La Tragique Histoire Du Docteur Faust
La Tragique Histoire Du Docteur Faust
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a 10 Cent
MARLOWE
LA TRAGIQUE HISTOIRE
DU
DOCTEUR FAUST
Edite par
HENRI GAUTIER
35.QUAI DES GRANDS AUGUSTINS-
A
PARIS
69373 1999
421
421
Il paraît un volume par semaine
Directeur littéraire de la Nouvelle Bibliothèque Populare i
ALFRED ERNST
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MITSUOLA GиXO
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400852
MARLOWE
Notice littéraire.
ALFRED ERNST,
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O
[ 5 ]
FAUST
LE CHOEUR entre
Ce n'est plus en marchant dans les champs de Thrasimène , où
Mars embrassa la cause de Carthage la guerrière, ni par l'éclat
d'héroïques et audacieux exploits , que notre Muse se propose de
faire parade de ses vers divins . Ce que nous désirons aujourd'hui ,
messieurs , c'est seulement vous représenter les vicissitudes
bonnes ou mauvaises de la fortune de Faust ; nous en appelons ,
pour nous applaudir, à votre jugement plein de patience ; et nous
voulons vous parler au nom de Faust enfant. Il est né, de parents
de basse extraction , en Allemagne dans une ville appelée Roda .
Plus mûr d'années , il alla à Wittemberg, où ses parents lui firent
donner une bonne éducation Il y fit de si rapides progrès en
théologie, et y orna si richement le jardin fertile des écoles , qu'il
fut bientôt honoré du nom de Docteur, supérieur à tous ceux qui
trouvent leurs plaisirs à discuter sur les sciences sacrées , jus-
qu'au jour où, gonflé de savoir et de présomption, il s'éleva avec
ses ailes de cire au- dessus de sa région, et où , ses ailes venant
à se fondre, les cieux conspirèrent sa chute en effet , tombé dé-
sormais en des recherches diaboliques, il se gorge des dons dorés
de la science, il s'énivre de la maudite Nécromancie . Rien ne lui
est si cher que la Magie ; il la met plus haut que ses jouissances
les plus précieuses. Voici notre homme assis dans son cabi-
net de travail.
(Le Chœur sort. )
SCÈNE PREMIÈRE
Le cabinet de travail de Faust
FAUST.Dirige avec soin tes études , Faust , et commence à son-
der la profondeur de ce que tu comptes enseigner aux autres !
Tout en élant de nom un Docteur en théologie , cherche quelle
est la fin de toute science . Vis et meurs dans les ouvrages d'Aris-
tote. - Douces Analytiques, vous m'avez ravi : Bene disserere est
finis logices. Bien discuțer, est -ce vraiment, est-ce donc le but
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qui m'a ravi ! Aidez-moi donc , chers amis, dans cette entreprise ;
et moi, qui ai confondu par la force et la concision de mes syllo-
gismes, les pasteurs de l'Église allemande, moi, qui ai forcé l'or-
gueil de Wittemberg à se presser en foule à mes leçons , ainsi que
l'on vit les ombres infernales se presser autour du doux Musée ,
quand il arriva aux enfers, je serai aussi savant que l'était Agrippa,
que ces évocations rendirent célèbre dans l'Europe entière .
VALDÈS . G Faust, ces livres , ton génie, notre expérience, nous
feront canoniser par tous les peuples. De même que les Maures
indiens obéissent à leurs seigneurs espagnols, ainsi les esprits des
éléments divers seront toujours aux ordres de nous trois à notre
gré, ils veilleront sur nous sous la forme de lions, ou de reîtres
allemands portant la lance de leurs chevaliers , ou de géants de
Laponie trottant à nos côtés ; quelquefois ils prendront la forme
de femmes et de vierges. De Venise ils nous amèneront d'énormes
galères, et d'Amérique la toison d'or qui chaque année remplit le
trésor du vieux roi Philippe ; si toutefois le savant Faust est
bien résolu dans un dessein .
