Lait Sterilisé
Lait Sterilisé
Lait Sterilisé
Jean Pien
par
Jean PIEN
PREMIÈRE PARTIE
(1) Il est même parfaitement établi que la multiplication des germes ayant
survécu à la stérilisation n'entraîne pas toujours une modification physico-
chimique du lait se traduisant par une altération (Hermier [12]).
Cependant nous ne considérerons pas comme acceptable, dans le lait sté-
rilisé, la présence d'une flore résultant de la prolifération de germes quelcon-
ques, même si elle n'entraîne pas d'altération.
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dans le lait et de l'altérer, (Hermier [12], Kaplan [14]). Mais les ger-
mes qui seront insensibles à l'apport de ces suppléments (ou, ce qui
revient au même, à la transplantation dans un milieu nutritif plus
favorable) passeront inaperçus et seront considérés comme morts ou
absents. On peut donc dire dans ce cas qu'un échantillon renfermant
des germes vivants serait déclaré « stérile » puisqu'il serait impos-
sible de mettre ces germes en évidence.
En fait, on ne pourra jamais trancher entre les deux termes
suivants : ou bien l'échantillon est stérile, ou bien iLa été impos-
sible de déceler la présence de certaines cellules vivantes, si les
techniques actuelles ne le permettent pas.
Au reste, en admettant même qu'une technique améliorée donne,
demain, le moyen de dépister à coup sûr la présence éventuelle de
tout micro-organisme vivant, la réponse ne serait valable que pour
la prise d'essai soumise à l'examen et non pour le volume entier du
récipient. Et si la technique permettait l'examen du contenu du
récipient entier, la réponse ne serait pas valable pour les autres
récipients du lot entier.
Donc, à l'impossibilité technique de décider de la stérilité d'une
prise d'essai ou d'un récipient, s'ajoute l'impossibilité statistique de
conclure à la stérilité d'un lot entier. Dans les deux cas, une réponse
négative ne correspond qu'à une certaine probabilité de stérilité.
En conclusion: si l'on définissait le lait stérilisé comme devant
être stérile, cette définition serait incontrôlable, donc sans utilité
puisqu'il ne serait pas possible d'affirmer qu'elle a été respectée (non
pas pour la raison que la stérilité ne serait pas possible théorique-
ment, mais parce qu'il serait impossible de la prouver pratiquement).
(1) Ces spores qui n'auront pas germé dans le lait stérilisé, même au cours
des incubations prévues à l'occasion du contrôle, seront mises en évidence sur
des milieux nutritifs appropriés où elles donneront des colonies dénombrables
(voir plus loin).
MÉMOIRES ORIGINAUX 185
citer en exemple (et qui, encore une fois, est parfaitement satisfai-
sant) aurait une chance sur dix d'être refusé.
Puisque, comme nous l'avons longuement exposé plus haut, la
notion de stérilité du lait stérilisé doit être rejetée, la raison com-
mande d'accepter la présence de quelques spores survivantes et
d'imposer une limite raisonnable quant à leur nombre.
Enfin, pour en terminer avec cette notion, et pour répondre à
une ultime objection, il faut dire qu'il n'y a aucun risque que ces
quelques spores soient le résultat de la prolifération, au cours des
incubations, de germes ayant résisté à la stérilisation. Si tel était le
cas, on sait très bien que le nombre constaté lors du contrôle serait
considérable (même éventuellement sans altération du lait) et que
cette circonstance serait très facile à mettre en évidence par un
simple examen microscopique direct. Cette crainte est donc à écar-
ter définitivement.
Le lait stérilisé est un lait qui a été traité par chauffage (ou
par tout autre procédé officiellement autorisé) de telle manière qu'il
satisfasse aux conditions suivantes :
1) Etre exempt de micro-organismes nuisibles à la santé des
consommateurs, c'est-à-dire ne pas renfermer de germes pathogènes
ou toxinogènes.
2) Etre exempt de micro-organismes quelconques susceptibles
de s'y développer, c'est-à-dire n'être le siège d'aucune prolifération.
