de
liaisons par des flèches courbes, même pour des réactions acido-basiques.
L’ion hydroxyde HO- est un réactif basique. En effet, le couple acide-base H2O/HO- est le
couple de l’eau de pKa 14. En face de cette base, l’acide benzoïque (acide carboxylique) est un
acide dont la base conjuguée est l’ion benzoate (ion carboxylate) ; il s’agit du couple
PhCOOH/PhCOO- de pKa 4,8.
En synthèse organique, on visualisera le H acide par sa charge partielle +, dûe ici à la
présence du O voisin (et du C=O mésomère attracteur qui renforce cette acidité). Un
déplacement (flèche courbe) se fait de l’atome d’oxygène basique de HO- vers l’atome
d’hydrogène acide de PhCOOH, donnant ainsi H2O (acide conjugué de HO-) ; ET le doublet
liant (la liaison) entre O et H va vers l’atome d’oxygène, donnant ainsi PhCOO- (base conjuguée
de PhCOOH). C’est ainsi que l’on schématisera la déprotonation de l’acide benzoïque :
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V. Grandeurs thermodynamiques versus grandeurs cinétiques
Les réactions acido-basiques, échanges de protons, sont des processus très rapides,
quasi-instantanés. En effet, un proton est une « petite » particule élémentaire, qui diffuse donc
très rapidement quel que soit le milieu.
Par ailleurs, avec la notion de couple acide/base, il existe des tables de pKa (Ka est la
constante d’acidité du couple acide/base). Grâce à cette constante thermodynamique, le pKa,
il est facile de comparer l’acidité ou la basicité des espèces : une espèce est d’autant plus acide
que « son » pKa est petit ; une espèce est d’autant plus basique que « son » pKa est grand.
Remarques : Un pKa est toujours associé à un couple acide/base, mais on fait très souvent
l’abus de langage de parler du « pKa d’un acide » ou du « pKa d’une base ».
En chimie des solutions aqueuses (solvant eau), les valeurs des pKa sont comprises entre
0 et 14. Mais en chimie organique (solvant organique), elles s’étendent de െ10 à +60 environ !
On dit que l’acidité et la basicité (au sens de Brønsted) sont des grandeurs
thermodynamiques, car la force des acides et des bases est mesurée par des constantes
thermodynamiques.
Il en va tout autrement de la nucléophilie et électrophilie. En effet, de manière générale, la
diffusion des espèces organiques (beaucoup plus « grosses » qu’une particule élémentaire) dans
un milieu n’est pas instantanée : les réactions sont lentes.
Par ailleurs, pour la nucléophilie et l’électrophilie, il n’y a pas de notion de couple. Il
n’existe donc aucune constante, aucune table, pour comparer des nucléophiles ou des
électrophiles entre eux.
On dit que la nucléophilie et l’électrophile sont des grandeurs cinétiques, car la force des
nucléophiles et électrophiles n’est pas mesurable, elle n’est reliée qu’à la vitesse de réaction.
Dire qu’un nucléophile est plus fort qu’un autre, c’est dire qu’il réagira plus rapidement. De
même pour un électrophile. Il n’y a aucune référence mesurable car la vitesse de réaction entre
un nucléophile et un électrophile dépend beaucoup des conditions expérimentales et de la nature
relative du nucléophile et de l’électrophile : un bon nucléophile dans des conditions données
peut s’avérer être un mauvais nucléophile dans d’autres conditions face à un autre électrophile.
Malgré cette grande différence entre acides et bases de Brønsted d’un côté, et nucléophiles
et électrophiles de l’autre : grandeurs thermodynamiques versus grandeurs cinétiques, il existe
des similitudes, notamment entre base et nucléophile. Reprenons les deux exemples vus dans
les paragraphes précédents :
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On se rend compte que le même réactif : l’ion hydroxyde HO-, est tantôt nucléophile, tantôt
basique. En termes de déplacements électroniques, c’est la même chose : l’atome d’oxygène,
avec un de ses doublets non liants, peut créer une liaison. La différence vient de ce qu’il va
trouver en face de lui : soit un carbone électrophile, il va ainsi se former une liaison O-C ; soit
un H acide, il va ainsi se former une liaison O-H.