FAUST . Valdés , je suis aussi résolu en ce dessein que tu l'es
toi-même à vivre ; ainsi, plus de ces objections .
CORNELIUS . Les miracles qu'accomplira la Magie te feront dé-
laisser toute autre étude. Celui qui est instruit dans l'Astrologie ,
riche de Langues , savant en Minéralogie , possède tous les princi-
pes que la Magie exige . Ne mets donc point en doute, Faust, le re-
nom qui t'attend ; tu te verras plus fréquenté pour ces mystères
que ne le fut jamais l'oracle de Delphes . Les esprits me disent
qu'ils peuvent mettre l'Océan à sec et y retrouver les trésors de
tous les naufrages ; oui, et aussi toutes les richesses que nos aïeux
ont ensevelies dans les entrailles massives de la terre. Dis-moi
Faust, que nous manquera-t-il alors à tous trois ?
FAUST. Rien, Cornélius ! - Oh , quelle ivresse pour mon âme !
Venez, apprenez- moi les figures magiques , que je puisse conjurer
les esprits dans quelque bois touffu , et goûter la pleine possession
de ces allégresses !
VALDES . - Va donc vite vers quelque taillis solitaire , et emporte
les ouvrages du sage Roger Bacon et d'Albanus , le Psautier hébreu ,
le Nouveau Testament ; pour les autres choses nécessaires ,
t'en informerons avant la fin de notre conversation .
CORNELIUS . - Valdès , enseigne- lui d'abord les termes de l'art
magique, puis, une fois qu'il aura appris toutes les autres céré-
monies, Faust pourra éprouver sa science par lui - même .
VALDES . - Je vais t'enseigner d'abord les rudiments, et tu seras
bientôt plus expert que moi-même !
FAUST. -- Venez donc dîner avec moi , et après , nous examine-
rons la chose jusqu'en ses subtilités. Car, avant de m'endormir, je
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veux essayer mes forces ; je veux faire une conjuration cette nuit
mème, quand je devrais en mourir !
SCÈNE II
Une rue.
Un bois.
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SCÈNE IV
WAGNER et UN CLOWN¹ entrent
Une rue.
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FAUST. - Que peut présager cet arrêt glacé de mon sang ? Est-
ce qu'il ne veut pas j'écrive ce billet ? Pourquoi ne coule-t-il pas,
pour que je puisse écrire encore ? www « Faust te donne son âme : »
Ah ! c'est là qu'il s'est arrêté ! ... Pourquoi ne la donnerais-je pas
mon âme? Cette âme n'est- elle pas à moi ?... Ecris donc encore :
« Faust te donne son ame. »
MEPHISTOPHILIS. P Faust, voici du feu ; approche ton bras du
brasier.
FAUST. - Oui, voilà que le sang recommence à ruisseler ; je vais
achever tout de suite .
MEPHISTOPHILIS . w (A part.) Que ne ferais-je pour obtenir son
âme !
(Il écrit.)
FAUST. Consummatum est ; l'écrit est terminé, et Faust a légué
son âme à Lucifer. Mais que vois -je inscrit sur mon bras ? Homo
fuge ! où fuir? Si c'est vers Dieu, il me rejettera en enfer. C'est
une erreur de mes sens . Non , il n'y a rien d'écrit... Cependant si,
je vois clairement écrit , là : homo fuge ! Non , non , Faust ne fuira
pas.
MEPHISTOPHILIS. Je vais chercher quelque chose qui puisse
distraire son esprit.
(Il sort.)
Méphistophilis rentre avec des Démons, qui donnent à Faust des couronnes et un
vêtement splendide, dansent et s'en vont. )
FAUST. Parle, Méphistophilis , que signifie cette pantomime ?
MEPHISTOPHILIS . Rien, Faust ; elle n'a d'autre but que de te
charmer, et de te montrer de quoi la magie est capable.
FAUST. Mais pourrai-je évoquer de tels esprits quand je vou-
drai?
MEPHISTOPHILIS . Oui , Faust, et réaliser plus grandes choses
encore .