3) Etre et rester parjaitement stable et de bonne qualité orga-
noleptique, c'est-à-dire ne présenter aucun signe d'altération pendant
une période assez longue, compatible avec les nécessités commer-
ciales.
4) Ne pas renfermer, après trois semaines d'incubation à 31 C 0
dans le' lait, révélées par culture sur plaques dans .un milieu nutritif
approprié.
5) Le lait stérilisé doit être conditionné dans des récipients
étanches aux liquides, aux gaz et aux micro-organismes.
6) Le lait stérilisé doit être entreposé à l'abri de la lumière ou
conditionné en récipients opaques.
Désignation : La désignation officielle d'un tel lait ne peut être
que « lait stérilisé »,
aucun des défauts de coloration, saveur, etc. du lait stérilisé dans les
conditions classiques (par exemple à 120 C pendant 15-20 mn). Il
0
(1) Cette réaction était utilisée, jusqu'ici, à la distinction des laits pasteu-
risés (où l'albumine est en grande partie non dénaturée et décelable) et des
laits stérilisés classiques (où l'albumine est totalement dénaturée). Or on a
depuis longtemps constaté que cette réaction était inutilisable pour distinguer
les laits pasteurisés et les laits stérilisés V.H.T., car dans les deux cas, elle
donne une réaction positive d'albumine non dénaturée. C'est la raison qui nous
a incité à utiliser cette réaction (en la modifiant pour l'adapter) afin d'effectuer
la distinction entre les laits V.H.T. (où une grande partie de la lactalbumine
reste soluble) et les laits stérilisés classiques (où l'albumine est entièrement
dénaturée).
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DEUXIÈME PARTIE
(1) Le contrôle des laits V.H.T. (qui sont des laits stérilisés) s'effectuera
par cette méthode,complétéepar le test de turbidité, décrit plus loin.
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b) Epreuve d'étuvage
Deux autres échantillons sont mis à incuber à 30° C ± 1°C pen-
dant 14 j. Après incubation, l'un d'eux servira aux examens organo-
lep tique, physique et bactériologique décrits au paragraphe c, l'autre
sera réservé à l'examen bactériologique (dénombrement par culture)
décrit au paragraphe d.
Les deux derniers échantillons sont mis à incuber à 55° C ± 1°C
pendant 7 j. Après incubation, ils subiront respectivement les mêmes
examens.
2) Epreuve à l'alcool
Mélanger à parties égales : lait à étudier et alcool éthylique à
68°. Il ne doit se produire aucune floculation.
3) Epreuve d'ébullition
Introduire quelques cm' de lait stérilisé dans un tube à essai et
porter 5 mn au BM bouillant. Il ne doit se produire aucune flocu-
lation.
4) Mesure électrométrique du pH
Le pH du lait stérilisé mesuré après incubation ne doit pas dif-
férer du pH mesuré avant incubation de plus de 0,5 unité.
6) Examen bactériologique
L'examen microscopique direct (effectué par la méthode directe
décrite plus haut) ne doit pas faire apparaître un nombre de germes
totaux sensiblement plus élevé que dans le cas de l'examen avant
incubation.
1) En aérobiose
Un ml du contenu de l'échantillon est placé aseptiquement dans
une boîte de Pétri de 100 mm de diamètre. On le mélange de façon
très homogène avec 20 ml du milieu stérilisé suivant :
Peptone trypsique de caséine (Bacto-tryptone Difco
nv B 123) . 5 g
Extrait de levure .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. 3 g
Glucose . 1 g
Amidon soluble (exempt de propriétés bactéricides) 1g
Agar . 15 g
Eau distillée dans un appareil en verre ou en silice 1000 ml
Ajuster à pH : 7. Répartir le milieu à raison de 20 ml par tube
de 200 X 20 mm. Autoclaver 20 mn à 115° C. Conserver au frais et
à l'obscurité.