La nucléophilie et la basicité sont donc toujours associées.
Par contre, on retrouve la différence entre grandeur cinétique et grandeur thermodynamique,
s’il y a compétition : c’est-à-dire lorsqu’une espèce à la fois nucléophile et basique, se retrouve
en face de deux sites, l’un électrophile, l’autre acide. Dans ce cas, les échanges de protons
(réactions acido-basiques) étant quasi-instantanés, contrairement à l’interaction lente entre un
nucléophile et un électrophile, il faut toujours considérer en premier lieu la réaction
acido-basique.
Une espèce à la fois nucléophile et basique, sera au final qualifiée de base si elle réagit avec
un proton (si elle « arrache » un proton) ; ou sera simplement qualifiée de nucléophile si elle
réagit avec un électrophile, en l’absence de tout H acide.
À noter que s’il y a plusieurs H acides, c’est la réaction avec le H le plus acide (pKa le plus
petit) qui sera considérée : l’espèce basique « arrachera » le proton le plus acide. Inversement,
s’il y a plusieurs sites basiques, c’est la réaction avec le site le plus basique (pKa le plus grand)
qui sera considérée : le site le plus basique « arrachera » un proton.
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VII. Identification du substrat en synthèse organique
En synthèse organique, on part en général d’une molécule, que l’on appelle substrat, et que
l’on va transformer, pour l’élaboration d’une molécule cible. Cette élaboration nécessite
l’emploi de réactifs.
En général, une étape de synthèse met en jeu deux espèces chimiques. Il faut pouvoir
distinguer universellement le substrat du réactif :
S’il y a ambiguïté, le substrat est l’espèce la plus stable, le réactif l’espèce la moins stable.
Exemple :
À noter qu’en synthèse organique on ne fera pas toujours apparaître les produits considérés
comme « sous-produits » de la réaction (sels inorganiques, espèces solubles dans l’eau qui
seront éliminées dans la phase aqueuse après traitement du milieu réactionnel, etc.). De même
que le réactif peut être écrit au niveau de la flèche, avec d’autres indications expérimentales :
solvant, catalyseur, température, temps de réaction, etc.
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En fait, l’équation que l’on écrit est très rarement une vraie équation-bilan, utilisée plus
systématiquement en chimie des solutions aqueuses.
Pour mémoire, une équation-bilan donne la nature des réactifs avec les proportions dans
lesquelles ils réagissent, et la nature des produits avec les proportions dans lesquelles ils se
forment. Une équation-bilan fait donc apparaître les réactifs et les produits à l’aide de formules
moléculaires avec des coefficients stœchiométriques reflétant la conservation des éléments et
de la charge.
Les réactions de substitution (S) : une partie (un ou plusieurs atomes) du substrat est
substituée/remplacée par une autre.
Par exemple :
Les réactions d’addition (A) : tous les atomes du substrat et du réactif se retrouvent
dans le produit.
Par exemple :
S’il ne s’agit pas d’une simple substitution, addition ou élimination, les autres réactions
rencontrées en synthèse organique seront qualifiées de réarrangements. Les autres réactions
peuvent être des combinaisons de substitution/addition/élimination, des cyclisations, …
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IX. Mécanismes réactionnels, intermédiaires réactionnels
Le schéma de synthèse (substrat produit) n’est qu’un bilan macroscopique, traduisant
la transformation du substrat, le résultat étant observable expérimentalement par analyse du
produit de la réaction. Mais ce bilan n’indique rien sur la manière dont les molécules réagissent
les unes avec les autres. Ce qui se passe au niveau microscopique, au niveau moléculaire,
constitue le mécanisme de la réaction.
Remarque : Les mécanismes ne sont pas observables directement, il faut faire des mesures
cinétiques : étude des variations des concentrations en fonction du temps de réaction.
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Exemples de processus élémentaires
Le plus souvent, la collision a lieu entre deux espèces de natures différentes, on parle alors
de processus élémentaire bimoléculaire : la vitesse de ce processus est proportionnelle à la
concentration de chacune des deux espèces dans le milieu.
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X. Catégories des réactions
On a distingué trois grands types de réaction par rapport au substrat : les réactions de
substitution (S), les réactions d’addition (A) et les réactions d’élimination (E).