FAUST. - Alors cela vaut bien le don d'un millier d'âmes ! Prends
donc, Méphistophilis , ce parchemin . c'est l'acte de donation de
mon corps et de mon âme ; mais à cette condition que tu exécu-
teras rigoureusement tous les articles convenus entre nous .
MEPHISTOPHILIS . Faust, je jure par l'enfer et par Lucifer d'exé-
culer toutes les conventions prises entre nous.
FAUST . Alors , écoute , je vais te le lire .
Aux conditions suivantes :
« Premièrement, que Faúst pourra être esprit en forme et en
substance ;
« Deuxièmement , que Méphistophilis le servira et sera à ses or-
dres ;
1. En position et en temps.
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SCÈNE VI
(Entre Ralph. )
RALPH. ― Robin, je t'en prie, va- t'en ; un gentilhomme attend
là pour avoir son cheval, il voudrait que ses effets fussent brossés
et propres.
LE CLOWN Au large, au large, sans moi vous allez être enlevé,
vous allez être mis en pièces , Ralph; au large , car je suis en train
de préparer une terrible machine .
RALPH. - Robin, quel est ce livre
?
LE CLOWN. Quel livre ? Oui, le plus terrible des livres de magie
qui aient été composés par un diable enduit de soufre.
RALPH. - - Et par ce livre tu peux conjurer les esprits !
LE CLOWN. - - Avec lui voici ce que je peux faire le plus facilement
du monde te griser d'hippocras dans n'importe quel cabaret
d'Europe pour rien ; voilà un de mes enchantements magiques.
RALPH. Le curé notre maître prétend que ce n'est là rien.
LE CLOWN. - Viens , Ralph ; ne t'avais-je pas dit que pour tou-
jours notre fortune était certaine, grâce à ce livre du Docteur
Faust ? Ecce signum ! tiens, voici un bénéfice net pour des valets
d'écurie.
montre la coupe.).
RALPH . - Robin , voici le cabaretier qui (II
nous poursui t!
LE CLOWN . - Tais -toi ! je m'en vais l'emballer de façon surna-
turelle.
( Entre le cabaretier.)
Garçon, j'espère que toute la dépense est payée ! Dieu vous garde !
Viens , Ralph.
LE CABARETIER. - Hé ! tout doucement, monsieur encore un
;
mot, s'il vous plaît. Vous avez une coupe à me payer, avant de
partir.
LE CLOWN. - Moi une cou
, pe ; Ralph, j'ai une coupe ! Je me
moque de vous, vous n'êtes qu'un drôle. Moi, une coupe ! Fouillez-
moi donc !
LE CABARETIER.- C'est bien ce que je veux faire, monsieur, avec
votre permission.
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LE CABARETIER. Il faut que je parle aussi à votre compagnon .
A votre tour, monsieur !
RALPH.Moi, monsieur ! moi, monsieur ! Fouillez tant qu'il
vous plaira.
(Le cabaretier fouille Ralph.)
Et maintenant, monsieur, vous devriez rougir de mettre en doute
d'honnêtes gens comme nous.
LE CABARETIER. -- Il n'en est pas moins sûr que l'un ou l'autre.
vous avez cette coupe sur vous.
LE CLOW.- Vous mentez , garçon . (A part. ) Elle est là devant
moi. Drôle, je vous apprendrai à inquiéter des honnêtes gens.
Arrière, où je vous accommode pour votre coupe ! Ce que vous
avez de mieux à faire est de rester au large, ou je vous saute dessus
au nom de Belzebub . (A part, à Ralph . ) Attention à la coupe ,
Ralph .
LE CABARETIER. Que voulez-vous dire , drôle ?
LE CLOWN. — Je vais vous l'apprendre .
(Il lit dans le livre. )
« Sanctobulorum Periphrasticon. » — Oui , j'ai grande envie de
vous chatouiller les côtes , cabaretier. ( A part, à Ralph . ) Surveille la
coupe, Ralph .
(Illit.)