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2) En anaérobiose
Un ml du contenu de l'échantillon est introduit aseptiquement
dans 20 ml du milieu V.L. (viande extrait de levure) ci-après
Peptone trypsique de caséine (Bacto-tryptone Difco
nv B 123) .. .. .. .. .. .. .. .. 10 g
Chlorure de sodium .. .. 5 g
Extrait de viande (Liebig) .. 4 g
Extrait de levure .. .. .. .. 5 g
Glucose.. .. .. .. .. .. .. 2 g
Chlorhydrate de cystéine .. .. .. 0,3 g
Amidon soluble (exempt de propriétés bactéricides) 1 g
Agar.. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. 15 g
Eau distillée dans un appareil en verre ou en silice 1 000 ml
Faire bouillir sans le glucose. Ajuster à pH 7,4. Répartir le
milieu à raison de 20 ml par tube de 200 X 20 mm. Autoclaver
20 mn à 115° C. Conserver au frais et à l'obscurité.
On opère ainsi :
Le tube de 200 X 20 mm contenant le milieu en culot est placé'
au bain-marie bouillant ; après fusion, il y reste durant 10 mn au
moins pour éliminer parfaitement les gaz dissous. La température
du milieu est alors ramenée à 48° C. On ajoute le lait et on mélange
de façon homogène en évitant toute agitation excessive capable
d'introduire une trop grande quantité d'air. On refroidit sous l'eau
du robinet et on laisse gélifier en culot.
Le milieu ainsi ensemencé est incubé pendant 3 j à 31° C ± 1° C
ou à 55° C ± 1° C selon que l'échantillon a été incubé lui-même à
l'une ou à l'autre de ces températures.
On considère comme acceptables les produits ne contenant pas
plus de 5 bactéries par ml, c'est-à-dire pas plus de 5 colonies sur
chacun des deux milieux.
1) Domaine d'application
L'objet du test décrit ci-dessous est de permettre la distinction
entre les laits D.H.T. (c'est-à-dire des laits stérilisés obtenus par un
procédé de chauffage en flux continu pendant quelques secondes à
une température supérieure à 1300 C), des autres types de laits sté-
rilisés suivant des méthodes classiques (stérilisation dans les réci-
pients par systèmes statiques ou rotatifs pendant plusieurs minutes
ou davantage à des températures inférieures à 125° C).
La méthode est applicable à l'identification de laits D.H.T. aro-
matisés ou chocolatés qui n'ont pas été soumis à un pré-chauffage.
2) Principe de la méthode
Le test de turbidité consiste à déterminer la présence éventuelle
de protéines de sérum non dénaturées dans un lait stérilisé. Cette
détermination est basée sur l'aspect visuel après 5 mn d'ébullition
du filtrat obtenu à partir d'un échantillon de lait auquel on a ajouté
3) Réactifs
3.1. Sulfate d'ammonium (NH')2 SO•.
4) Appareillage
4.1. Béchers de 100 ml ou flacons coniques de 100 ml.
4.2. Entonnoirs et papier filtre (à filtration lente - Whatman nv
2 V ou 42).
4.3. Tubes à essai 160 X 16 mm.
4.4. Bain-marie contenant de l'eau en ébullition au moment où
les tubes y sont plongés ; l'eau devra rester en ébullition jusqu'à la
fin du test.
5) Mode opératoire
5.1. Verser dans un bécher ou un flacon conique, à l'aide d'une
pipette graduée, 20 ml ± 0,5 ml de l'échantillon de lait rendu homo-
gène par retournement ou agitation.
5.2. Ajouter 4 ± 0,1 g de sulfate d'ammonium. Agiter doucement
le bécher ou le flacon pendant 1 mn et laisser reposer pendant 4 mn.
5.3. Filtrer à travers du papier filtre (4.2). Verser 5 ml du filtrat
dans un tube à essai (4.3). Si nécessaire, filtrer à nouveau afin
d'obtenir un filtrat limpide.
5.4. Placer les tubes à essai dans l'eau en ébullition pendant
5 mn ± 2 s.
Résumé
Summary
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