En fonction de la propriété soit nucléophile, soit électrophile, du réactif, on va classer
plus précisément les réactions dans une des catégories suivantes :
substitution nucléophile SN
substitution électrophile SE
addition nucléophile AN
addition électrophile AE
élimination E
Exemple : Hydrolyse d’un dérivé bromé : réaction de substitution nucléophile
Le bilan montre que le substrat organique (un bromoalcane) subit une substitution : en effet,
l’atome de brome Br est substitué par un groupement hydroxyle OH.
Le mécanisme en 3 étapes montre qu’il y a passage par un carbocation (1ère étape
monomoléculaire) : ceci a pour effet d’activer le substrat. En effet, le carbone C+ du carbocation
est encore plus électrophile que celui de la liaison polarisée C-Br.
Dans une 2ème étape bimoléculaire, le réactif nucléophile H2O attaque le carbone
électrophile du substrat ; il s’agit donc d’une réaction de substitution nucléophile (SN). L’eau
est un nucléophile assez faible, mais comme le substrat a été activé en carbocation, l’attaque
nucléophile est facile.
Dans une dernière étape (de type acido-basique), un proton est libéré pour donner le produit
(un alcool). Au bilan, on a libéré le sous-produit inorganique HBr (1ère et 3ème étapes).
Le réactif nucléophile n’est ici rien d’autre qu’une molécule de solvant : l’eau. Une telle
réaction provoquée par le solvant eau est appelée hydrolyse.
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XI. Notion de catalyseur
Les réactions en chimie organique sont lentes (sauf les réactions purement acido-basiques).
(Rappel : L’électrophilie et la nucléophilie sont des grandeurs cinétiques). Elles nécessitent
ainsi souvent l’utilisation d’un catalyseur.
Un catalyseur est une substance qui permet d’accélérer une réaction (d’en augmenter
sa vitesse), sans en modifier le bilan. Un catalyseur ne figure donc pas dans une équation-bilan.
On l’indique habituellement sur la flèche de transformation, avec les conditions réactionnelles,
par exemple le solvant, la température de réaction, etc.
En revanche, le catalyseur apparaît dans le mécanisme. Il a un rôle d’activateur. Le
catalyseur est utilisé dans une étape élémentaire pour activer soit le substrat, soit le réactif ; puis
il est régénéré dans une autre étape élémentaire. Il peut ainsi être utilisé en quantité
substœchiométrique par rapport au substrat.
Mécanisme : 2 étapes
H
1- CH3-CH2 O H + H CH3-CH2 O
H
H H H
2- H C C O H2C CH2 + H + H2O
H H H
Le bilan montre que le substrat organique (un alcool de formule brute C2H6O) subit une
réaction d’élimination : en effet, l’atome d’oxygène et deux atomes d’hydrogène ont été
éliminés pour conduire au produit (un alcène de formule brute C2H4).
Le mécanisme en 2 étapes montre le rôle du catalyseur acide ; celui-ci est « utilisé », puis
« régénéré ». Dans la 1ère étape, le substrat est activé par protonation. Le catalyseur rend plus
facile/rapide la rupture de la liaison C-O dans la 2nde étape. En effet, le groupement
hydroxyle OH est un très mauvais nucléofuge, alors qu’après protonation, la coupure de la
liaison C-O dans la 2nde étape par libération d’une molécule d’eau est facile.
C’est une molécule d’eau qui est éliminée de l’alcool : cette réaction est appelée
déshydratation : réaction d’élimination d’une molécule d’eau.
Remarque : À l’inverse, une réaction d’addition d’une molécule d’eau est appelée
hydratation.
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XII. Profils énergétiques des réactions
Pour qu’une collision entre deux molécules soit efficace, il faut que le choc se fasse avec une
énergie suffisante.
Bien que le système évolue toujours sur le chemin correspondant au moindre coût
énergétique, il y a toujours une « barrière énergétique » à franchir. Cette barrière s’appelle
l’énergie d’activation du processus, notée Ea.
L’énergie d’activation notée Ea d’un processus élémentaire est l’énergie minimale à
fournir au système pour que ce processus élémentaire ait lieu, c’est-à-dire pour que le choc
moléculaire soit efficace, donne bien lieu à formation et/ou rupture de liaisons.