Polypragmos Belseborams framanto pacostipho tostu, Mephisto-
philis, etc. »
(Entre Méphistophilis, qui leur tire des pétards dans le dos, et sort. Ils courent de tous
côtés.)
LE CABARETIER. - O nomine Domini ! Que dis-tu de cela, Robin ?
tu n'as pas la coupe ?
RALPH . Peccatum peccatorum ! Voilà ta coupe, bon cabaretier.
(Il donne la coupe au cabaretier, qui sort.)
LE CLOWN . Misericordia pro nobis ! Que faire ? Bon diable , oh !
fais-moi grâce, je ne volerai plus jamais ta bibliothèque.
(Méphistophilis rentre . )
MEPHISTOPHILIS . Souverain de l'enfer, toi qui sous ton sombre
pouvoir vois de grands potentats se prosterner dans la terreur, et
sur tes autels des milliers d'âmes couchées , considère comme les
conjurations de ces drôles m'ont dérangé ! Venir de Constantinople.
ici pour la seule fantaisie de ces maudits esclaves !
LE CLOWN. Comment ? De Constantinople ! Vous avez fait là un
fameux voyage ! Vous plairait-il d'accepter un sixpence pour mettre
dans votre bourse afin de payer votre souper , el de partir ?
MEPHISTOPHILIS. Eh bien drôles , pour vous châtier de votre
présomption , je vous change .'un en singe, l'autre en chien , et
sauvez-vous au plus vite !
· (11 sort. )
LE CLOWN. Quoi ? En singe ! Excellent ! Oh ! comme je vais
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28-
L'EMPEREUR. Maître
ةيت Docteur Faust, j'ai ouï conter d'étranges
choses de ta science dans l'art obscur ; on dit qu'il n'y a personne
dans mon empire ni même dans tout l'univers qui puisse se com-
parer à toi pour les prodiges surprenants de la magie. On dit que
tu as un démon familier ; tu peux accomplir grâce à lui tout ce que
tu veux. Voici quelle est ma demande : montre- moi quelque preuve
de ton habileté, afin que mes yeux puissent confirmer par leur
témoignage ce que mes oreilles ont appris . Et j'en fais serment,
par l'honneur de ma couronne impériale, quoi que tu fasses, tu
soras protégé par moi contre tout dommage et tout préjudice.
LE CHEVALIER. (A part.) - Sur ma parole, il a bien l'air d'un
sorcier.
FAUST . ― Mon gracieux souverain , quoique je doive confesser
que je suis très inférieur aux récits qu'on a publiés de moi, et que
rien qui puisse être digne de votre Impériale Majesté , cependant
l'amour que je vous dois et mon devoir m'obligent ; je consens à
faire tout ce que Votre Majesté m'ordonnera.
L'EMPEREUR . Alors , Docteur Faust, observe ce que je vais te
dire. Il m'est arrivé quelquefois de demeurer seul dans mon ca-
binet, et diverses pensées m'assiégeaient touchant la gloire de mes
aïeux ; je songeais à la bravoure qui leur avait fait accomplir de
tels exploits, réunir de telles richesses , soumettre tant de royaumes ,
que nous leurs successeurs , ou ceux qui après nous monteront sur
notre trône, nous courons le risque , j'en ai peur, de n'atteindre
jamais ce degré de reputation , de puissance et d'autorité . Parmi
ces rois est Alexandre le Grand , le spectacle de prédilection des
hommes qui règnent sur le monde , celui qui du rayonnement
éblouissant de ses actes glorieux éclaire le monde comme d'une
lumière que ce monde réfléchie ; si bien que lorsque j'entends seu-
lement parler de lui , mon âme souffre de n'avoir jamais vu cet
homme. Si donc, par la vertu de ton art, tu peux évoquer ce prince
des voûtes souterraines et creuses, où gît , dort enseveli ce con
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SCÈNE X
Une pelouse ; ensuite la maison de Faust.