La vitesse de réaction est reliée à l’énergie d’activation : plus l’énergie d’activation est
élevée (plus la barrière à franchir est haute), plus la réaction est lente (difficile).
Les espèces présentes dans le milieu réactionnel étant toujours en mouvement, c’est dans
l’énergie cinétique de ces espèces, que le système peut trouver l’énergie d’activation nécessaire.
Si on augmente la température, la réaction est plus rapide. En effet, une élévation de
température augmente l’agitation thermique des molécules, apportant ainsi une énergie
cinétique supérieure, et facilitant le passage de la barrière énergétique d’activation.
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Sur le profil réactionnel, l’énergie d’activation correspond à une différence d’énergie
potentielle : différence entre l’énergie la plus haute sur le chemin réactionnel (le sommet de la
« bosse ») et l’énergie au départ du processus élémentaire.
L’état de plus haute énergie est appelé état de transition. L’état de transition correspond
donc à l’état du système au maximum du profil énergétique (le sommet de la « bosse »). À cet
état de transition correspond une disposition particulière des atomes les uns par rapport aux
autres. Cette disposition est appelée complexe activé. Attention, le complexe activé n’est pas
une espèce chimique. Le complexe activé n’est ni isolable, ni même détectable. Il correspond
juste à la disposition (non connue exactement car non mesurable !) des atomes au niveau de
l’état de plus haute énergie. Les liaisons sont en train de se former ou en train de se rompre.
Ea2
intermédiaire
(IR)
Ea1
état final
état initial
(C+D)
(A+B)
C.R.
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Il est important de bien distinguer les notions de complexe activé (agencement particulier
des atomes dans un état de transition) et d’intermédiaire réactionnel. Leurs caractéristiques
sont rassemblées dans le tableau suivant.
Lors d’un processus en plusieurs étapes, toutes les étapes ne se font pas à la même vitesse ;
certaines sont plus lentes, d’autres plus rapides.
Dans l’exemple précédent de deux étapes, il apparaît clairement sur le profil réactionnel que
l’énergie d’activation de la première étape est beaucoup plus élevée que celle de la seconde
étape (Ea1 >> Ea2). La première étape est donc beaucoup plus lente. À tel point qu’au final,
c’est elle qui impose la vitesse globale de la réaction ; c’est-à-dire que le temps de réaction
correspond juste au temps nécessaire à la formation de l’intermédiaire réactionnel, car une fois
cet intermédiaire formé, il réagit très rapidement, en un temps négligeable par rapport à celui
de sa formation. On dit que cette étape de formation de l’intermédiaire réactionnel est l’étape
cinétiquement déterminante (ECD).
Dans l’étude des réactions, on invoque souvent le postulat de Hammond. De façon très
simplifiée, il peut s’énoncer ainsi : tout paramètre (effets électroniques, solvatation…) qui
stabilise l’intermédiaire réactionnel, stabilise aussi le complexe activé qui permet sa formation,
donc diminue l’énergie d’activation de l’étape cinétiquement déterminante (ECD), donc
augmente la vitesse globale de formation des produits.
Autrement dit, plus l’intermédiaire réactionnel est stabilisé (effets électroniques,
solvatation…), plus la réaction est rapide.
Et concrètement, quand on écrit un mécanisme en chimie organique, plus l’intermédiaire
réactionnel est stabilisé (effets électroniques, solvatation…), plus le mécanisme proposé est
justifié.
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XIII. Exemples de réactions et mécanismes en chimie organique
Chaque exemple sera complété et commenté :
- Doublets non liants et lacunes électroniques
- Flèches courbes de déplacement des électrons
- Stabilité (relative) des intermédiaires réactionnels
- « Catégorie » de la réaction : SN, SE, AN, AE ou Elimination
- Profil réactionnel
Exemple 1
Bilan : CH3
MeOH
CH3 C I CH3 C CH2
CH3 CH3
Mécanisme : 2 étapes
CH3 CH3
1- CH3 C I CH3 C + I
CH3 CH3
CH3 CH3
Exemple 2
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Exemple 3
Exemple 4
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Exemple 5
Exemple 6
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Exemple 7
Exemple 8
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