SCÈNE XII
FAUST. - Oui, priez pour moi ; et quelque fracas que vous en-
tendiez, ne venez pas à moi , car rien ne peut me sauver .
SECOND ÉTUDIANT . Prie aussi toi, nous supplierons Dieu pour
qu'il ait pitié de toi.
FAUST. - Adieu, messieurs ; si je reste en vie jusqu'au jour,
j'irai vous visiter, sinon, Faust sera parti pour l'enfer.
Tous. Faust, adieu.
MEPHISTOPHILIS. ― Oui , Faust, à présent tu ne peux plus espérer
le ciel ; désespère donc ; ne pense plus qu'à l'enfer qui doit être ta
demeure, ta résidence .
FAUST. - O démon ensorceleur ! c'est par ta tentation que j'ai
perdu les éternelles félicités.
MEPHISTOPHILIS. Je confesse qu'il en est ainsi, Faust, et j'en ai
joie. Oui , c'est moi, qui, lorsque tu étais dans le chemin du ciel,
t'en ai fermé le passage ; moi qui , lorsque tu prenais le livre des
écritures , en tournais les feuillets, et conduisais tes yeux ... Quoi,
tu pleures ? Il est trop tard, désespère ! Adieu , les fous qui veulent
rire sur la terre pleureront dans l'enfer .
(11 sort. )
cent mille ans , mais que tout à la fin il soit sauvé ! Mais non, il
n'y a pas de fin au châtiment des damnés ! Pourquoi , Faust, n'as-
tu pas été une créature sans âme? Ou bien pourquoi l'âme que tu
as est-elle immortelle? Ah ! si la métempsycose de Pythagore était
une vérité, cette âme s'envolerait loin de moi, et je serais trans-
formé en une bête ! Les bêtes sont heureuses , car lorsqu'elles
meurent, leur âme se dissout aussitôt parmi les éléments ; mais
la mienne vivra à jamais pour subir les supplices de l'enfer.
Maudits soient les parents qui m'ont engendré ! Non , Faust, mau-
dis-toi toi-même, maudis Lucifer qui t'a privé des joies du ciel .
(L'horloge sonne minuit. )
Minuit! Minuit ! ô mon corps , change-toi en cet air impalpable,
ou Lucifer va t'emporter en enfer.
(Eclairs et tonnerre.)
O mon âme, change-toi en imperceptibles gouttes d'eau, et tombe
dans l'océan , pour qu'à jamais tu ne puisses y être trouvée.
(Entrent les démons .)
Mon Dieu, mon Dieu , ne me regarde pas d'un regard si terrible !
Vipères et serpents, laissez-moi respirer une seconde ! Hideux en-
fer, n'ouvre pas ta gueule ainsi ! Ne viens pas , Lucifer ! Je veux
brûler mes livres !... Ah ! Méphistophilis !
(Les démons emmènent Faust,)
(Entre le chœur.)
LE CHOEUR. La branche est coupée qui aurait pu croître et
prospérer ; brûlé, le rameau de laurier d'Apollon , qui poussa pen-
dant quelque temps en cet homme plein de savoir . Faust n'est
plus ! Regardez sa chûte dans l'enfer, et puisse sa destinée dé-
moniaque persuader le sage à n'avoir que de l'étonnement devant
les choses défendues , dont le mystère entraîne les esprits hardis
à aller au delà des limites marquées par la puissance céleste.
421
A 69373
PENSÉES
radoT
Jual ET
PORTRAITS
estito
AVEC INTRODUCTION PAR A. ERNST
1 si 20
ઘાસ નામનું
Entre tous les moralistes français, Vauvenargues est particulièrement inté-
ressant par l'élévation d'idées qui le caractérise, par les nobles sentiments
qui inspirent ses maximes. L'histoire de sa vie, si courte et si douloureuse,
rend son œuvre plus sympathique encore, et cette œuvre, issue d'une nature
d'élite, s'adresse de même aux âmes délicates et aux coeurs généreux.
121AIDRA ABONNEMENTS
A LA
Nouvelle Bibliothèque populaire